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26/10/1999 | FRANCE | N°98-86268

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 octobre 1999, 98-86268


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me CHOUCROY, et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de GOUTTES ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- B... Charles, en qualité d'héritier d'Angèle B...,

- X... Louise, épouse A...,

- A... Rose, épouse Y...,

parties

civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASTIA, en date du 23 septembre 1998, qui, après r...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me CHOUCROY, et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de GOUTTES ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- B... Charles, en qualité d'héritier d'Angèle B...,

- X... Louise, épouse A...,

- A... Rose, épouse Y...,

parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASTIA, en date du 23 septembre 1998, qui, après relaxe de Bartolo ALLASIA et de Vanny PAINELLI du chef de recel de vols, les a déboutés de leurs demandes ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire ampliatif produit, commun aux deux demandeurs et le mémoire en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 460 ancien du Code pénal, 321-1 du nouveau Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l arrêt infirmatif attaqué a relaxé les prévenus du chef de recel de vol d objets d art ;

" aux motifs qu au début du mois d octobre 1991, Louise et Rose A... étaient victimes d un cambriolage commis dans leur appartement de Bastia, au cours duquel étaient volés de nombreux objets et meubles de valeur, principalement une salle à manger dite " les blés " signée d Emile Z... ; qu en août 1992, Mme B... était à son tour victime d un vol de sept vases Gallé à Bastia ; que les recherches n ont pas permis d identifier les auteurs de ces vols ;

que les vases Gallé et la salle à manger ont été découverts au cours de perquisitions effectuées en Italie dans un appartement et dans une maison appartenant à Bartolo Allasia, l appartement étant au nom de sa compagne, Vanny Painelli ; que Bartolo Allasia, propriétaire d une maison en Corse et Vanny Painelli avaient été interpellés à Vignale en Haute Corse à la suite d un renseignement anonyme ; dans leur véhicule étaient découverts quatre des sièges de la salle à manger " les blés " qu ils venaient d acquérir auprès d un inconnu, qui les avait contactés en Italie et leur avait donné rendez-vous pour la livraison dans un parking ; que Bartolo Allasia a déclaré avoir acquis la salle à manger et les vases Gallé auprès d un antiquaire de Lucciana, depuis lors assassiné, M. C..., la transaction s étant faite sans facture et en liquide pour les sommes respectivement de 400 000 Frs et 300 000 Frs, transactions qui ont été niées par Mme C... qui participait à l activité professionnelle de son époux ; que Bartolo Allasia, industriel italien, qui semble disposer d une assise financière très étendue, collectionneur de meubles anciens et d objets d art qui ont été découverts en grande quantité dans ses différents domiciles, a contesté, ainsi que sa compagne, connaître l origine frauduleuse des mobiliers et vases signés Gallé ; qu il a pu justifier, dans le cadre d une procédure judiciaire ouverte en Italie, de l acquisition régulière des nombreux meubles et objets de grande valeur qu il possède ; que la valeur des meubles et vases de Gallé concernés par la présente procédure ont été chiffrés à des prix sensiblement différents par leurs propriétaires, l expert judiciaire et les prévenus se référant à des catalogues de ventes ou ventes d objets similaires ; qu au vu de ces éléments, la Cour considère que les faits de recel ne sont pas constitués à l encontre de Bartolo Allasia et de Vanny Painelli, lesquels seront donc relaxés ;

" alors, d une part, que le délit de recel suppose que le prévenu, par un moyen quelconque, bénéficie du produit d un crime ou d un délit et que celui-ci sache que la chose provient d une infraction ; qu en l espèce, la cour d appel n a pu, sans se contredire, constater, d un côté, que les prévenus ont été trouvés en possession des vases et d une salle à manger " Emile Z... " dérobés frauduleusement aux parties civiles, que, dans le véhicule des pré-venus, ont été découverts quatre des sièges de la salle à manger " les blés " qu ils venaient d acquérir auprès d un inconnu qui les avait contactés en Italie et leur avait donné rendez-vous pour la livraison dans un parking, que Bartolo Allasia a déclaré avoir acquis la salle à manger et les vases Gallé auprès d un antiquaire de Lucciana, depuis lors assassiné, la transaction s étant faite sans facture et en liquide alors que l épouse de l antiquaire a déclaré ignorer lesdites ventes, pourtant très importantes ; que pareilles circonstances établissent incontestablement les éléments tant matériel que moral de l infraction et, d un autre côté, relaxer les prévenus des fins de la poursuite en se fondant sur une contre-expertise officieuse produite par les prévenus ;

" alors, d autre part, que Louise et Rose A... faisaient valoir dans un chef péremptoire de leurs conclusions d appel laissées sans réponse que Bartolo Allasia n est pas simplement un amateur d art, mais un collectionneur et qu à ce titre, il est abonné à de nombreuses revues spécialisées, italiennes et françaises, et notamment la Gazette Drouot ; qu il a été établi qu à la suite du vol dont les demanderesses ont été victimes, une très large publicité concernant les meubles dérobés a été faite précisément dans la Gazette Drouot ; qu ainsi, en sa qualité de collectionneur abonné à cette revue, Bartolo Allasia ne pouvait ignorer l origine frauduleuse des meubles dont lui-même et Vanny Painelli étaient en possession ;

que les investigations effectuées ont permis d établir que la salle à manger n avait jamais été entreposée dans le magasin d antiquités des époux C..., que la vente avait été réalisée en liquide et sans facture et n était pas mentionnée dans le registre prévu à cet effet ; que toutes ces circonstances attestent de la volonté des prévenus de dissimuler le commerce de ces objets d art dont ils ne peuvent, dès lors, prétendre ignorer l origine frauduleuse " ;

Vu l article 593 du Code de procédure civile ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu il résulte de l arrêt attaqué que Bartolo Allasia et Vanny Painelli, collectionneurs d objets d art, ont été interpellés alors qu ils venaient d acquérir auprès d un inconnu, sur un parc de stationnement, des meubles dérobés aux parties civiles ; que les perquisitions effectuées à leurs différents domiciles, en Italie et en Corse, ont permis de retrouver d autres meubles et objets qu ils affirmaient avoir achetés, sans factures, à un antiquaire, et payés en espèces ; qu ils ont été poursuivis pour recel de vols et condamnés par les premiers juges ;

Attendu que, pour les renvoyer des fins de la poursuite et débouter les parties civiles de leurs demandes, les juges du second degré se bornent à retenir que BartoIo Allasia et Vanny PainelIi " ont pu justifier de l acquisition régulière de nombreux meubles et objets de grande valeur qu ils possèdent " et que les biens dérobés aux parties civiles ont fait l objet d évaluations différentes par l expert et les parties ;

Mais attendu qu en statuant ainsi, par des motifs inopérants, et sans s expliquer sur le caractère clandestin de l acquisition, par les prévenus, des objets volés, la cour d appel n a pas donné de base légale à sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE ET ANNULE l arrêt susvisé de la cour d appel de BASTIA, en date du 23 septembre 1998, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d appel de LYON, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d appel de BASTIA et sa mention en marge ou à la suite de l arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, Mme Mazars conseiller rapporteur, MM. Roman, Grapinet, Mistral, Blondet, Ruyssen, M. Le Corroller, Mme Koering-Joulin conseillers de la chambre, Mmes Ferrari, Agostini conseillers référendaires ;

Avocat général : M. de Gouttes ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-86268
Date de la décision : 26/10/1999
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de BASTIA, 23 septembre 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 oct. 1999, pourvoi n°98-86268


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.86268
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