AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Eliane X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 17 juin 1997 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), au profit de l'Association pour la réinsertion par le travail, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 octobre 1999, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ransac, Chagny, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-14-2 et L. 321-1 du Code du travail ;
Attendu que Mme X... qui avait été engagée par l'Association réinsertion par le travail comme animatrice de l'atelier confection à compter du 1er février 1991, a été licenciée le 30 avril 1992 pour le motif suivant : "insuffisance de marchés et de résultats" ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir notamment paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande, la cour d'appel, après avoir relevé qu'aux termes de la lettre de licenciement, il était invoqué par l'employeur une insuffisance de marchés et de résultats, a décidé que l'employeur avait satisfait à l'obligation d'énonciation des motifs tels que prescrits par l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;
Attendu, cependant, que, selon l'article L. 122-14-2 du Code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs de licenciement dans la lettre de licenciement ; qu'en application de l'article L. 321-1 du même Code, est un motif économique, le motif non inhérent à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification du contrat de travail consécutives à des difficultés économiques, des mutations technologiques ou une réorganisation de l'entreprise ; qu'il en résulte que la lettre de licenciement invoquant un motif économique doit mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ; que l'énoncé d'un motif imprécis équivaut à une absence de motifs ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le motif énoncé dans la lettre de licenciement qui ne mentionnait pas l'incidence de la cause économique sur l'emploi ne constituait pas l'énoncé du motif exigé par la loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 17 juin 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne l'Association pour la réinsertion par le travail aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.