AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société de caution mutuelle des professions immobilières et foncières (SOCAF), dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 novembre 1996 par la cour d'appel de Paris (23e chambre civile, section A), au profit :
1 / du syndicat des copropriétaires du ..., représenté par son syndic, la société Cabinet Desnoyers, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / de M. Jean-Pierre X..., demeurant ...,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 janvier 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Badi, conseiller rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Badi, conseiller, les observations de la SCP Le Griel, avocat de la Société de caution mutuelle des professions immobilières et foncières, de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. X..., de Me Choucroy, avocat du syndicat des copropriétaires du ... (18e), les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 1996), que la société OTAGI (le syndic), exerçant une activité de gestion immobilière, bénéficiait auprès de la société de Caution mutuelle des professions immobilières et foncières (la SOCAF) de la garantie financière prévue à l'article 3, alinéa 2.2 de la loi du 2 janvier 1970 ; que le syndic, mis en liquidation judiciaire le 13 octobre 1986, n'ayant pu représenter des fonds qu'il détenait pour le compte du syndicat des copropriétaires du ..., celui-ci a assigné la SOCAF en paiement d'une certaine somme ;
Attendu que la SOCAF fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la copropriété la somme de 348 860,54 francs correspondant au montant d'un prêt non représenté par le syndic, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les règles spécifiques qui gouvernent l'extinction de la garantie financière prévue par l'article 3, alinéa 2, de la loi du 2 janvier 1970 ne privent pas le garant, tenu dans les termes du droit commun du cautionnement, de la possibilité d'opposer au créancier, conformément à l'article 2036 du Code civil, l'exception inhérente à la dette que constitue l'extinction de la créance par application de l'article 53, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 et que la cour d'appel a ainsi violé, par refus d'application, les deux textes précités ; alors, d'autre part, qu'en vertu de l'article 66 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits litigieux, les créanciers disposaient d'un délai de quinze jours, à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC, pour déclarer leurs créances et qu'en ne précisant pas, comme elle y était pourtant invitée par les conclusions d'appel, la date de publication du jugement d'ouverture au BODACC, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte précité ainsi que de l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, enfin, que si la caution a elle-même déclaré la créance, dans l'éventualité d'une action récursoire contre le débiteur et avant même d'avoir payé, comme l'article 2032 du Code civil lui en donne la possibilité, l'effet extinctif du défaut de déclaration par le créancier la libère néanmoins, le créancier ne pouvant, pour remédier à sa propre carence, retourner contre la caution, en le détournant de sa finalité, un texte destiné à faciliter l'exercice de son action récursoire et que la cour d'appel a ainsi violé les articles 2032 et 2036 du Code civil ainsi que l'article 53, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu qu'en raison de son autonomie, la garantie financière exigée des personnes exerçant des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et affectée au remboursement des fonds, effets ou valeurs qu'elles ont reçus, n'est pas éteinte lorsqu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'agent immobilier, le client ne déclare pas au passif sa créance de restitution de la somme versée ; que l'arrêt ayant retenu que la garantie imposée par l'article 3 de la loi du 2 janvier 1970 ne cessait que pour les causes énumérées par les articles 44 et suivants du décret du 20 juillet 1972, la cour d'appel, qui n'avait pas à faire application des textes invoqués aux deuxième et troisième branches du moyen, en a exactement déduit que la garantie de la SOCAF ne cessait pas lorsque le créancier omettait de déclarer sa créance au passif de la liquidation jduciaire du syndic ; que le moyen est mal fondé en sa première branche et inopérant pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société de caution mutuelle des professions immobilières et foncières aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Société de caution mutuelle des professions immobilières et foncières à payer à M. X... la somme de 10 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille.