Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Consolidated Mettalurgical Industries (société Consolidated) a chargé M. X..., affréteur du bateau " Sequana ", propriété de M. Y... (les armateurs), d'acheminer de Rotterdam (Pays-Bas) à Garlinghem-Aire-sur-la-Lys (France) une cargaison de ferrochrome ; qu'au cours du voyage, le bâtiment a, le 4 août 1989, fait naufrage dans les eaux intérieures des Pays-Bas ; que la compagnie Drouot assurances (compagnie Drouot), assureur sur corps du bateau, l'ayant fait renflouer à ses frais, permettant ainsi le sauvetage de la cargaison, a assigné, les 11 et 13 décembre 1990, devant le tribunal de commerce de Paris, la société Consolidated et la compagnie Protea assurance (compagnie Protea), assureur des facultés, en paiement de la somme de 99 485,53 florins, fixée par le dispacheur comme montant de la contribution de la cargaison au règlement d'avaries communes ; que la même demande a été formée à l'encontre du Groupement d'intérêt économique La Réunion européenne (le GIE) ; que la société Consolidated et la compagnie Protea, ayant fait valoir dans cette instance qu'elles avaient elles-mêmes saisi, par acte antérieur du 31 août 1990, le tribunal d'arrondissement de Rotterdam d'une action dirigée contre les armateurs tendant à faire juger qu'elles ne devaient pas contribuer à l'avarie commune en raison de la faute à l'origine du naufrage qu'elles imputaient à ces derniers, ont soulevé une exception de litispendance internationale au profit de la juridiction néerlandaise ; que, par arrêt du 8 octobre 1996, la Cour de Cassation a posé à la Cour de justice des Communautés européennes une question préjudicielle relative à cette exception, à laquelle il a été répondu par arrêt du 19 mai 1998 ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 21 de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ;
Attendu que, par l'arrêt du 19 mai 1998, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que ce texte n'est pas applicable dans le cas de deux demandes en contribution aux avaries communes, l'une opposant l'assureur sur corps d'un bateau qui a sombré au propriétaire de la cargaison se trouvant à bord au moment du naufrage et à son assureur, et l'autre opposant ces deux derniers au propriétaire du bateau et à son affréteur, à moins qu'il ne soit établi que, par rapport à l'objet des deux litiges, les intérêts de l'assureur sur corps du bateau, d'une part, et ceux de ses assurés, le propriétaire et l'affréteur du même bateau, d'autre part, sont identiques et indissociables ;
Attendu que, pour accueillir l'exception de litispendance et dessaisir la juridiction française en faveur de la juridiction néerlandaise première saisie, l'arrêt retient que " la réglementation néerlandaise restreint la possibilité pour un assureur d'être présent au litige dans lequel est impliqué son assuré ", ce dont il résulte que la compagnie Drouot serait en fait présente dans les deux litiges, directement en France, par assuré interposé aux Pays-Bas ; qu'il ajoute que le litige soumis à la juridiction de ce pays " a pour objet partiel la détermination des contributions à l'avarie commune... " et que l'objet de l'instance devant la juridiction française est inclus dans celui de l'instance introduite aux Pays-Bas, y compris en ce qui concerne la compagnie Drouot, par assuré interposé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la compagnie Drouot, en sa qualité d'assureur corps du navire, ne peut être tenue au-delà de la contribution de celui-ci aux avaries communes et qu'à ce titre elle est fondée à demander au propriétaire des marchandises sauvées et à l'assureur facultés la contribution de la cargaison à l'avarie, dont elle a avancé le montant, sauf leur recours ultérieur en responsabilité à l'encontre des armateurs, si ces derniers ont commis une faute à l'origine de l'événement ayant donné lieu à la déclaration d'avarie commune, ce dont il résulte que l'assureur corps, qui ne couvre pas les conséquences de cette faute éventuelle des armateurs, et ces derniers n'ont pas des intérêts identiques et indissociables par rapport à l'objet de chaque litige, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a accueilli l'exception de litispendance internationale et dit que le tribunal d'arrondissement de Rotterdam est seul compétent pour statuer sur le litige opposant la compagnie Drouot assurances à la société Consolidated Mettalurgical Industries et à la compagnie Protea assurances concernant l'avarie commune consécutive au naufrage du bateau " Sequana ", l'arrêt rendu le 29 avril 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.