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08/06/1999 | FRANCE | N°98-84160

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 juin 1999, 98-84160


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'association MOUVEMENT JUIF LIBERAL DE FRANCE, partie civile,

contre l'arrêt

de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, en date du 26 juin 1998, qui a relaxé X... ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'association MOUVEMENT JUIF LIBERAL DE FRANCE, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, en date du 26 juin 1998, qui a relaxé X... et Y... du chef de tentative de chantage et l'a déboutée de ses demandes ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-5, 312-10 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Y... et X... du chef de tentative de chantage ;

"aux motifs, d'une part, que Y... et Jean-François Z... se sont entretenus seuls le 6 février 1996 ; que l'initiative prise à cet égard par Y... peut se comprendre eu égard à ses relations avec X... qui avait reçu notification de la mesure de licenciement ; que, s'il a été manifestement question d'un versement de somme d'argent, ceci ne saurait conférer à l'entretien un caractère suspect, le principe d'une négociation dans le cadre d'un licenciement étant légitime ; que, pour le reste, la teneur exacte de l'entretien demeure controversée, Z... alléguant que Y... a invoqué "un dossier permettant d'agir contre nous publiquement", sans autre précision, tandis que Y... conteste toute allusion de ce type et toute formulation de menace ; que Y... a indiqué au juge d'instruction que, lors de la réunion du 16 février 1996 en présence de Mme A... et de M. B..., à laquelle il avait été convié par Z..., ce sont ses interlocuteurs qui ont pris l'initiative d'évoquer les questions d'argent et de pression et a ajouté : "c'est eux qui ont parlé du problème de harcèlement sexuel en disant : alors, elle va nous attaquer là-dessus" ; je n'ai pas dit "elle ne vous attaquera pas" ;

mon attitude n'a pas été de dire "qu'il n'y avait aucun problème" ;

qu'il maintient devant la Cour avoir eu le sentiment que ses interlocuteurs cherchaient à susciter de sa part des propos de nature à caractériser un chantage ; que Z... a déclaré au juge d'instruction : "au cours de l'entretien du 16 février, c'est moi qui ait commencé à dire à Y... : vous m'avez parlé d'un million de francs, puisque c'était la somme indiquée dix jours auparavant, il m'a alors répondu : c'est négociable" ; qu'une telle réponse n'implique pas nécessairement que Y... ait formulé, le 6 février, l'exigence d'une remise d'un million de francs ; qu'il convient d'observer que les indications fournies au cours de l'instruction concernant l'évaluation de l'indemnité qu'il pouvait être envisagé d'attribuer à X... demeurent relativement évasives et imprécises en ce qui concerne leur formulation ; que, surtout, les conditions dans lesquelles il a été fait état de "harcèlement sexuel" sont particulièrement floues ; qu'il convient de rappeler que Z... a déclaré au juge d'instruction, le 16 avril 1997, ne pas savoir "à partir de quand cette expression est intervenue" ; que, si M. B... indique que Y... a évoqué "un harcèlement sexuel", Mme A... mentionne simplement "il a été question de harcèlement sexuel" ;

qu'X... s'était plainte de harcèlement sexuel dès l'année 1994, époque à laquelle un licenciement la concernant avait été déjà envisagé ; que, même si elle indique qu'X... s'est très peu confiée à cet égard, Mme Henry, inspectrice du travail, entendue le 21 août 1996, n'en affirme pas moins expressément qu'X... lui en avait fait part ; que, comme il a été précédemment observé, il paraît peu vraisemblable que l'ambiguïté des rapports de X... avec le rabbin C... soit passée totalement inaperçue au sein du MJLF ; qu'enfin, selon Z..., X... aurait évoqué, lorsqu'elle lui a téléphoné, le 27 novembre 1995, le comportement dudit rabbin à son égard ; qu'il ne peut être exclu, dès lors, que de simples réflexions ou allusions concernant l'attitude du rabbin C... et le ressentiment de X..., dépourvues de tout caractère menaçant, aient pu être perçues au sein du MJLF comme de nature à interférer sur les suites du licenciement et que des questions aient été posées à cet égard à Jacques Y..., voire même que Z... ait, au cours de l'entretien du 16 février 1996, pris l'initiative d'élargir le débat relatif à l'indemnisation en évoquant lui-même les griefs qu'il savait être ceux de X... et en s'interrogeant sur ses intentions ; que, quoi qu'il en soit, une incertitude existe quant à la réalité de l'exigence, par Y..., du versement d'une somme d'argent substantielle à X... sous la menace de révélations ;

"aux motifs, d'autre part, que, si X... a été tenue informée par son ami, Y..., des démarches de celui-ci auprès du MJLF au mois de février 1996, il a précisé avoir agi de sa propre initiative et la preuve contraire ne saurait résulter de la seule déclaration suivante faite au juge d'instruction : "mon ami, Y..., a rencontré Z... un peu à ma demande dans le but de trouver une transaction consécutive à mon licenciement" ; que cette phrase ne révèle que la confidence d'un désarroi et l'appel implicite à une assistance ; qu'il ne saurait en être déduit que Y... a été mandaté par X... pour faire pression auprès du MJLF par une menace quelconque ; qu'il existe un doute sur la matérialité des faits reprochés à X... ;

"1 ) alors que la tentative de chantage est constituée par le fait de tenter d'obtenir une remise de fonds en menaçant, même de manière voilée, de révéler ou d'imputer des faits de nature à porter atteinte à l'honneur ou la considération ; que la cour d'appel, qui constatait que lors de l'entretien avec l'employeur d'X..., le 6 février 1996 puis le 16 février 1996, devant deux membres du bureau du Mouvement Juif Libéral de France, Y... avait laissé entendre qu'une action en justice pour harcèlement sexuel ne pouvait être écartée et avait simultanément évoqué le caractère "négociable" du versement de la somme d'un million de francs avancé par lui-même, ne pouvait, sans méconnaître les dispositions des articles 121-5 et 312-10 du Code pénal, faire bénéficier celui-ci d'une décision de relaxe ;

"2 ) alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, le Mouvement Juif Libéral de France faisait valoir que l'exigence du versement d'une somme d'un million de francs rapporté au salaire mensuel de X... qui était de 15 500 francs, avait, en raison de son caractère disproportionné, une cause nécessairement illégitime en sorte que la transaction initiée par Y... sous la menace de révélations de faits de nature à entraîner des sanctions pénales était constitutive d'un chantage et qu'en omettant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions de la partie civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"3 ) alors que l'arrêt, qui constatait que X... avait reconnu que Y... avait agi "un peu à sa demande" et l'avait tenue informée de ses démarches auprès de son employeur, ne pouvait, sans se contredire ou mieux s'expliquer, faire bénéficier celle-ci d'une décision de relaxe" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle a estimé que la preuve des faits reprochés n'était pas rapportée à la charge des prévenus, en l'état des éléments soumis à son examen, et a ainsi justifié sa décision déboutant la partie civile de ses demandes ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, M. Milleville conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. le Foyer de Costil ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-84160
Date de la décision : 08/06/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11ème chambre, 26 juin 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jui. 1999, pourvoi n°98-84160


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.84160
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