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07/04/1999 | FRANCE | N°97-81926

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 avril 1999, 97-81926


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Z... Francis,

- Z... Stéphane,

- Société EUROP AUTO,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, du 27 février 1997, qui a condamné la société à 50 000 francs d'amende pour usage illicite de marque, Francis et Stéphane Z... à respectivement 15 000 et 10 000 francs dont 5 000 francs avec sursis d'amende pour ce même déli

t et publicité de nature à induire en erreur, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Z... Francis,

- Z... Stéphane,

- Société EUROP AUTO,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, du 27 février 1997, qui a condamné la société à 50 000 francs d'amende pour usage illicite de marque, Francis et Stéphane Z... à respectivement 15 000 et 10 000 francs dont 5 000 francs avec sursis d'amende pour ce même délit et publicité de nature à induire en erreur, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 23 février 1999 où étaient présents : M. Gomez président, Mme Ferrari conseiller rapporteur, MM. Grapinet, Mistral, Blondet, Ruyssen, Mmes Mazars, Ponroy conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Caron, M. Samuel conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Cotte ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FERRARI, les observations de Me VUITTON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191 et 592 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt ne mentionne pas que les magistrats formant la Chambre des appels correctionnels de la Cour de Poitiers ont été désignés conformément aux dispositions de l'article 191 du Code de procédure pénale ;

"alors que toute décision doit porter en elle-même la preuve de sa régularité pour permettre aux juges de cassation de la vérifier ; qu'en l'espèce, en l'absence d'une mention faisant état de leur désignation conforme aux règles de procédure pénale, la Cour de Poitiers ne permet pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle" ;

Attendu que le moyen, qui conteste la régularité de la composition de la juridiction de jugement en invoquant la méconnaissance d'un texte seulement applicable à la chambre d'accusation, ne saurait être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 713-4 et L. 716-9 du Code de la propriété intellectuelle, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Francis et Stéphane Z..., ainsi que la société Europ Auto coupables d'avoir utilisé une marque, en l'espèce, des marques A..., AUDI et VOLKSWAGEN en violation des droits conférés par son enregistrement et des interdictions qui découlent de celui-ci ;

"aux motifs adoptés que postérieurement au 14 juin 1993, la société Parthenay Automobile qui n'avait plus la qualité de concessionnaire, même si elle contestait les conditions de retrait de la concession, avait perdu le droit d'utiliser les marques AUDI et VOLKSWAGEN sur les différents documents commerciaux ou techniques remis à la clientèle ; que la société EUROP AUTO qui n'a jamais été concessionnaire desdites marques, n'a jamais disposé du droit de les utiliser ; qu'il a été constaté en particulier qu'a été apposé sur les carnets d'entretien des propriétaires des véhicules de ces marques, clients des prévenus, un cachet commercial mentionnant les marques VOLKSWAGEN et AUDI, ce du mois de septembre 1993 jusqu'au mois de décembre 1994 ; qu'en outre, Francis Z... reconnaît avoir utilisé l'identification de A... (panneaux, enseignes, documents commerciaux) jusque vers septembre 1994, date à laquelle il situe à tort la nomination du nouveau concessionnaire en réalité intervenue dès le 14 avril 1994 ;

"aux motifs propres que des bons de commande propres au réseau des concessionnaires VOLKSWAGEN-AUDI ont été utilisés pour la vente de véhicules neufs de la marque (Golf TDI, vendue à M. X... suivant bon de commande du 19 septembre 1994, Golf Diesel vendue à M. Y... suivant bon de commande du 10 octobre 1994) ; que du matériel, tel qu'un cachet commercial où figurent à la fois les logos des marques VAG-AUDI, VOLKSWAGEN et le numéro d'identification de l'atelier attribué par A... FRANCE, a été utilisé sur les carnets d'entretien comportant les mêmes logos ;

que des signes d'identification propres au réseau des concessionnaires tels que les autocollants rectangulaires ont été apposés et maintenus sur la porte d'accès au hall d'entrée de la SARL EUROP AUTO ; qu'il est établi qu'après le 14 juin 1993, la société Parthenay Auto n'avait plus la qualité de concessionnaire exclusif VOLKSWAGEN-AUDI et que la SARL EUROP AUTO n'a jamais été concessionnaire. Dès lors l'utilisation de documents, de matériel, de signes d'identification propres au réseau des concessionnaires et agents des marques VOLKSWAGEN-AUDI, comportant à ce titre les logos des marques VAG-AUDI-VOLKSWAGEN, qui ont fait l'objet d'un dépôt et d'un enregistrement auprès de l'Institut National de la Propriété Industrielle, constitue bien l'infraction reprochée aux prévenus ;

"alors que, d'une part, l'article 716-9 n'a pas pour objet de sanctionner pénalement les acquéreurs ou revendeurs de produits même commercialisés au mépris d'un système de distribution sélective pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté Economique Européenne ou dans l'espace économique européen sous une marque faisant l'objet d'une protection avec ou sans le consentement du titulaire de cette marque, lorsque la marque utilisée n'a pas été contrefaite ; qu'en décidant néanmoins que l'utilisation de documents, matériel et de signes d'identification propres au réseau des concessionnaires et agents des marques VOLKSWAGEN et AUDI par les prévenus, était constitutive de l'infraction prévue par l'article L. 716-9 du Code de la propriété intellectuelle, la Cour a violé les textes visés au moyen ;

"alors que, d'autre part, l'interdiction de l'utilisation d'une marque protégée ne peut être opposée notamment au garagiste lorsque celui-ci achète, vend et assure la réparation et l'entretien effectif des véhicules de la marque considérée ; qu'en décidant le contraire, la Cour a violé les textes visés au moyen" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Francis Z..., dirigeant de la société du même nom exploitant un garage, a perdu, après rupture du contrat, la qualité de concessionnaire exclusif des véhicules des marques déposées Audi et Volkswagen ; que son entreprise a fait l'objet d'une liquidation judiciaire et qu'il est devenu directeur commercial de la société Europ Auto, nouvellement constituée au même siège, et gérée par son fils Stéphane ;

Attendu que Francis et Stéphane Z... ainsi que la société Europ Auto sont poursuivis pour usage illicite des marques V.A.G, déposée par la société allemande Volkswagenwerk Aktiengessellschaft, Audi et Volkswagen ;

Que, pour les déclarer coupables de l'infraction, les juges d'appel retiennent que, bien que la société V.A.G France ait exclu Francis Z... de son réseau de distribution, les prévenus ont continué, pour la vente de véhicules neufs Audi et Volkswagen importés de la Communauté européenne, à utiliser des bons de commande, cachet commercial, carnets d'entretien et autocollants publicitaires propres au réseau de concessionnaires et agents et sur lesquels figure le logo des marques protégées ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel qui a retenu à la charge des prévenus, non pas la commercialisation au mépris du système de distribution de véhicules mis sur le marché communautaire par le titulaire de la marque, mais l'utilisation par les revendeurs, sans l'autorisation de ce dernier, de matériel et documents commerciaux revêtus des marques protégées, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-5 et L. 121-6 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré Stéphane et Francis Z... coupables de l'infraction de publicité de nature à induire le consommateur en erreur, et en répression a condamné le premier à une peine d'amende de 10 000 francs assortie du sursis à exécution et le second à une peine d'amende de 15 000 francs et a ordonné aux frais de celui-ci la publication de la décision dans le journal SUD-OUEST ;

"aux motifs adoptés que la société EUROP AUTO a fait procéder par voie de presse à une publicité sur l'achat de véhicule neufs VOLKSWAGEN, AUDI, mentionnant service après-vente assuré ; qu'une telle annonce signifie dans l'esprit d'un consommateur moyennement avisé qu'il trouvera auprès de la société EUROP AUTO la possibilité d'exercer son droit à la garantie constructeur ; que les documents contractuels remis à tout acquéreur d'un véhicule VOLKSWAGEN ou AUDI stipulent au chapitre garanties techniques, paragraphe garantie conventionnelle "les demandes de garantie doivent être présentées à un atelier signalé par le panonceau officiel A..., la réparation sous garantie ne pouvant être réalisée que par un atelier du réseau A.... Aucune demande de remboursement ne pourra être admise pour des travaux effectués hors du réseau A..." ; qu'en conséquence, la société EUROP AUTO qui se procurait des véhicules neufs VOLKSWAGEN-AUDI dans le cadre strictement réglementé de l'activité de mandataire n'était pas fondée à faire croire au consommateur qu'elle était à même de lui assurer la véritable garantie constructeur, l'engagement de M. Z... d'assurer un service équivalent ne constituant qu'un palliatif dépendant en particulier de sa survie commerciale, élément qui ne fait pas partie du domaine des certitudes, à la différence du réseau A... dont la pérennité apparaît mieux assurée ; qu'en sa qualité de véritable responsable de la politique commerciale, Francis Z... s'est ainsi rendu coupable de l'infraction de publicité mensongère ;

"aux motifs propres que les annonces incriminées ont paru avec la mention "Garage Z...", désignant le garage à l'époque où celui-ci était concessionnaire VOLKSWAGEN-AUDI ;

qu'elles prétendent que l'AUDI-4 est disponible, que cependant un délai de livraison de 2 mois et demi est nécessaire pour l'AUDI A4 version diesel ; que deux autres possibilités offrent à la vente des véhicules neufs de diverses marques tout en assurant la garantie usine et le service après-vente. Or, la mise en oeuvre éventuelle de cette garantie suppose que les visites d'entretien préconisées par le constructeur aient été exécutées par un atelier du réseau de ses concessionnaires ou agents, ce qui ne pouvait être le cas, la SARL EUROP AUTO n'étant pas concessionnaire VOLKSWAGEN-AUDI, ni d'autres marques d'ailleurs ; que le garage Z... (en réalité la SARL EUROP AUTO) apparaît comme vendeur de véhicules neufs, alors qu'il ne pouvait intervenir qu'en qualité de mandataire, celui-ci accomplissant une prestation de service et non une activité de négoce. La mention "provenance CEE" figurant sur les publicités étant à cet égard insuffisante pour renseigner clairement l'acheteur éventuel ; qu'il en résulte que le consommateur a été induit en erreur par ces publicités et que cette infraction doit être retenue à l'encontre de Stéphane Z..., gérant de droit de la SARL EUROP AUTO et de Francis Z..., véritable responsable de la politique commerciale ;

"alors que, d'une part, lorsque le contrevenant est une personne morale, la responsabilité incombe à ses dirigeants ; qu'en l'espèce, il résulte de constatations de l'arrêt que la société EUROP AUTO a fait paraître les publicités incriminées ; qu'en retenant Francis Z... dans les liens de la prévention du chef de publicité de nature à induire en erreur en sa qualité de véritable responsable de la politique commerciale de la société EUROP AUTO, sans relever qu'il avait la qualité de dirigeant, la Cour n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des textes visés au moyen ;

"alors que, en tout état de cause, l'utilisation dans les publicités incriminées de la mention "Garage Z...", utilisant régulièrement le nom patronymique du gérant de la société EUROP AUTO, exerçant son activité dans des locaux distincts de ceux qu'elle exploitait sous le nom "Parthenay Auto" ne revêtait pas de caractère frauduleux de nature à induire en erreur le consommateur ; qu'en décidant le contraire, la Cour a violé les articles visés au moyen ;

"alors que, enfin, le règlement d'exemption automobile ne s'oppose pas à ce qu'un opérateur indépendant, qui n'est ni revendeur agréé d'un réseau de distribution automobile, ni intermédiairement mandaté, puisse se livrer à une activité d'importation parallèle et de revente de véhicules neufs ; que la Cour en retenant que la société EUROP AUTO ne pouvait, dans le cadre de l'activité de vente de véhicules neufs, intervenir qu'en qualité de mandataire, a violé les textes visés au moyen" ;

Attendu que Francis et Stéphane Z... sont encore poursuivis pour publicité de nature à induire en erreur ; que, pour caractériser l'infraction, les juges relèvent que la société Europ Auto a fait paraître dans la presse locale des annonces publicitaires sous le nom de "Garage Z..." proposant à la vente des véhicules neufs de marques diverses en assurant la "garantie usine"et le service après-vente ; qu'ils retiennent que l'exploitant du garage, qui n'était plus concessionnaire des véhicules Volkswagen-Audi, ni d'aucune autre marque, ne pouvait cependant assurer le service après vente qu'au risque de faire perdre à l'acquéreur la garantie du constructeur, lequel exige, pour sa mise en oeuvre, que les visites d'entretien aient été effectuées par un atelier du réseau de concessionnaires ou d'agents ;

Que, pour imputer le délit aux prévenus, les juges énoncent que l'un est le dirigeant de droit de la personne morale ayant la qualité d'annonceur, l'autre le responsable de la politique commerciale ;

Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-81926
Date de la décision : 07/04/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, 27 février 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 avr. 1999, pourvoi n°97-81926


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.81926
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