AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FERRARI, les observations de Me RICARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Yves,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 mars 1999, qui, pour infractions à la législation sur le démarchage à domicile, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans, 25 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-21, L. 121-23, L. 121-26 et L. 121-28 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yves X... coupable d'avoir, en tant que gérant de fait de la SARL France Télévision Satellite, effectué ou fait effectuer des ventes et prestations de service par démarchage à domicile, en demandant et obtenant une contrepartie ou un engagement avant la fin du délai de réflexion, en exécutant la prestation de service avant l'expiration du délai légal et en faisant signer des contrats non conformes, et l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans avec interdiction de se livrer à l'activité professionnelle de vente par démarchage à domicile et de vente à crédit et à une amende de 25 000 francs ;
"aux motifs qu'en des énonciations suffisantes et par des motifs qui ont répondu aux moyens soulevés par le prévenu et qu'il y a lieu d'adopter, les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de la cause en retenant Yves X... dans les liens de la prévention ; que de surcroît, il y a lieu d'observer que lesdits démarcheurs ont utilisé les bons de commandes qui leur ont été fournis par le prévenu et ont observé ses prescriptions, ce dernier ayant d'ailleurs justifié, lors de l'enquête, la pratique de la signature par le client d'une autorisation de prélèvement automatique lors de la signature de l'offre préalable de crédit ; que les infractions reprochées au prévenu sont caractérisées et le jugement déféré sera confirmé sur la qualification des faits et sur la déclaration de culpabilité (cf. arrêt p. 9)
"et aux motifs adoptés des premiers juges que par ailleurs l'examen des dossiers annexés au procès-verbal établi par les agents de la DGCCRF permet de relever que, pour la totalité des clients ayant signé un contrat de crédit, une autorisation de prélèvement automatique sur le compte bancaire des intéressés était signée le jour même de la signature du bon de commande ; cela confirme les déclarations faites par Yves X... lui-même et concerne notamment les clients suivants : Goubelle, Denis, Guibert, Dourthe, Fuseau, Brunet, Petit, Rassat, Lafaysse, Valero, Hirtzig, Carcelen, Depré,
D'Hoodge, Coiffard, Lapebie, Uharriet, Mendy, Renouleaud et Fayemendy ;
"à cet égard l'argument du prévenu selon lequel le premier prélèvement n'interviendrait en aucun cas avant le délai de rétractation est inopérant ; il est clair, en effet, que la signature apposée sur un imprimé autorisant un prélèvement automatique sur un compte bancaire constitue bien un engagement au sens de l'article L. 121-26 du Code de la consommation de la part du client démarché ; cet engagement est plein et entier dès le jour de la signature et il importe peu de savoir à quel moment il sera mis à exécution" (cf. jugement p. 8)
"alors que l'autorisation de prélèvement automatique sur un compte bancaire a un caractère accessoire et suit le sort du contrat principal ; que, tant que le contrat principal est susceptible d'être dénoncé, l'autorisation de prélèvement ne peut constituer un engagement ou une contrepartie susceptible d'altérer la liberté de décision du consommateur, en méconnaissance du délai de réflexion qui lui est laissé ; qu'en reprochant au prévenu d'avoir demandé et obtenu une contrepartie ou un engagement avant la fin du délai de réflexion sous forme d'une autorisation de prélèvement automatique, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour déclarer Yves X... coupable d'infractions aux dispositions des articles L. 121-23 et suivants du Code de la consommation, l'arrêt attaqué énonce que la société qu'il dirige a vendu, par démarchage à domicile, des antennes paraboliques en utilisant des contrats ne comportant pas les conditions d'exécution de la vente, les modalités de paiement à crédit ni la désignation précise des biens offerts ou services proposés ; que la société a fait procéder à l'installation des antennes avant l'expiration du délai légal de rétractation et que les démarcheurs ont, le jour de la commande, exigé des acheteurs à crédit la signature d'une autorisation de prélèvement bancaire automatique ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen ;
Qu'en effet, une autorisation de prélèvement bancaire, même si elle peut être révoquée par le signataire, doit être considérée, quelle que soit la suite donnée par les parties au contrat qui lui a servi de fondement, comme une contrepartie, au sens de l'article L. 121-26 du Code de la consommation ;
Que le moyen ne saurait, dès lors, être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 121-28 du Code de la consommation, de l'article 111-2 du Code pénal et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Yves X... à la peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans avec interdiction de se livrer à l'activité professionnelle de vente par démarchage à domicile et de vente à crédit et à une amende de 25 000 francs ;
"aux motifs que, quant aux peines prononcées par le tribunal, elles ne sont nullement excessives mais au contraire adaptées à la nature des faits commis et à la personnalité du prévenu et elles seront également confirmées (cf. arrêt p. 9) ;
"alors que la sanction pénale d'une infraction aux dispositions des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 est une peine d'emprisonnement d'un an et une amende de 25 000 francs ou l'une de ces deux peines seulement ; qu'en condamnant, dès lors, Yves X... à une mise à l'épreuve pendant trois ans avec interdiction de se livrer à l'activité professionnelle de vente par démarchage à domicile et de vente à crédit, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'après avoir déclaré le prévenu coupable d'infractions à législation sur le démarchage à domicile, l'arrêt le condamne à 25 000 francs d'amende et quatre mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve comportant l'obligation de ne pas se livrer à l'activité professionnelle de vente par démarchage à domicile et de vente à crédit ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des articles L. 121-28 du Code de la consommation et 132-45 du Code pénal ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Roman conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Ferrari conseiller rapporteur, M. Grapinet conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;