AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... René,
contre le jugement du tribunal de police de CASTELSARRASIN, en date du 8 septembre 1998, qui, pour dépassement de la vitesse maximale autorisée, l a condamné à une amende de 900 francs ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Attendu que René X... a demandé l autorisation de comparaître devant la chambre criminelle avec l assistance d un avocat au barreau de Paris, ainsi que la communication, avant l audience, des réquisitions écrites du ministère public ; que, par ailleurs, il a entendu se voir confirmer "qu interdiction serait faite au ministère public d assister et/ou de participer à la délibération de la Cour de Cassation" ;
Attendu que, le demandeur ayant présenté ses critiques de la décision attaquée dans le mémoire personnel qu il a déposé, sa comparution personnelle devant la chambre criminelle n est pas nécessaire ;
Attendu que les demandes relatives aux réquisitions et à la présence du ministère public sont dépourvues d objet, dès lors que l avocat général, dont le rôle, devant la Cour de Cassation, n est pas de soutenir l accusation contre le prévenu mais de s assurer qu il a été jugé conformément à la loi, ne présente ses réquisitions qu oralement à l audience, avant les délibérations de la Cour, comme le prévoient les articles 602 et 603 du Code de procédure pénale ;
D où il suit que la requête ne saurait être accueillie ;
Sur le premier moyen de cassation, pris du défaut de conformité à la Convention européenne des droits de l homme, en ses articles 6.1, 6.2 et 6.3 d dégageant le principe supérieur dit de "l égalité des armes", des règles relatives au voies de recours visées à l article 546 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu en l absence d appel interjeté par le procureur général conformément à l article 546 dernier alinéa du Code de procédure pénale, le demandeur n est pas recevable à invoquer la violation du principe conventionnel du procès équitable ;
Qu ainsi le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 551 alinéa 2 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l homme ;
Attendu que, pour rejeter l exception soulevée par le prévenu, motif pris de la nullité de la citation pour défaut de mention d un texte spécifique fondant la poursuite, le jugement attaqué énonce que la citation à comparaître devant le tribunal de police reprend les éléments de l infraction et les textes répressifs qui ont été régulièrement publiés ;
Attendu qu en l état de ces énonciations, d où il se déduit, d une part, que le prévenu était suffisamment informé des faits et des textes servant de base à la prévention, d autre part, qu aucun grief ne résulte de l absence des textes spécifiques qu il allègue, le tribunal n a pas méconnu les dispositions légales et conventionnelles visées au moyen, lequel ne peut, dès lors, qu être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 549, alinéa 3 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l homme, manque de base légale, violation des droits de la défense, défaut de réponses à conclusions ;
Attendu que le tribunal a rejeté les exceptions relatives à la régularité de la publication de l arrêté municipal fixant les limites de l agglomération de Labastide Saint-Pierre, à la compatibilité de la loi du 10 juillet 1989 instituant le permis à points avec la Convention européenne des droits de l homme, à la légalité du décret du 23 novembre 1992 définissant sous les articles R.232 et R.232-1 du Code de la route, les contraventions d excès de vitesse ;
Attendu qu en cet état le jugement n encourt pas la censure ;
que, d une part, la poursuite contraventionnelle dirigée contre le prévenu est fondée, non sur le texte définissant les limites de l agglomération de Labastide Saint-Pierre mais sur la méconnaissance des dispositions spécifiques des articles R.10 et R.232 du Code de la route ; que, d autre part, aucune incompatibilité n existe entre la loi du 10 juillet 1989 instituant le permis à points et l article 6 de la Convention européenne des droits de l homme, chaque perte partielle de points, bien que s appliquant de plein droit et échappant à l appréciation des juridictions répressives, étant subordonnée à la reconnaissance de la culpabilité de l auteur de l infraction, soit par le juge pénal, après examen préalable de la cause par un tribunal indépendant et impartial, soit par la personne concernée elle-même, qui, en s acquittant d une amende forfaitaire, renonce à la garantie d un procès équitable ; qu enfin le décret du 23 novembre 1992, qui décrit de manière précise les deux infractions possibles et prévoit des pénalités différentes selon l importance du dépassement de la vitesse autorisée, n est pas contraire au principe de légalité des délits et des peines ;
D où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris du défaut de conformité à la Convention européenne des droits de l homme, en ses articles 6.1, 6.2 et 6.3 d dégageant le principe supérieur dit de "l égalité des armes", des règles de droit interne relatives à l administration de la preuve des infractions routières ;
Attendu que l article 537 du Code de procédure pénale, qui dispose que les contraventions sont prouvées, soit par procès-verbaux ou rapports, soit par témoins, n est pas incompatible avec le principe du procès équitable dès lors que le prévenu a la faculté de rapporter la preuve contraire ;
Qu ainsi le moyen n est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de l abrogation de la loi sur le permis à point du fait de l entrée en vigueur du nouveau code pénal ;
Attendu que le demandeur n est pas recevable à alléguer que la loi du 10 juillet 1989 instituant le permis à points serait abrogée, dès lors que la poursuite n était pas exercée sur le fondement de cette législation ;
D où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation de l article 1 du Code civil et du décret du 5 novembre 1870 ;
Attendu qu'il ne saurait être reproché à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception tirée de l absence de publication régulière des textes fondant la poursuite dès lors que l opposabilité des lois et décrets résulte, selon les articles 1er du Code civil et 2 du décret du 5 novembre 1870, de leur seule publication au Journal Officiel, en l espèce non contestée, et de l écoulement des délais fixés par le second de ces textes ;
Que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que le jugement est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;
Avocat général : Mme Commaret ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;