AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze février deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MISTRAL, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, de Me COPPER-ROYER et de la société civile professionnelle ROUVIERE et BOUTET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Armand,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 1er octobre 1998, qui, pour blessures involontaires, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-19, alinéa 1, 222-44 et 222-46 du Code pénal, 1382 du Code civil, 485, 567, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que la cour d'appel déclare le prévenu Armand X... coupable du chef du délit de blessures involontaires avec incapacité temporaire totale de plus de trois mois et le condamne à la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis, ainsi qu'à la réparation du dommage causé à la victime ;
" aux motifs que " Armand X..., président de l'association Vélo Sprinter des Alpes, autorisé sous son entière responsabilité, comme le précise l'arrêté préfectoral du 30 juillet 1996 à organiser l'épreuve cycliste du 15 août 1996 à la Bréole, n'a pas pris toutes les mesures de sécurité nécessaires au bon développement de la course, comme l'a d'ailleurs démontré l'accident qui est survenu ; que la matérialisation de l'interdiction du circuit et la signalisation dont la mise en place incombe à l'organisateur de la course ont été manifestement défaillantes ; que la gendarmerie a souligné qu'une signalisation appropriée de la course cycliste associée à des mesures plus fermes aux postes de surveillance de l'itinéraire auraient permis d'éviter l'accident ; que les pompiers n'avaient reçu aucune mission particulière puisque la mission essentielle était d'apporter des secours en cas d'intervention sur la course et qu'ils ne savaient même pas l'itinéraire emprunté par la course et le sens dans lequel elle allait tourner ; qu'Armand X... a reconnu lui-même lors de son audition, avoir eu connaissance juste avant le départ de la course de ce que les signaleurs n'étaient selon ses propres termes que des pompiers mis en place sur le dispositif en plus de leur fonction de poste de secours et a indiqué que ces pompiers ne possédaient aucun moyen de signaler qu'ils encadraient une course cycliste ; que l'arrêté du 26 août 1992 portant application du décret du 3 août 1992 modifiant le Code de la route et relatif à la sécurité des courses et épreuves sportives sur les voies ouvertes à la circulation publique prévoit notamment que les signaleurs, termes désignant les personnes chargées de signaler la priorité de passage, doivent être identifiables par les usagers de la route au moyen d'un brassard
marqué course et prescrit également l'utilisation d'une signalisation et de barrages adaptés sur lesquels le mot course doit être inscrit ;
que les prescriptions de cet arrêté qui prévoit également que les équipements sont fournis par l'organisateur n'ont manifestement pas été respectés par ce dernier " ;
" alors qu'il résulte de l'arrêt préfectoral du 30 juillet 1996 ayant autorisé la course cycliste que " les mesures de protection et de secours proposées et arrêtées par les organisateurs " l'étaient " en accord avec le maire et les chefs de service concernés ", que " la brigade de gendarmerie assurera, dans le cadre de son service normal et en cas de besoin l'intervention d'une part, et une surveillance de l'épreuve d'autre part ", et qu'étaient " chargés de l'exécution, chacun en ce qui concerne, le maire de la Bréole, le capitaine commandant la compagnie de gendarmerie de Barcelonnette, le directeur département des services d'incendie et de secours, le direction départemental de la jeunesse et des sports " ; que, par ailleurs, il résulte de l'arrêté municipal du 24 juillet 1996 que " la circulation et le stationnement seront interdits le 15 août 1996 de 8 heures à 13 heures dans le village, la D 57 menant au lac, la route des Boys et les quartiers des Masses et de Paleiros " et que " le commandant de la brigade de gendarmerie de Lauzet sera chargé de l'exécution du présent arrêté " ; qu'enfin, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'accident est précisément survenu sur la " D 57 " que l'automobiliste avait emprunté après avoir franchi " l'intersection de la petite route du lieudit " les Boys " (p. 6) sans s'être arrêté malgré " la présence de deux pompiers (dont) l'un d'eux lui avait crié " attention il y a des vélos " (p. 6), mais qui ne lui avaient " pas interdit le passage " (p. 7) ;
qu'il résultait de l'ensemble de ce qui précède que l'accident ne serait pas survenu si les prescriptions du préfet et du maire avaient été exécutées par les agents placés sous leur seule autorité ; que, par suite, Armand X..., qui n'avait d'ailleurs pas autorité sur ces agents, n'avait commis aucune faute pénale ou civile en relation de causalité directe avec le dommage subi par la victime ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour déclarer Armand X..., président du club " Vélo Sprinter des Alpes ", coupable de blessures involontaires, l'arrêt attaqué relève qu'il a été autorisé par le préfet à organiser, sur des voies ouvertes à la circulation publique, une course cycliste, " sous son entière responsabilité " ; que les juges énoncent que la signalisation du circuit et l'interdiction de la circulation ont été défaillantes et que, en méconnaissance des prescriptions du Code de la route, aucune personne n'était chargée de signaler la priorité de passage des coureurs aux usagers de la route ; qu'ils ajoutent que le prévenu n'a pas respecté les mesures de sécurité nécessaires au bon développement de l'épreuve, comme l'a démontré l'accident survenu à l'un des cyclistes entré en collision avec un véhicule auquel le passage n'a pas été interdit ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Mistral conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Lucas ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;