CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Véronique,
contre l'arrêt de la cour d'assises du Puy-de-Dôme, en date du 18 septembre 1998, qui l'a condamnée, pour destructions, dégradations et détériorations de biens par l'effet d'un incendie ayant entraîné la mort et une incapacité de travail, à 15 ans de réclusion criminelle et à l'interdiction, pendant 10 ans, des droits civiques, civils et de famille, ainsi que contre l'arrêt du 19 septembre 1998 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, alinéa 1er, 322-6, 322-8 et 322-10 du Code pénal, 349 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des principes généraux du droit, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la Cour et le jury ont répondu affirmativement aux questions nos 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 ainsi libellées : "Véronique X... est-elle coupable d'avoir à Clermont-Ferrand, Puy-de-Dôme, le 21 août 1996, en tout cas sur le territoire national et depuis moins de 10 ans, détruit, dégradé ou détérioré par l'effet d'un incendie des biens appartenant à" (cette énonciation étant suivie, dans chaque cas, du nom d'un propriétaire différent) ; et ont prononcé à l'encontre de Véronique X... la peine de 15 ans de réclusion criminelle en application des textes du Code pénal susvisé ;
" 1° alors que la constatation de l'intention étant essentielle en matière criminelle, une condamnation à une peine criminelle pour dégradation volontaire par l'effet d'un incendie n'est légalement justifiée qu'autant que la question sur la culpabilité de l'accusée qui lui sert de soutien comporte explicitement dans son énoncé le terme "volontaire", ce qui n'est pas le cas des questions susvisées ;
" 2° alors qu'il résulte des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que toute personne jugée par une cour d'assises a droit à ce que la Cour et le jury soient interrogés en termes clairs sur le bien-fondé de l'accusation portée contre elle ; qu'il en résulte que le président de la cour d'assises, en présence du texte de l'article 322-6 du Code pénal qui réprime l'incendie volontaire tout en ne comportant pas dans son énoncé le terme "volontaire", ce qui est une grave lacune, ne pouvait formuler les questions sur la culpabilité de l'accusée en les calquant purement et simplement sur ce texte sans ajouter la précision "volontaire", essentielle à la substance de l'accusation et qu'en omettant d'y procéder, le président a privé Véronique X... du droit au procès équitable en sorte que la cassation est encourue " ;
Vu les articles 121-3, alinéa 1er, 322-6 du Code pénal et 349 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'en application des dispositions de l'article 349 du Code de procédure pénale, la Cour et le jury doivent, à peine de nullité, être interrogés sur toutes les circonstances constitutives de l'infraction retenue par l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation ;
Attendu que Véronique X... a été mise en accusation pour avoir à Clermont-Ferrand, le 21 août 1996, incendié des biens appartenant à divers propriétaires, provoquant par l'effet de cet incendie la mort de 4 personnes et, pour une cinquième, une incapacité totale de travail pendant plus de 8 jours ;
Que, sur cette accusation, 9 questions principales, toutes résolues par l'affirmative, ont été posées de la manière suivante :
" Véronique X... est-elle coupable d'avoir à Clermont-Ferrand, le 21 août 1996, détruit, dégradé ou détérioré par l'effet d'un incendie des biens appartenant à autrui " ;
Attendu que ces questions, en omettant de mentionner le caractère volontaire des actes reprochés à l'accusée, n'ont pas fait état de l'un des éléments constitutifs de l'infraction ; qu'il s'ensuit que la demanderesse n'a pas été légalement déclarée coupable de cette infraction ;
Que, dès lors, la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt précité de la cour d'assises du Puy-de-Dôme, du 18 septembre 1998, ensemble la déclaration de la Cour et du jury et les débats qui l'ont précédée ;
Par voie de conséquence,
CASSE ET ANNULE l'arrêt du 19 septembre 1998, ayant prononcé sur les intérêts civils ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de la Loire.