La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/02/2000 | FRANCE | N°98-85850

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 février 2000, 98-85850


CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sur les pourvois formés par :
- X... Jean-Bernard, Y... Vincent, Z... Thierry,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 1er septembre 1998, qui, pour infractions à la législation sur l'élevage, a condamné le premier à 1 350 amendes de 100 francs chacune et une amende de 3 000 francs, le deuxième à 209 amendes de 100 francs chacune et une amende de 1 500 francs, le troisième à 3 150 amendes de 50 francs chacune et une amende de 1 000 francs, a ordonné une mesure de publication et a pronon

cé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en ra...

CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sur les pourvois formés par :
- X... Jean-Bernard, Y... Vincent, Z... Thierry,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 1er septembre 1998, qui, pour infractions à la législation sur l'élevage, a condamné le premier à 1 350 amendes de 100 francs chacune et une amende de 3 000 francs, le deuxième à 209 amendes de 100 francs chacune et une amende de 1 500 francs, le troisième à 3 150 amendes de 50 francs chacune et une amende de 1 000 francs, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande, en défense et en réplique ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Jean-Bernard X... et Vincent Y..., vétérinaires associés d'exercice libéral, ainsi que Thierry Z..., exploitant agricole, ont été poursuivis pour avoir, au cours des années 1994 à 1996, procédé à l'insémination artificielle de bovins, d'une part dans la zone d'exclusivité, délimitée par arrêté ministériel, du centre d'insémination exploité par la société coopérative Jura Bétail, d'autre part sans être titulaire de la licence d'inséminateur ou de chef de centre d'insémination, délits prévus par les articles 8 et 9 de la loi du 28 décembre 1966 sur l'élevage, devenus les articles L. 671-10 et L. 671-11 du Code rural ; qu'ils sont en outre poursuivis pour avoir contrevenu aux dispositions du décret du 22 mars 1969 relatif à la monte publique, en ayant fait usage de semence non autorisée ou agréée ; qu'ils ont été déclarés coupables des infractions commises après le 18 mai 1995, l'action publique étant éteinte par amnistie pour les faits antérieurs ;
En cet état :
Sur le septième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y..., pris de la violation de l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que l'arrêt attaqué, qui a condamné le docteur X..., membre de la SCP de vétérinaires X... et Y..., pour inséminations artificielles illicites de bovins en 1994, 1995 et 1996, d'avoir été rendu notamment par M. Michel Polanchet, conseiller ;
" alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; que cette exigence doit s'apprécier objectivement ; que M. le conseiller Polanchet avait présidé la chambre régionale de discipline du conseil régional de discipline de l'Ordre des vétérinaires qui, par une décision du 5 décembre 1995, statuant sur les mêmes faits d'inséminations artificielles illicites de bovins commis antérieurement au 18 mai 1995, avait décidé que ces faits étaient " constants " et " susceptibles de donner lieu à une sanction disciplinaire " sauf à les déclarer amnistiés, portant ainsi une appréciation sur ces faits défavorable au docteur X... de nature à faire douter de l'impartialité objective du président de la juridiction disciplinaire, appelé ensuite à connaître, comme membre de la juridiction pénale, des mêmes faits qui s'étaient poursuivis au-delà du 18 mai 1995 " ;
Attendu que Jean-Bernard X... a fait l'objet de poursuites disciplinaires à raison d'inséminations artificielles illicites de bovins ; que la chambre de discipline du conseil régional de l'Ordre des vétérinaires a, par décision du 5 décembre 1995, constaté que les faits reprochés, constitutifs de fautes passibles de sanctions disciplinaires, étaient amnistiés ;
Attendu que la circonstance que le président de cette instance disciplinaire, conseiller à la cour d'appel, ait, par la suite, siégé dans la formation de jugement ayant prononcé sur les poursuites pénales exercées contre le même vétérinaire n'est pas contraire à l'exigence d'impartialité énoncée par l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors que la juridiction correctionnelle a statué sur des faits distincts, par leur date, quoique de même nature ;
Que le moyen doit, dès lors, être écarté ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Thierry Z... :
(sans intérêt) ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y... : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y... : (sans intérêt) ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y... : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y... : (sans intérêt) ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y... : (sans intérêt) ;
Mais sur le sixième moyen de cassation proposé pour Jean-Bernard X... et Vincent Y..., pris de la violation des articles 6 et 7 du décret n° 69-257 du 22 mars 1969, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt a condamné Jean-Bernard X... et Vincent Y... du chef d'utilisation de semences de taureaux non agréés, le premier à 1 350 amendes de 100 francs, le second à 209 amendes de 100 francs ;
" aux motifs propres que le docteur X... avait reconnu avoir procédé à 500 ou 600 inséminations par an avec des paillettes provenant du centre de la Crespelle et du centre de Montbéliarde-Sélection ; que le docteur Y... avait admis avoir inséminé avec des paillettes fournies par le docteur X... ;
" et, aux motifs adoptés des premiers juges, qu'ils avaient reconnu, lors de leur audition et dans une lettre adressée le 13 janvier 1997 à la juridiction correctionnelle, avoir fait usage à 99 % des semences du centre la Crespelle et à 1 % de celui de Montbéliarde-Sélection ;
" alors qu'en ayant retenu 1 350 contraventions à la charge de Jean-Bernard X... et 209 à la charge de Vincent Y... sans s'expliquer sur les nombres d'infractions commises, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour Thierry Z..., pris de la violation des articles 6 et 7 du décret n° 69-257 du 22 mars 1969, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné Thierry Z..., du chef d'utilisation de semences de taureaux non agréés, à 3 150 amendes de 100 francs ;
" aux motifs propres que Thierry Z... a spontanément mentionné qu'il se fournissait auprès du centre pirate de Montbéliarde et réclamait environ 250 francs et percevait 100 francs pour chaque acte ;
" aux motifs adoptés que Thierry Z... indique qu'il vend environ 1 400 doses de semences provenant du centre pirate Montbéliarde-Sélection par an ;
" alors qu'en ayant retenu 3 150 contraventions à la charge de Thierry Z... sans s'expliquer sur le nombre d'infractions commises, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier sa décision ; que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'en condamnant respectivement Jean-Bernard X..., Vincent Y... et Thierry Z... à 1350, 209 et 3150 amendes, pour avoir fait usage de semence provenant de troupeaux non autorisés ou agréés, sans s'expliquer sur le nombre des contraventions à l'article 6 du décret du 22 mars 1969 sur la monte publique commises par les prévenus, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Sur le moyen relevé d'office, pris de la violation de l'article 111-3 du Code pénal :
Vu ledit article ;
Attendu que nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ;
Attendu qu'après avoir déclaré les prévenus coupables des délits d'insémination artificielle illicite, l'arrêt attaqué les condamne notamment à une mesure de publication ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi une peine complémentaire non prévue par les articles 8 et 9 de la loi du 28 décembre 1966, réprimant à la date des faits les délits reprochés, la cour d'appel a méconnu les texte et principe ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est à nouveau encourue ; qu'elle aura lieu par voie de retranchement et sans renvoi de ce chef ;
Et attendu que, la peine correctionnelle prononcée à titre principal contre Thierry Z... étant justifiée par la déclaration de culpabilité du chef d'insémination sans licence, non contestée par ce demandeur, et les dispositions civiles de l'arrêt n'étant pas remises en cause par le pourvoi, il n'y a pas lieu d'examiner son deuxième moyen, qui discute le délit d'insémination dans la zone d'exclusivité de la société coopérative Jura Bétail ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 1er septembre 1998, en ses seules dispositions relatives aux peines de police et, par voie de retranchement, en ce qu'il a condamné les demandeurs à une mesure de publication, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit jugé conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée sur les amendes de police ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-85850
Date de la décision : 01/02/2000
Sens de l'arrêt : Cassation partielle par voie de retranchement
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6.1 - Tribunal indépendant et impartial - Juridictions correctionnelles - Composition - Cour d'appel - Magistrat ayant connu de poursuites disciplinaires contre la même personne - Faits distincts.

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Composition - Incompatibilités - Cour d'appel - Magistrat ayant connu de poursuites disciplinaires contre la même personne - Faits distincts

La circonstance qu'un conseiller à la cour d'appel, président de la chambre de discipline d'un conseil régional de l'Ordre des vétérinaires, ayant statué dans des poursuites disciplinaires exercées contre un vétérinaire, ait, par la suite, siégé dans la formation de jugement qui a prononcé sur les poursuites pénales exercées contre le même vétérinaire n'est pas contraire à l'exigence d'impartialité énoncée à l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors que la juridiction correctionnelle a statué sur des faits distincts, par leur date, quoique de même nature. (1)(1).


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6.1

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon (chambre correctionnelle), 01 septembre 1998

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1994-03-15, Bulletin criminel 1994, n° 97 (1°), p. 214 (rejet). CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1999-11-24, Bulletin criminel 1999, n° 275, p. 862 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 fév. 2000, pourvoi n°98-85850, Bull. crim. criminel 2000 N° 48 p. 131
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 48 p. 131

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Ferrari.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Le Bret-Desaché et Laugier, la SCP Lesourd, M. Blanc.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.85850
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award