La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/06/1999 | FRANCE | N°98-82732

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 juin 1999, 98-82732


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Fernand,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 9 février 1998, qui, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité des travailleurs, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 francs d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision, et a pronon

cé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique d...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Fernand,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 9 février 1998, qui, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation relative à la sécurité des travailleurs, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 francs d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 avril 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Simon conseiller rapporteur, M. Milleville conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Cotte ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

Sur le rapport de Mme le conseiller SIMON, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 385, 388 et 593 du Code de procédure pénale, 6.3.a de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Fernand X... coupable d'avoir omis de respecter les mesures relatives à l'hygiène et à la sécurité du travail, et de blessures par imprudence ;

"aux motifs, sur la nullité de la citation délivrée en première instance, que le prévenu a fait valoir devant la Cour que la citation délivrée en première instance ne le visait pas en sa qualité de gérant de la SNC Intexalu Système ; que, cependant, à défaut d'avoir présenté cette exception de nullité avant toute défense au fond, ainsi que l'exige l'article 385, dernier alinéa, du Code de procédure pénale, ce moyen ne peut être accueilli devant la Cour ;

"alors que, en application des articles 388 du Code de procédure pénale et 6.3.a de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les juridictions correctionnelles ne peuvent légalement statuer que sur les faits relevés par l'ordonnance ou la citation qui les a saisis, ce principe destiné à protéger les droits de la défense ne pouvant recevoir exception que quand le prévenu renonce expressément à s'en prévaloir et accepte le débat sur des faits non dénoncés dans le titre de la poursuite ; que, dès lors, en l'espèce où le prévenu avait été cité devant le tribunal correctionnel pour infraction à la réglementation destinée à assurer l'hygiène et la sécurité du travail, et blessures par imprudence en sa qualité de président du directoire d'une société anonyme qui n'était pas l'employeur du salarié victime de l'accident, la Cour a violé les textes précités en entrant en voie de condamnation à son encontre en le prenant en sa qualité de gérant d'une autre société qui était l'employeur de la victime" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite de l'accident survenu à un travailleur intérimaire employé dans un établissement d'une société du groupe Intexalu, Fernand X..., cité devant le tribunal correctionnel pour avoir, "étant président du directoire de la SA Intexalu", commis une infraction aux règles relatives à la sécurité des travailleurs et le délit de blessures involontaires, a été déclaré coupable des faits visés à la prévention ;

Attendu que, devant la cour d'appel, il a fait valoir que la victime était employée, non par la SA Intexalu, mais par la "SNC Intexalu", et a soutenu que la citation le visant en qualité de président du directoire de cette "SA Intexalu" était nulle ;

Attendu que la cour d'appel, par l'arrêt attaqué, a relevé que ce moyen de nullité n'avait pas été présenté devant les premiers juges comme l'exigeait l'article 385 du Code de procédure pénale ; qu'elle a, en outre, constaté que le prévenu, qui était président du directoire de la société SA Intexalu, reconnaissait être également le gérant de la société SNC Intexalu qui employait le salarié travaillant dans l'établissement concerné par les faits, objet de la poursuite ; qu'après avoir analysé ces faits, qui ont été contradictoirement débattus, la cour d'appel a retenu que les premiers juges avaient déclaré Fernand X... coupable des infractions visées à la prévention, mais a précisé qu'il était "pris en sa qualité de gérant de la SNC Intexalu" ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations et constatations, desquelles il résulte que le prévenu n'a jamais contesté être le dirigeant de la société SNC Intexalu qui employait le salarié, victime de l'accident, et qu'il s'est expliqué sur les faits visés à la prévention, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 231-1, L. 231-2, L. 263-2, L. 263-6, L. 230-2 et R. 233-42 du Code du travail, 121-1, 222-19, alinéa 1, 222-46 et 131-35 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Fernand X... coupable d'avoir omis de respecter les mesures relatives à l'hygiène et à la sécurité du travail et de blessures involontaires ;

"aux motifs que le prévenu devait, conformément aux dispositions de l'article L. 230-2 du Code du travail, assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs de son établissement, qu'il lui incombait d'éviter les risques, d'évaluer les risques ne pouvant être évités et de combattre les risques à leur source ; que, s'agissant de l'accident litigieux, il est patent que la manipulation de tubes longs de plus de 6 mètres sur une plate-forme relativement étroite, située en hauteur, présente un risque de chute et que la pose d'une simple chaîne permet seulement de visualiser une aire de travail, mais non d'empêcher la chute d'un salarié ;

"que l'enquête n'a pas permis d'établir avec certitude à quel moment la chaîne dite "de protection" avait été enlevée ; qu'en tout état de cause, ce moyen de protection était inadapté puisqu'il pouvait être enlevé et n'évitait pas les chutes ; qu'il apparaît qu'un autre système de sécurité, par exemple un harnais, aurait pu être utilisé ; qu'également, il n'est pas établi que des consignes de sécurité précises aient été données aux salariés appelés à travailler en hauteur et principalement à la victime qui était un travailleur intérimaire peu expérimenté ; qu'il existait dans l'établissement une mauvaise organisation de ce poste de travail même si, par ailleurs, le groupe Intexalu et ses dirigeants portent une attention vigilante aux problèmes de sécurité dans l'entreprise ;

"alors que, si le Code du travail impose à l'employeur de salariés appelés à travailler en hauteur, de construire les passerelles, planchers en encorbellement ou plate-forme en surélévation de façon à ce que les ouvriers qui travaillent sur ces ouvrages ne soient pas exposés à des risques de chute, aucun article dudit Code ni aucun texte pris pour leur application ne permet de considérer que la responsabilité pénale de l'employeur est engagée quand l'un de ses ouvriers, travaillant sur une plate-forme située à 2,37 m de hauteur, s'est blessé en tombant après avoir enlevé la chaîne destinée à assurer sa protection contre une telle chute ; que, dès lors, en l'espèce où le prévenu invoquait l'enlèvement d'une telle chaîne par la victime pour solliciter sa relaxe, les juges du fond, qui n'ont pas contesté un tel enlèvement, ne pouvaient, sans violer l'article 121-1 du Code pénal qui dispose que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait, entrer en voie de condamnation à son encontre en posant par principe que la pose d'une chaîne ne pouvait empêcher la chute et que ce moyen de protection était inadapté parce qu'il pouvait être enlevé, aucun élément de l'enquête de police n'ayant établi que la chaîne n'aurait pu éviter la chute du salarié si ce dernier ne l'avait pas enlevée et aucun dispositif de protection, même un harnais, ne pouvant pas ne pas être enlevé par le salarié qu'il est destiné à protéger" ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des infractions visées à la prévention, les juges retiennent, notamment, que la pose d'une chaîne en bordure de la plate-forme en surélévation n'était pas susceptible d'empêcher la chute du salarié qui travaillait sur celle-ci et que ce dispositif, qui avait été retiré avant l'accident, n'était en tout état de cause pas adapté et ne répondait pas aux exigences de l'article R. 233-45 du Code du travail ; qu'enfin, ils relèvent que cette "mauvaise organisation de ce poste de travail" est à l'origine de l'accident ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, desquelles il résulte que le prévenu n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient, compte tenu de ses fonctions et des pouvoirs dont il disposait en sa qualité de chef d'entreprise et que ce manquement, qui caractérise une infraction aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, a concouru à la survenance de l'accident, la cour d'appel a justifié sa décision, tant au regard de l'article L. 263-2 du Code du travail que des articles 121-3 et 222-19 du Code pénal ;

D'où il suit que le moyen, qui tend à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82732
Date de la décision : 08/06/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, 09 février 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jui. 1999, pourvoi n°98-82732


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.82732
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award