AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Pierre,
- X... Mireille, épouse Z...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'ORLEANS, en date du 19 novembre 1998, qui, dans la procédure suivie contre Alain Y..., des chefs d'homicide involontaire et défaut de maîtrise, a déclaré irrecevable leur appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 6 , du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 18, 186 du Code de procédure pénale, 502 et 503 du même Code, 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'appel de l'ordonnance de non-lieu irrecevable car tardif ;
"aux motifs qu'il résulte de l'examen de l'ordonnance de non-lieu qu'au pied de celle-ci figurent les mentions suivant lesquelles copie de la présente ordonnance a été portée à la connaissance de Maître Denys Robiliard, avocat des parties civiles, et aux parties civiles par lettres recommandées le 3 juillet 1998, par le greffier avec la signature de ce dernier ; que dès lors, l'appel formé le 17 juillet 1998 de l'ordonnance régulièrement notifiée le 3 juillet 1998 a été effectué plus de dix jours après le délai prévu à l'article 186 du Code de procédure pénale, étant relevé que la preuve de la nature, de la date et des formes utilisées pour la notification résulte des mentions sus-décrites portées au dossier par le greffier sans qu'il y ait lieu, ainsi que suggéré dans le mémoire, d'ordonner à la Poste d'indiquer la date à laquelle la lettre recommandée de notification de l'ordonnance a été déposée" ;
"alors, d'une part, que, selon l'article 186 alinéa 4 du Code de procédure pénale, l'appel des parties peut être formé dans les dix jours qui suivent la notification de la signification de la décision ; qu'en l'espèce la mention figurant au pied de l'ordonnance de non-lieu et apposée par le greffier le 3 juillet 1998, selon laquelle copie de la présente ordonnance a été portée à la connaissance de Maître Denys Robiliard, avocat des parties civiles, et des parties civiles elles-mêmes par lettres recommandées, atteste de l'accomplissement de la formalité, mais ne permet pas de savoir la date exacte à laquelle copie de l'ordonnance a été expédiée aux parties civiles et à leur avocat par les services postaux, cette date d'envoi qui fait courir le délai d'appel pouvant fort bien ne pas coïncider, comme cela semble avoir été le cas en l'espèce, avec le départ des lettres recommandées portant signification du greffe, voire même avec la date de leur dépôt à la Poste ; que la chambre d'accusation aurait donc dû rechercher la date à laquelle la signification de l'ordonnance avait réellement été effectuée, nonobstant les mentions figurant au pied de l'ordonnance querellée ;
"alors, d'autre part, que le caractère effectif d'une voie de recours ne peut être assuré que si le délai imparti pour l'exercer ne commence à courir que du jour où l'intéressé en a été dûment averti ; qu'en laissant courir ce délai à une date, apposée par le greffier, comme étant celle de la remise par ce dernier à des services postaux, sans s'assurer de la date exacte à laquelle ce courrier a été effectivement envoyé par la Poste et reçu par les intéressés, la chambre d'accusation a violé les articles 6 et 13 de la Convention européenne et les droits de la défense" ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel, relevé par les époux Z... le 17 juillet 1998, de l'ordonnance du juge d'instruction rendue le 3 juillet 1998, la chambre d'accusation constate que cet appel a été formé après l'expiration du délai de dix jours suivant la notification faite aux parties civiles et à leur avocat dans les formes prescrites par l'article 183 du Code de procédure pénale par lettres recommandées envoyées le 3 juillet 1998 ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a fait l'exacte application de l'article 186, alinéa 4, du Code de procédure pénale sans méconnaître les dispositions des articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;