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02/06/1999 | FRANCE | N°98-81736

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 juin 1999, 98-81736


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'ADMINISTRATION DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 12 décembre 1997, q

ui, dans la procédure suivie notamment contre X... et Y... du chef d'infractions à l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'ADMINISTRATION DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 12 décembre 1997, qui, dans la procédure suivie notamment contre X... et Y... du chef d'infractions à la législation des contributions indirectes, l'a déboutée de son action après avoir relaxé les prévenus et mis hors de cause les sociétés A... et B..., civilement responsables ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 1er décembre 1992, un contrôle a été effectué dans quatre débits de boissons sis à Bagnols sur Cèze, où les services de gendarmerie et des agents des impôts ont découvert et saisi des appareils vidéo utilisés comme jeux de "poker" électronique, les exploitants de ces établissements remettant aux joueurs une somme d'argent en échange des montres ou friandises gagnées ;

Qu'une information judiciaire a été ouverte par le procureur de la République pour tenue de jeu de hasard non autorisé dans un lieu public, au terme de laquelle plusieurs personnes, dont C..., concubin d'une des exploitantes du bar Z... et qui y avait placé deux appareils fournis par la société A..., et le gérant de cette dernière, X..., ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel ; que l'administration des Douanes et Droits Indirects a cité directement devant cette même juridiction, pour défaut de déclaration d'ouverture d'une maison de jeux, défaut de tenue de comptabilité annexe et du registre récapitulatif du produit des jeux, et défaut de déclaration de recettes et de paiement de la taxe sur les spectacles, toutes les personnes renvoyées par le juge d'instruction, ainsi que Y..., dirigeant de la société B... gérant le bar Z..., qui n'avait pas été mis en examen ;

Que le tribunal correctionnel, saisi de l'infraction de droit commun et des délits fiscaux, a notamment relaxé X... et condamné différents exploitants, dont C... ; qu'il n'a pas statué à l'égard de Y... ;

Que, sur le seul appel de l'Administration, la cour d'appel a débouté cette partie de son action contre X... et Y..., mis hors de cause les sociétés A... et B..., prises en qualité de civilement responsables, et condamné C... à différentes pénalités fiscales ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1559, 1560, 1564, 1565, 1699, 1791, 1799, 1799 A et 1804 B du Code général des impôts, des articles 124, 126, 146 et 154 de l'annexe IV du Code général des impôts, de l'article L. 235, L. 236 et L. 238 du livre des procédures fiscales, des articles 385, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Y..., gérant de la SARL B..., et mis hors de cause la SARL B..., propriétaire de l'établissement où fonctionnaient les appareils automatiques ;

"aux motifs que, si aucune citation n'a été délivrée à Y... s'agissant de l'action publique, il a cependant été régulièrement cité, ainsi que la société B..., par l'administration des Douanes ; qu'il convient d'annuler le jugement et d'évoquer ; qu'il faut constater, tout d'abord, que la citation de ce prévenu, en cause d'appel, sur l'action publique, ne saisit par la Cour ; qu'ensuite Y... n'a jamais été entendu sur les divers délits relevés à son encontre tant par les agents de l'administration des Douanes que par les gendarmes enquêteurs ;

qu'il n'a pas été entendu par le juge d'instruction comme n'ayant pas fait l'objet d'une mise en examen ; et qu'en conséquence, il n'a pas été amené à s'expliquer sur les divers chefs de poursuite dont il est l'objet ;

"alors que, premièrement, en matière de contributions indirectes, les poursuites sont engagées par la direction générale des Douanes et Droits Indirects ; que, sur l'action du directeur général des Douanes et Droits Indirects, le juge correctionnel prononce, non seulement les sanctions fiscales, mais également l'amende ; qu'en se fondant sur la circonstance qu'une citation n'aurait pas été délivrée par le ministère public, pour déclencher l'action publique, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"alors que, deuxièmement, en matière de contributions indirectes, les condamnations du procès-verbal font foi jusqu'à preuve contraire ; qu'en l'espèce, le procès-verbal relevait que la SARL B... et Y... exploitaient une maison de jeux sans déclaration préalable, qu'ils ne détenaient pas de comptabilité annexe et de registre récapitulatif des produits des jeux, qu'ils ne déclaraient pas les recettes et qu'ils n'acquittaient pas la taxe sur les spectacles ; qu'en s'abstenant de rechercher si Y... et la SARL B... rapportaient la preuve contraire des faits consignés au procès-verbal avant de pouvoir les relaxer, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"alors que, troisièmement, saisis sur la base d'une assignation sur procès-verbal, les juges du fond doivent se prononcer sur les faits qui y sont dénoncés, peu important que l'Administration n'ait pas entendu préalablement les prévenus, que la gendarmerie qui a assisté l'Administration n'ait pas procédé à leur audition ou que la procédure n'ait pas donné lieu à information ;

qu'à cet égard encore, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés ;

"et alors que, quatrièmement, et en tout cas, il ne résulte pas des éléments de la procédure que Y... et la SARL B... aient invoqué, in limine litis et avant toute défense au fond, une quelconque irrégularité, de nature à justifier la nullité de la procédure ; qu'ainsi l'arrêt a, en tout état de cause, violé l'article 385 du Code de procédure pénale" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1559, 1560, 1564, 1565, 1699, 1791, 1799, 1799 A et 1804 B du Code général des impôts, des articles 124, 126, 146 et 154 de l'annexe IV du Code général des impôts, de l'article L 235, L. 236 et L. 238 du livre des procédures fiscales, des articles 385, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X..., gérant de la société A... et la SARL A... qui dépannait les appareils automatiques, relevait les compteurs et ventilait la recette entre le propriétaire des appareils et le propriétaire des établissements ;

"aux motifs adoptés des premiers juges, qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir la matérialité des faits reprochés ; qu'au demeurant les prévenus n'ont pas été interrogés sur les déclarations qu'ils auraient pu être tenus de faire ;

"alors que, premièrement, en matière de contributions indirectes, les constatations figurant au procès-verbal font foi jusqu'à preuve contraire ; qu'en l'espèce, le procès-verbal constatait que les appareils automatiques appartenaient à la SARL A... dont X... était le gérant ; qu'ils fonctionnaient de façon irrégulière et des sommes étaient encaissées par l'intermédiaire d'un dénommé A..., lequel assurait l'entretien des appareils et la perception des mises ; qu'en énonçant qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir la matérialité des faits reprochés, pour entrer en voie de relaxe, sans rechercher si les faits constatés au procès-verbal ne justifiaient pas une condamnation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des règles susvisées ;

"alors que, deuxièmement, les juges du fond doivent se prononcer sur les faits dénoncés au procès-verbal, peu important que les personnes poursuivies n'aient pas été entendues ; qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés ;

"et alors que, troisièmement, et en tout cas, aucune exception de nullité n'a été invoquée in limine litis et avant toute défense au fond, se rapportant à l'audition de X... et la SARL A... ; d'où il suit que l'arrêt a été rendu, en tout état de cause, en violation de l'article 385 du Code de procédure pénale" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article L. 238 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu que, en matière de contributions indirectes, les procès verbaux des agents de l'Administration font foi jusqu'à preuve contraire ;

Attendu que, pour relaxer Y..., régulièrement cité à personne, non comparant ni représenté, et X..., du chef d'infractions à la législation des contributions indirectes, la cour d'appel énonce que le premier de ces prévenus "n'a jamais été personnellement entendu sur les divers délits relevés à son encontre" et, par motifs adoptés des premiers juges, "qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir la matérialité des faits reprochés à X..., qui au demeurant n'a jamais été interrogé sur les déclarations qu'il aurait pu être tenu de faire sur les infractions fiscales" ;

Mais attendu qu'en l'état de ces motifs, qui n'établissent pas que les juges se sont prononcés au vu d'éléments de preuve contredisant les constatations faites dans les procès-verbaux dressés par les agents des Impôts, et alors au surplus qu'aucune disposition légale ou conventionnelle n'exige l'audition d'un prévenu préalablement à sa comparution devant le tribunal correctionnel, où il peut s'expliquer et discuter librement les éléments de culpabilité retenus contre lui, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Qu'il s'ensuit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en ses dispositions concernant les prévenus X... et Y... ainsi que les sociétés A... et B..., l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, en date du 12 décembre 1997, toutes autres dispositions étant expréssement maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de MONTPELLIER, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de NIMES, sa mention en marge où à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Martin conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Lucas ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-81736
Date de la décision : 02/06/1999
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, 12 décembre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 jui. 1999, pourvoi n°98-81736


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.81736
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