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02/12/1999 | FRANCE | N°98-13108

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 décembre 1999, 98-13108


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par l'association La Ligue pour l'Adaptation du Diminué Physique au Travail (LADAPT), dont le siège est Centre de Réadaptation de Verneville, Château de Verneville, 57130 Ars-sur-Moselle,

en cassation de deux arrêts rendus les 21 mars 1996 et 29 janvier 1998 par la cour d'appel de Metz (chambre civile), au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Metz, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse i

nvoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par l'association La Ligue pour l'Adaptation du Diminué Physique au Travail (LADAPT), dont le siège est Centre de Réadaptation de Verneville, Château de Verneville, 57130 Ars-sur-Moselle,

en cassation de deux arrêts rendus les 21 mars 1996 et 29 janvier 1998 par la cour d'appel de Metz (chambre civile), au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Metz, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 21 octobre 1999, où étaient présents : M. Gougé, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Dupuis, conseiller rapporteur, MM. Ollier, Thavaud, Mmes Ramoff, Duvernier, conseillers, MM. Petit, Liffran, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Dupuis, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de l'association LADAPT, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de La Varde, avocat de la Caisse primaire d'assurance maladie de Metz, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu qu'il résulte des énonciations des juges du fond que l'association "Ligue pour l'Adaptation du Diminué Physique au Travail" (LADAPT) qui gère à Verneville (Moselle) un établissement habilité pour une activité d'hospitalisation complète, accueillant également des patients en hospitalisation de jour, s'est vu interdire par le Préfet de Région d'exercer cette seconde activité à compter du 13 juillet 1993, mais l'a poursuivie, et n'y a été autorisée que le 9 décembre 1994 ; que la Caisse primaire d'assurance maladie qui a payé les dotations globales a assigné l'association en remboursement des sommes correspondantes aux hospitalisations non autorisées ; que sur contredit de l'association, la cour d'appel (Metz, 21 mars 1996) a déclaré les tribunaux civils compétents et évoqué l'affaire ; que le second arrêt attaqué (29 janvier 1998) a accueilli la demande de la caisse ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'association LADAPT fait grief à l'arrêt du 21 mars 1996 d'avoir déclaré compétents les tribunaux civils pour trancher le litige, alors, selon le moyen, que le tribunal des affaires de sécurité sociale est seul compétent pour connaître des litiges auxquels donne lieu l'application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité agricole, et qui ne relèvent pas, par leur nature, d'un autre contentieux ; qu'en l'espèce, la Caisse primaire d'assurance maladie contestait pour partie l'existence de son obligation au paiement de la dotation fixée par l'article L. 174-1 du Code de la sécurité sociale et versée par les caisses primaires d'assurance maladie aux établissements hospitaliers par application de l'article L. 174-2 du même Code, de sorte qu'en décidant qu'une telle contestation relevait de la compétence des juridictions civiles, la cour d'appel a violé les articles L. 142-1, alinéa 2 et L. 142-2 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 89 du nouveau Code de procédure civile que lorsque la cour d'appel est juridiction d'appel des deux juridictions dont la compétence est en cause, elle peut évoquer le fond après avoir désigné la juridiction qu'elle estime compétente ; d'où il suit qu'est inopérant le moyen tiré de l'incompétence d'une des deux juridictions en cause dès lors que la cour d'appel est également juridiction d'appel de la juridiction dont la compétence est revendiquée ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'association LADAPT fait grief à l'arrêt du 29 janvier 1998 d'avoir accueilli la demande de la caisse primaire d'assurance maladie, alors, selon le moyen, que la cassation entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution de la décision cassée ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, par application de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile, la cassation de l'arrêt du 21 mars 1996 ayant retenu la compétence des juridictions civiles de droit commun entraînera, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêt du 29 janvier 1998 tenant pour acquise une telle compétence ;

Mais attendu que le pourvoi ayant été rejeté en ce qu'il a été formé contre l'arrêt du 21 mars 1996 prononcé sur la compétence, le moyen manque par suite de la défaillance de la condition qui lui sert de base ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que l'association LADAPT fait encore grief à l'arrêt du 29 janvier 1998 d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen, qu'à l'instar des décisions prises par le Préfet de la Moselle pour les années 1993 et 1994, l'arrêté préfectoral n° 94-1264 du 28 décembre 1994 portant fixation de la dotation globale et des tarifs de prestations du Centre de réadaptation et de rééducation fonctionnelle à Verneville pour l'année 1995 se borne à faire mention du tarif applicable pour l'hospitalisation complète, sans faire état d'un tarif applicable à l'hospitalisation partielle, pourtant autorisée à compter du 9 décembre 1994 ; que pour décider que la DDASS n'avait aucunement entendu autoriser ou approuver expressément ou tacitement l'association LADAPT à exercer l'activité d'hospitalisation partielle entre le 13 juillet 1993 et le 8 décembre 1994, la cour d'appel s'est déterminée par la circonstance que les arrêtés préfectoraux pris pour fixer la dotation globale annuelle des années 1993 et 1994 n'envisageaient que l'hospitalisation complète sans faire mention d'un tarif applicable à l'hospitalisation partielle, contrairement à celui relatif à l'année 1995, où le centre a pu régulièrement fonctionner en régime d'hospitalisation partielle de jour ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé les mentions de l'arrêté préfectoral n° 94-1264 du 28 décembre 1994 portant fixation de la dotation globale et des tarifs de prestations du Centre de réadaptation et de rééducation fonctionnelle à Verneville pour l'année 1995, et violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de la procédure que pour retenir que la dotation globale de l'année 1995 a visé non seulement l'hospitalisation complète, mais aussi l'hospitalisation de jour, la cour d'appel s'est référée non pas à l'arrêté du 28 décembre 1994, mais à celui du 29 décembre 1995 qui l'a modifié ; d'où il suit que le grief de dénaturation n'est pas fondé ;

Sur les quatrième et cinquième moyens :

Attendu que l'association LADAPT fait encore grief à l'arrêt du 29 janvier 1998 d'avoir statué ainsi, alors, selon les moyens, d'une part, que lorsqu'une décision définitive n'a pas été contestée dans les délais prescrits, elle ne peut être remise en question sur le fondement de la répétition de l'indu ; que la décision fixant la dotation globale des établissements sanitaires peut être contestée par les organismes de sécurité sociale devant la Commission interrégionale de la tarification sanitaire et sociale, dans un délai d'un mois à l'issue duquel la décision non contestée est définitive ; qu'en l'espèce, quelles qu'aient été les mentions des arrêtés préfectoraux fixant la dotation globale, il appartenait à la Caisse de contester ces décisions, si les sommes ainsi allouées étaient de nature à excéder les besoins de l'établissement géré par l'association, en ce qui concerne l'hospitalisation complète, seule activité autorisée ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer qu'il n'appartenait pas à la Caisse de remettre en cause la dotation globale allouée dès lors que les arrêtés préfectoraux ne faisaient mention que d'un tarif en hospitalisation complète, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de l'association, si en s'abstenant de former un recours en temps utile contre les décisions fixant la dotation globale, la Caisse n'avait pas acquiescé à ces décisions devenues définitives et si, partant, la Caisse n'était pas mal fondée à agir sur le fondement de la répétition de l'indu pour solliciter la restitution des sommes excédant la part du budget relative à l'hospitalisation complète, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l'article 201 du Code de la famille et de l'aide sociale ; alors, d'autre part, que ne saurait donner lieu à répétition, faute d'être indu, le paiement opéré conformément à l'objet et au quantum de la dette ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que les sommes versées en exécution des arrêtés fixant le montant de la dotation globale pour 1993 et 1994 ne devaient couvrir que les frais afférents à l'hospitalisation complète ; qu'ainsi, en énonçant que pour partie, ces sommes auraient été utilisées pour couvrir l'activité d'hospitalisation de jour, non autorisée, pour en déduire qu'il convenait d'ordonner le remboursement de ces sommes sur le fondement de la répétition de l'indu, sans rechercher si, au titre de l'hospitalisation complète, seule activité autorisée, l'association aurait encaissé à tort des sommes qui ne lui étaient pas destinées, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard des articles 1235 et 1376 du Code civil ; alors, en outre, que la dotation globale mentionnée à l'article L. 174-1 du Code de la sécurité sociale représente la part des dépenses obligatoirement prises en charge par les régimes d'assurance maladie, et qu'en cas de modification de l'activité médicale impliquant la révision du montant de la dotation globale et s'il n'a pas été possible de procéder en temps utile à cette révision, la charge indûment supportée par la dotation globale est prise en compte pour la fixation du montant de la dotation globale de l'exercice suivant ; qu'ainsi, les sommes indûment affectées à une activité non autorisée

ne peuvent donner lieu à une action en répétition de l'indu ; que, dès lors, en estimant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1376 du Code civil par fausse application, ainsi que les articles R. 714-3-26 et R. 714-3-37 du Code de la santé publique par refus d'application ; alors, enfin, que dans ses conclusions d'appel, l'association avait expressément fait valoir que, dans l'hypothèse où l'activité de l'établissement de santé était modifiée, l'organisme social avait seulement la faculté de solliciter une décision modificative, en plus ou en moins, et non d'agir en restitution des sommes irrégulièrement affectées, sur le fondement de la répétition de l'indu ; qu'ainsi, en estimant toutefois que les conditions de la répétition de l'indu étaient réunies sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions d'appel de l'association LADAPT, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, selon le cinquième moyen, qu'indépendamment du comportement du bénéficiaire du paiement indu, commet une faute susceptible à tout le moins de diminuer le montant des restitutions la caisse de sécurité sociale qui, pendant deux années et quoique consciente de l'interdiction faite à un établissement de soins de pratiquer l'hospitalisation de jour, alloue à ce dernier une dotation globale d'un montant couvrant les frais de cette activité, s'abstient de remettre en cause dans les formes et les modalités de l'article 201 du Code de la famille et de l'aide sociale les décisions fixant la dotation globale, ne prend aucune mesure en cours d'exercice pour solliciter sur le fondement de l'article R. 714-3-7 du Code de la santé publique des décisions modificatives permettant d'adapter la dotation à la prise en charge de la seule activité autorisée, et omet délibérément, sur le fondement de l'article R. 714-3-37 du Code de la santé publique, de tenir compte de la charge indûment supportée par la dotation globale pour la détermination de celle de l'exercice suivant ; qu'en l'espèce, il résulte des propres mentions de l'arrêt attaqué que, dès le 13 juillet 1993, le Préfet de Région faisant savoir à l'association que sa demande d'autorisation pour l'exercice de l'hospitalisation de jour était irrecevable, et que la situation n'a été régularisée que le 9 décembre 1994, tandis qu'entre temps la dotation globale allouée au Centre de Verneville pour les exercices 1993 puis 1994 n'a nullement été amputée de la part correspondant à cette activité et que l'organisme social n'a entrepris aucune démarche permettant de réviser le budget ainsi alloué ; que dès lors, en énonçant lapidairement qu'aucun élément de fait ou de droit ne justifiait une modération de la restitution, au seul motif que l'association LADAPT n'aurait pu se méprendre sur les limites sciemment outrepassées de son activité hospitalière entre le 13 juillet 1993 et le 8 décembre 1994, la cour d'appel a violé les textes précités par refus d'application et l'article 1376 du Code civil par fausse application ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que pour les années 1993 et 1994 les dotations globales de l'établissement, payées par la Caisse primaire d'assurance maladie, n'ont visé que l'hospitalisation complète, et que selon une lettre du 22 septembre 1993 adressée par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, elles ont maintenu la part des crédits antérieurement conservés à l'hospitalisation de jour dans le seul but de permettre le fonctionnement de l'établissement et de préparer sa reconversion, la cour d'appel a retenu à bon droit qu'il n'appartenait pas à la Caisse de remettre en cause les dotations globales fixées par arrêtés préfectoraux, et qu'il ne pouvait pas être déduit de son silence une quelconque approbation de l'activité illicite d'hospitalisation de jour exercée par l'association du 13 juillet 1993 au 8 décembre 1994 ; qu'elle en a exactement déduit que l'association avait sciemment reçu des sommes indues, et que les conditions de la répétition de l'indu étaient réunies ;

Et attendu que l'activité de l'établissement n'ayant été régulièrement modifiée qu'à compter du 9 décembre 1994, et aucune décision modificative du tarif des prestations et du montant de la dotation globale ne pouvant être sollicitée par la Caisse, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à un grief inopérant, a exactement décidé que la Caisse n'avait commis aucune faute de nature à justifier une modération des restitutions ordonnées ; d'où il suit que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association LADAPT aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'association LADAPT ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98-13108
Date de la décision : 02/12/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz (chambre civile) 1996-03-21 1998-01-29


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 déc. 1999, pourvoi n°98-13108


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOUGE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.13108
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