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14/09/1999 | FRANCE | N°99-81254

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 septembre 1999, 99-81254


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze septembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MISTRAL, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Denis, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de CAEN, en date du 3 février 1999, qui, dans l'information suivie

sur sa plainte contre personne non dénommée, pour faux témoignage, falsification d'i...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze septembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MISTRAL, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Denis, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de CAEN, en date du 3 février 1999, qui, dans l'information suivie sur sa plainte contre personne non dénommée, pour faux témoignage, falsification d'indices et délit de violences, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 6 , du Code de procédure pénale ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 192, 199, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu et dit n'y avoir lieu à suivre contre MM. B... et C... du chef de violences volontaires et de complicité de violences volontaires, falsification d'indices et faux témoignages ;

"aux motifs que la Cour était composée lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt :

- M. Salmon, président, rédacteur de l'arrêt,

- Mme Clouet, conseiller,

- Mme Beuve, conseiller,

magistrats désignés conformément aux dispositions de l'article 191 du Code de procédure pénale ; que le ministère public était représenté aux débats et au prononcé de l'arrêt par M. Y..., Mme Clerissi-Lamy, greffier ;

"alors que les mentions de l'arrêt ne font pas apparaître qu'il a été lu en présence de Mme Clerissi-Lamy, greffier, qui a signé la minute" ;

Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le greffier assistant la chambre d'accusation était Mme Clerissi-Lamy lors des débats et que la minute a été signée par elle ;

Qu'il se déduit de ces mentions que c'est le greffier ayant signé la minute qui a assisté au prononcé de l'arrêt ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-7, 222-11, 434-4, 434-13 du Code pénal, ensemble les articles 211, 213, 575, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu et dit n'y avoir lieu à suivre contre MM. B... et C... du chef de violences volontaires et de complicité de violences volontaires, falsification d'indices et faux témoignages ;

"aux motifs qu'il est constant que l'inspecteur B... a fait usage d'une bombe lacrymogène qu'il a dirigée vers Denis X..., puis qu'il a utilisé son revolver de dotation, à l'aide duquel il a tiré quatre coups de feu en direction du sol et des jambes de ce dernier ; qu'il ressort toutefois des investigations menées que Denis X..., qui a déjà été condamné antérieurement pour des violences volontaires sur la personne d'un agent de la force publique, et dont plusieurs témoins ont souligné l'impulsivité et l'aversion à l'égard des représentants de la loi, a manifestement un comportement agressif qui a conduit l'inspecteur B... à faire usage de sa bombe lacrymogène afin de se protéger de la menace de coups dont il était l'objet ; que de même, l'inspecteur B... s'est saisi de son arme de poing et a tiré en direction des membres inférieurs de Denis X... car celui-ci s'était saisi d'une cognée munie d'un manche de 86 cm de long, venait de briser la vitre de la portière du véhicule de police en blessant M. C... et avançait dans sa direction en menaçant de le frapper avec la hache ; que par ailleurs, si M. C... a reconnu qu'il avait fait tomber à terre Denis X... après l'emploi de la bombe lacrymogène et qu'il avait ensuite essayé de le "cravater" par deux fois, il a précisé que l'emploi de la force avait été nécessaire pour maîtriser Denis X... et, surtout, l'empêcher d'utiliser contre lui et l'inspecteur B... la hache dont il s'était muni ; que compte tenu de ces éléments, il convient de considérer, d'une part, que l'utilisation faite par M. B... de sa bombe lacrymogène puis de son arme de poing et l'usage de la force auquel M. C... a eu recours ont été commandés par la nécessité de leur légitime défense, d'autre part, que les moyens employés ont été proportionnés à la gravité de l'atteinte injustifiée de Denis X... qui s'était saisi d'une hache pour en menacer et en frapper les policiers ; que c'est dès lors à bon droit que le magistrat instructeur a décidé qu'il n'y avait pas lieu à suivre du chef des délits de violences volontaires et de complicité de violences volontaires reprochés à MM. B... et C..., conformément aux dispositions de l'article 122-5 du Code pénal ;

qu'il convient de constater que M. B... a été interrogé par les gendarmes, dans le cadre d'une enquête de flagrance, qu'à la suite de l'ouverture de l'information, il s'est constitué partie civile par lettre du 19 mai 1995, et a été entendu par le juge d'instruction, puis par le tribunal correctionnel et par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel, en qualité de partie civile ; que dès lors, l'infraction de faux témoignage prévue par l'article 434-13 du Code pénal, qui ne s'applique qu'à la personne appelée à témoigner sous serment devant une juridiction ou un officier de police judiciaire agissant en exécution d'une commission rogatoire, ne peut être constituée à l'encontre de M. B... ; que M. C..., qui ne s'est constitué partie civile que devant le tribunal correctionnel, a été interrogé par le juge d'instruction de Coutances en qualité de témoin, le 14 juin 1995, puis le 16 septembre 1996 ; qu'il a relaté les faits, pour l'essentiel, tels que la Cour les a exposés ci-dessus, n'a pas caché l'utilisation par M. B... de sa bombe lacrymogène et de son revolver et a fait état de plusieurs coups de feu tirés par son collègue "en direction" de Denis X..., sans exclure que plusieurs tirs aient pu l'atteindre ; qu'il a également fait état de l'agressivité de Denis X..., de l'usage d'une hache à l'aide de laquelle celui-ci a brisé la vitre du véhicule dans lequel il venait de monter et l'a blessé au bras gauche, affirmations qui ont été confirmées par l'existence des coupures concordantes relevées sur ses vêtements et son bras et l'analyse des traces de sang prélevées sur sa chemise qui a mis en évidence qu'il s'agissait bien de son sang ; qu'enfin, M. C... a précisé qu'il n'avait pas vu M. B... couper sa ceinture à l'aide d'un couteau, et a ajouté qu'à un moment donné, celui-ci était entré dans la maison de Denis Chesnay pour appeler les secours, de sorte qu'il n'avait pu voir ce qu'il avait éventuellement fait à ce moment là ; qu'il y a d'ailleurs lieu de souligner, sur ce point, que Denis X..., lors de la confrontation, a lui-même indiqué qu'il n'avait pas vu M. B... couper sa ceinture avec un couteau car la vue de la ceinture lui était cachée par la porte de la voiture derrière laquelle le policier se trouvait ; que dans ces conditions, il n'est nullement établi que M. C... ait fait des déclarations mensongères au juge d'instruction, étant en outre observé que, dans son mémoire, Denis X... n'indique pas quelles affirmations précises de M. C... seraient, selon lui, contraires à la vérité ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu à suivre du chef de l'infraction de faux témoignage dénoncée par la partie civile ; que l'expert M. Z... a indiqué que "deux très petites micro-particules de fer-chrome" avaient été retrouvées dans l'entaille de la ceinture de M. B... et que ces micro-particules ne pouvaient provenir de la hache ; qu'il a par ailleurs estimé que l'entaille de la ceinture ne pouvait s'expliquer en l'absence de blessures très graves sous jacentes ; que sur ce point, l'expert a précisé qu'il avait utilisé un gigot de boeuf recouvert d'une toile de coton sur laquelle la ceinture de M. B... avait été posée et qu'il avait donné sur cette ceinture, à l'aide de la hache, des coups d'intensité progressive ; qu'or, a-t-il été précisé, il n'était parvenu à couper la ceinture, très résistante, qu'à la suite d'un coup ayant provoqué dans la chair du gigot et le polystyrène

situé sous celui-ci une entaille d'au moins 8 cm de profondeur ; qu'il en a conclu que la coupure de la ceinture n'avait pas été faite à l'aide de la hache de Denis X... mais qu'elle avait pu, en revanche, avoir été faite à l'aide d'un couteau ; qu'il doit être souligné que le second expert, M. A..., a indiqué pour sa part, que les micro-particules de fer-chrome, qui n'appartiennent ni à la hache, ni à l'agrafe de l'étui de revolver, ni à la boucle de la ceinture, ni à des menottes, ne proviennent vraisemblablement pas non plus de la lame d'un couteau en acier qui ne peut contenir autant de chrome et qu'elles appartiennent à un objet en acier chromé ; qu'enfin, l'expert D... a abouti, quant à lui, à des conclusions quelque peu différentes de celles de M. Z... ; qu'en effet, il es parvenu à couper complètement la ceinture en laissant tomber la hache d'une hauteur de 20 cm et a précisé que cette coupure avait entraîné sur la planche d'un sapin recouverte d'une toile en jean, une entaille de 0,1 mm seulement ; qu'il a toutefois conclu que la coupure constatée par les enquêteurs n'avait pu, selon lui, être faite avec la hache car elle était différente de la coupe rectiligne et régulière qu'il avait obtenue ; qu'il apparaît à la chambre d'accusation que l'existence de "deux très petites micro-particules" de fer-chrome retrouvées dans l'entaille de la ceinture de M. B..., qui ne proviennent pas de la hache de Denis X..., ne saurait démonter avec certitude que cette entaille a nécessairement été réalisée avec un autre instrument que cette hache ; qu'il convient en effet d'observer que la ceinture a été manipulée à diverses reprises et par plusieurs personnes et que la présence de "très petites micro-particules" parvenant d'un objet métallique non identifié ne saurait exclure, avec certitude, l'utilisation de la hache qui a pu ne laisser sur la ceinture aucune trace examinable ; qu'il doit d'ailleurs être souligné que cette hache n'était elle-même porteuse d'aucune micro-particule d'éclat de verre alors qu'il est constant qu'elle a bien été utilisée à briser la vitre de la portière de la voiture des policiers ; que par ailleurs, les expériences de laboratoire, qui ont été réalisées sur des plans fixes et ont abouti à des résultats forts différents, n'ont pu reproduire les circonstances précises dans lesquelles M. B... a indiqué avoir reçu le coup de hache, ni prendre en compte le mouvement tournant qu'il a opéré avant d'être atteint, ni la direction et la force données à la hache lancée ; qu'enfin et surtout, si, comme le prétend Denis X..., la coupure de la ceinture a été réalisée par M. B... lui-même, à l'aide d'ailleurs d'un instrument indéterminé puisque, selon le second expert, il ne peut s'agir d'un couteau à lame d'acier, les coupures constatées par les gendarmes, une dizaine de minutes après les faits, sur les vêtements du policier au niveau de la blessure qu'il portait dans le dos, coupures parfaitement compatibles avec l'entaille de la ceinture, deviennent totalement inexplicables, étant précisé que Denis X... n'a jamais prétendu que le policier se fût totalement dévêtu pour couper lui-même ses vêtements en prenant soin de faire coïncider toutes les entailles ;

qu'il convient, dans ces conditions, nonobstant les conclusions, d'ailleurs divergentes, des trois experts, de considérer que l'entaille de la ceinture de M. B... ne peut provenir que de la hache lancée en sa direction par Denis X..., ou, en tout cas, qu'il n'existe aucun élément probant susceptible d'établir que M. B... est l'auteur de cette entaille ; que dès lors, le non-lieu à suivre sera également prononcé du chef de l'infraction de falsification de traces et d'indices ;

"alors que, premièrement, l'arrêt de la chambre d'accusation doit satisfaire, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ; que ne répond pas aux conditions essentielles de son existence légale, l'arrêt qui est entaché d'une contradiction de motifs ; qu'au cas d'espèce, les juges du fond ont fait ressortir que les différentes expertises avaient révélé que l'entaille de la ceinture, appartenant à M. B..., n'avait pu être le fait de la hache de Denis X... ; qu'en énonçant néanmoins, nonobstant ces observations, que l'entaille de la ceinture de M. B... ne pouvait provenir que de la hache lancée dans sa direction par Denis X..., les juges du fond ont entaché leur décision d'une contradiction de motifs ;

"alors que, deuxièmement, et en tout cas, après avoir énoncé que les expertises démontraient que l'entaille dans la ceinture de M. B... ne pouvait être le fait de la hache de Denis X..., les juges du fond auraient dû ordonner un supplément d'information ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, alors qu'ils avaient fait ressortir la nécessité de prescrire un complément d'information, les juges du fond ont de nouveau entaché leur décision d'une contradiction de motifs" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que le demandeur se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre d'accusation en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, le moyen est irrecevable ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Mistral conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-81254
Date de la décision : 14/09/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre d'accusation de la cour d'appel de Caen, 03 février 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 sep. 1999, pourvoi n°99-81254


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:99.81254
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