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16/11/1999 | FRANCE | N°97-14770

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 novembre 1999, 97-14770


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Villeroy Dal, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 février 1997 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), au profit de la société Sport France, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR,

composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Villeroy Dal, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 février 1997 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), au profit de la société Sport France, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 octobre 1999, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, M. Métivet, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Poullain, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Villeroy Dal et de M. X... et de Mme Y..., ès qualités, de la SCP Thomas-Raquin et Benabent, avocat de la société Sport France, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à M. Laurent X... et Mme Laurence Y... de leur reprise d'instance en qualité respectivement d'administrateur et de représentant des créanciers de la société Villeroy Dal ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 février 1997), que la société Sport France et la société Villeroy Dal conçoivent, fabriquent et vendent l'une et l'autre des équipements de sports et de loisirs ; que la société Sport France a mis au point un but "multisports", pouvant être utilisé pour le basket-ball, le handball et le football et l'a déposé comme modèle ; que la société Villeroy Dal ayant fabriqué et commercialisé des buts qu'elle estimait semblables à ce modèle, elle l'a assignée en contrefaçon et en concurrence déloyale ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Villeroy Dal reproche à l'arrêt d'avoir rejeté son exception de nullité du modèle de but multisport déposé par la société Sport France, et de l'avoir en conséquence condamnée du chef de contrefaçon et de concurrence parasitaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'idée même nouvelle n'est pas protégeable en soi ; que la juxtaposition du "cadre rectangulaire à trois côtés", et du "poteau coudé servant de but de basket-ball" n'était, selon les constatations de la cour d'appel elle-même, que le résultat de l'idée consistant à placer ensemble sur un terrain de sport ou de jeu les buts du jeu de handball et les buts du jeu de basket-ball, dont les caractéristiques résultent des règles de ces jeux eux-mêmes ; qu'en affirmant que le modèle se "caractérisait" par la combinaison de ces caractéristiques, c'est-à-dire par la seule idée de les placer ensemble, la cour d'appel a violé les articles L.-111-1, L. 511-1, L. 511-3 du Code de la propriété intellectuelle ; alors, d'autre part, que le modèle n'est protégeable comme oeuvre de l'esprit que s'il est indépendant des caractéristiques techniques de l'objet et des nécessités fonctionnelles de son usage ; que n'est pas susceptible de constituer un modèle protégeable la forme résultant uniquement de l'idée fonctionnelle de joindre deux buts de jeux dans l'objectif de jouer indifféremment à l'un ou à l'autre ; qu'en estimant que cette forme constituait un modèle protégeable, la cour d'appel a violé les articles précités ; et alors, enfin, que, l'idée de réunir en un seul ensemble deux buts correspondant à des jeux déterminés n'étant pas protégeable, et la liaison étant une conséquence technique nécessaire de cette idée, seule peut être protégeable à titre de modèle la forme utilisée par cette liaison si elle est suffisamment originale et indépendante des nécessités techniques ; que, en s'abstenant totalement de s'expliquer sur le fait, expressément souligné par la société Villeroy Dal, que le système de liaison choisi par elle (une simple barre verticale reliant les deux buts) était différent formellement du système de liaison du but Sport France (en forme de triangle avec trois barres de liaison), la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes précités ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant caractérisé le but dont le modèle a été déposé par la société Sport France comme étant la combinaison d'éléments dont il décrit la forme, l'arrêt retient qu'il présente, dans son ensemble, une configuration reconnaissable le distinguant d'autres modèles de ce type de but fabriqués avec des caractéristiques visuelles d'ensemble totalement différentes et, qu'il n'est pas prouvé que ses caractéristiques d'ensemble au regard desquelles son originalité doit être appréciée soient imposées par des nécessités fonctionnelles ; qu'ayant apprécié l'originalité du modèle en considérant la forme concrète qui le constitue et estimé, par une appréciation souveraine des preuves, qu'il n'était pas établi que son aspect d'ensemble fut commandé par des contraintes fonctionnelles, la cour d'appel a pu, abstraction faite de la référence à une "idée", statuer comme elle a fait ;

Attendu, en second lieu, qu'en retenant que son but multisport présente une "similitude d'ensemble" avec le modèle de la société Sport France, la cour d'appel a écarté comme inopérante la dissemblance d'un élément invoquée par la société Villeroy Dal ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

Sur le deuxième moven :

Attendu que la société Villeroy Dal fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée du chef de concurrence parasitaire, alors, selon le pourvoi, qu'il résulte de l'arrêt lui-même que les faits qualifiés par les juges du fond de parasitaires sont identiques aux faits de prétendue contrefaçon reprochés à la société Villeroy Dal à tort, faute de modèle protégeable ; que, faute de caractériser une faute distincte caractéristique d'une concurrence déloyale, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, outre le fait que le but de la société Villeroy Dal reproduisait l'aspect général et caractéristique du modèle de la société Sport France, que cette reproduction en constituait une copie servile, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Villeroy Dal reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le préjudice s'apprécie exclusivement dans la personne de la victime des agissements fautifs ; que, en déterminant le préjudice comme étant l'enrichissement de l'auteur de la faute, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

alors, d'autre part, que, faute de préjudice réellement subi par Sport France, ce qui résulte de ses constatations, la cour d'appel devait refuser de lui accorder des dommages-intérêts ; qu'elle a violé l'article 1382 du Code civil ; et alors, enfin, que la prétendue "perte d'une chance de développement", qui n'est nullement explicitée par l'arrêt attaqué, ne recouvre qu'un préjudice purement hypothétique ; que la cour d'appel a encore violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, qu'après avoir relevé que le but mis sur le marché par la société Villeroy Dal était la copie servile du modèle contrefait, l'arrêt retient que les fautes commises par cette société ont causé à la société Sport France la perte d'une chance de développement ; que par ce motif, qui n'est nullement hypothétique, la cour d'appel, abstraction faite de celui erroné mais surabondant visé à la première branche, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses trois branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Villeroy Dal, M. X... et Mme Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Sport France ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97-14770
Date de la décision : 16/11/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DESSINS ET MODELES - Contrefaçon - Comparaison - Originalité - Référence à une "idée".


Références :

Code de la propriété intellectuelle L111-1, L511-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (14e chambre), 14 février 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 nov. 1999, pourvoi n°97-14770


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.14770
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