AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Didier,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LIMOGES, chambre correctionnelle, en date du 9 décembre 1998, qui, pour atteinte au secret professionnel, l'a condamné à 1 mois d'emprisonnement, ainsi qu'à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant 5 ans, a prononcé l'interdiction d'exercer son activité professionnelle pendant 5 ans et a statué sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 131-26, 226-13 et 226-31 du Code pénal, 26 de la loi n° 91-946 du 10 juillet 1991, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Didier Y... coupable du délit de violation du secret professionnel ;
"aux motifs qu'il est constant que Gilles Z... et subséquemment Thierry X... ont été informés de la surveillance téléphonique dont ils étaient l'objet et étaient en possession des coordonnées personnelles et professionnelles d'un employé de France Télécom qui, sans appartenir au personnel chargé de la mise en place des écoutes, travaillait à proximité de la salle d'interception ; que Didier Y... qui a malgré tout reconnu avoir été involontairement informé de l'existence des écoutes sur le Cantou ne peut valablement soutenir avoir donné ces coordonnées à Gilles Z... deux ans auparavant alors qu'il n'occupait le poste de technicien de maintenance répondant au n° 29.68.42 que depuis janvier 1995 ; que la matérialité des faits est ainsi suffisamment établie ; que Didier Y... avait dans le cadre de sa fonction eu connaissance d'une information dont le caractère secret était indéniable ; que sa révélation quelles qu'en soient les circonstances ou le mobile caractérise le délit d'atteinte au secret professionnel prévu et réprimé par l'article 226-13 du Code pénal ; que le jugement entrepris sera ainsi confirmé sur la culpabilité (arrêt, pages 4 et 5) ;
"alors qu'il résulte de la combinaison des articles 226-13 du Code pénal et 26 de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991, dans sa rédaction issue de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992, que seules les personnes concourant, dans les cas prévus par la loi, à l'exécution d'une décision d'interception de sécurité des correspondances émises par la voie des télécommunications, sont tenues de ne pas révéler l'existence de l'interception ; qu'en l'espèce, pour déclarer le demandeur coupable du délit de violation du secret professionnel, la cour d'appel a relevé que Didier Y... aurait révélé à Gilles Martin et Thierry X... l'existence de la surveillance téléphonique dont ils étaient l'objet dans le cadre d'une information pénale, et qu'ainsi il aurait, par sa fonction, eu connaissance d'une information dont le caractère secret était indéniable ; qu'en statuant ainsi, tout en énonçant que l'employé de France Télécom ayant divulgué ces informations travaillait à proximité de la salle d'interception, sans appartenir au personnel chargé de la mise en place des écoutes, ce dont il résulte que l'intéressé n'était pas dépositaire d'un secret au sens de l'article 226-13 du Code pénal, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé, par fausse application, les textes susvisés" ;
Attendu que, pour condamner Didier Y... du chef d'atteinte au secret professionnel, la cour d'appel se prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, après avoir souverainement constaté que le prévenu avait révélé le caractère secret d'une information dont il avait eu connaissance dans le cadre de sa fonction et dont il résulte qu'il en était le dépositaire au sens de l'article 226-13 du Code pénal, fondement des poursuites, l'arrêt attaqué n'encourt pas la censure ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Sassoust conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;