AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MISTRAL, les observations de Me de NERVO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Victorien,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4ème chambre, en date du 23 février 1999, qui, pour délit de violences, l'a condamné à 2 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 591 à 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Victorien X..., prévenu, seul et unique responsable de l'entier préjudice subi par René Y... ;
" aux motifs, repris des premiers juges, que Victorien X... devait être déclaré entièrement responsable du préjudice subi par René Y... ;
" alors que la faute du prévenu n'exclut aucunement le partage de responsabilité avec la victime, lorsque celle-ci a elle-même eu un comportement fautif en relation avec le dommage ;
que, comme le soutenait à juste titre le prévenu dans ses conclusions devant la cour d'appel, les premiers juges avaient dûment constaté que la victime des coups et blessures, Victorien X..., s'était rendue au domicile du prévenu et avait pris l'initiative de la querelle en lui donnant une gifle et en lui reprochant de façon véhémente un prétendu adultère vieux de plus de trente ans ; que la cour d'appel devait donc nécessairement s'interroger sur la participation fautive de la victime à son propre dommage, ce qu'elle n'a pas fait " ;
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ;
Attendu, qu'après avoir déclaré Victorien X... coupable du délit de violences, l'arrêt attaqué énonce qu'il y a lieu de le déclarer entièrement responsable du préjudice subi par la victime ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme le sollicitait le prévenu dans ses conclusions, si la victime n'avait pas contribué, par sa faute, à la réalisation du dommage, ce qui était de nature à entraîner un partage de responsabilité, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de DOUAI, en date du 23 février 1999, mais seulement en ce qu'il a statué sur l'action civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'AMIENS, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de DOUAI, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Roman conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Mistral conseiller rapporteur, M. Grapinet conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;