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31/03/1999 | FRANCE | N°98-82868

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mars 1999, 98-82868


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, du 12 février 1998, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis et à des réparations civiles ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 février 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l'article L.131-6

, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire :

M. Gomez président, M. Pelletier conseiller...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, du 12 février 1998, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis et à des réparations civiles ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 février 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire :

M. Gomez président, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Guilloux conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, de la société civile professionnelle RYZIGER-BOUZIDI et de la société civile profesionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 435, 485, 512, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs, excès de pouvoir ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé la comparution et l'audition des témoins Guillaume C... et Annie L..., cités par la défense ;

"aux motifs qu'Annie L..., psychologue, qui travailla durant cinq ans dans des colonies dont le prévenu était le directeur et qui était encore présente lors de cette colonie, déclarait n'avoir jamais constaté un comportement suspect chez ce dernier et être très surprise par ces accusations auxquelles elle disait ne pas croire ; que la Cour, relevant que le prévenu n'a fourni aucune indication sur l'utilité des dépositions, à l'audience, d'Annie L... et de Guillaume C... pour la manifestation de la vérité ni explication sur les raisons pour lesquelles leur audition n'a pas été demandée en première instance et s'estimant suffisamment informée au terme des débats, a refusé d'entendre ces témoins (arrêt, page 8) ;

"alors que le prévenu tenant de l'article 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales le droit de faire interroger les témoins à charge ou à décharge, les juges d'appel sont tenus, lorsqu'ils en sont légalement requis, d'ordonner l'audition contradictoire desdits témoins, sauf impossibilité dont il leur appartient de préciser les causes ;

"que, dès lors, en se bornant à énoncer d'une part, que le prévenu n'a fourni aucune indication sur l'utilité des dépositions, à l'audience, d'Annie L... et de Guillaume C..., pour la manifestation de la vérité, ni explication sur les raisons pour lesquelles leur audition n'a pas été demandée en première instance, d'autre part, que la cour d'appel s'estime suffisamment informée au terme des débats, pour en déduire qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner la comparution des témoins cités par le prévenu, sans préciser en quoi leur audition aurait été impossible, la cour d'appel, qui se détermine par des motifs inopérants, a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'audition de deux témoins présentée pour la première fois en cause d'appel par le prévenu, qui avait comparu en première instance, la cour d'appel se prononce par les motifs reproduits au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que le prévenu n'avait pas fait citer les deux témoins susvisés devant les premiers juges, ainsi que le lui permettaient les articles 435 et 444 du Code de procédure pénale, la cour d'appel, qui a usé, sans méconnaître les dispositions de l'article 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne des droits de l'homme, de la faculté dont elle dispose en vertu de l'article 513 du Code précité, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-27, 222-28,222-29 et 222-30 du nouveau Code pénal, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable d'agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne ayant autorité ;

"aux motifs propres que A..., âgé de 10 ans indiquait que le directeur l'avait fait venir dans son bureau après une bagarre, l'avait assis en face de lui et lui avait caressé le ventre et le sexe sur les vêtements ; que B..., âgé de 12 ans, expliquait que pendant la première semaine de séjour, alors qu'il consultait un tableau dans le bureau du directeur avec un groupe d'enfants, ce dernier avait profité de ce qu'il se trouvait derrière tous les autres pour venir lui caresser les fesses sur le short ; que C..., âgé de 9 ans, déclarait qu'aux alentours du 14 juillet 1995, après une bagarre avec A..., il avait été convoqué dans le bureau du directeur qui lui avait posé la main sur la hanche avant de la passer sur son sexe, à l'extérieur de ses vêtements ; que D..., âgé de 11 ans, relatait que le 10 juillet 1995, après qu'il se soit battu avec B..., le directeur était venu dans la chambre de D..., l'avait poussé contre le placard avant de lui caresser les fesses sur le short et de l'asseoir sur le lit pour lui lécher la joue ;

que D..., âgé de 8 ans, se plaignait aussi de ce que, le 15 juillet 1995, alors qu'il venait rechercher son arc dans le bureau du directeur, celui-ci lui avait caressé les fesses à deux reprises ;

qu'Annie L..., psychologue, qui travailla durant cinq ans dans des colonies dont le prévenu était le directeur et qui était encore présente lors de cette colonie, déclarait n'avoir jamais constaté un comportement suspect chez ce dernier et être très surprise par ces accusations auxquelles elle disait ne pas croire ; que la Cour, relevant que le prévenu n'a fourni aucune indication sur l'utilité des dépositions, à l'audience, d'Annie L... et de Guillaume C... pour la manifestation de la vérité ni explication sur les raisons pour lesquelles leur audition n'a pas été demandée en première instance et s'estimant suffisamment informée au terme des débats, a refusé d'entendre ces témoins ; que la Cour note qu'aucun élément du dossier ne permet, contrairement aux affirmations de l'appelant, de présumer l'existence d'une manipulation ou machination de la part des éducateurs dont une partie effectuait leur première colonie en qualité d'animateurs et qui ont adopté initialement une attitude de prudence lors des premières confidences des enfants ; que la concordance et le caractère très circonstancié des accusations des cinq jeunes garçons, alors que les circonstances rapportées par ceux-ci au cours desquelles ils affirment avoir été victimes des agissements du prévenu ne sont pas contestées par ce dernier, leurs confidences spontanées et réitérées aux éducateurs malgré une certaine méfiance de la part de ces derniers alors que rien ne laisse présumer une affabulation de la part de ces enfants constituent, en dépit des dénégations de l'appelant, des preuves sérieuses de culpabilité et très suffisantes pour entrer en voie de condamnation (arrêt, pages 6, 7 et 8) ;

"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que l'abus d'autorité résulte non seulement de la fonction exercée par Bernard X... en sa qualité de directeur de la colonie mais du contexte des passages à l'acte ; que les attouchements commis sur les enfants interviennent alors que l'enfant est fautif, mérite une sanction ; que le règlement de la colonie prévoyait qu'en cas de faute grave l'animateur conduisait l'enfant chez le directeur détenteur du pouvoir disciplinaire ; que les enfants ne rentraient dans le bureau que lorsqu'ils étaient punis ; que ce contexte disciplinaire ne pouvait que renforcer les craintes des enfants, assurer leur docilité, voir leur silence (jugement, pages 8 et 9) ;

"1 ) alors que le juge répressif ne peut déclarer le prévenu coupable des faits poursuivis qu'en répondant aux moyens de défense de celui-ci ;

"qu'ainsi, en se bornant à énoncer que les accusations des enfants constituent des preuves sérieuses de culpabilité, sans avoir examiné la pertinence du témoignage écrit d'Annie L... qui, ayant travaillé pendant 5 ans aux côtés du prévenu, déclarait n'avoir jamais constaté un comportement suspect chez ce dernier et être très surprise par ces accusations auxquelles elle disait ne pas croire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2 ) alors que l'atteinte sexuelle supposant, pour être constituée, un acte obscène, dont la connotation sexuelle doit être caractérisée, ne sauraient constituer l'infraction prévue aux articles 222-22, 222-29 et 222-30 du nouveau Code pénal de simples attouchements impudiques, tel le fait de caresser furtivement le sexe ou les fesses d'un mineur, par dessus ses vêtements, ou le fait de l'embrasser sur la joue ; qu'ainsi, en estimant le contraire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3 ) alors que pour déclarer un prévenu coupable d'agression sexuelle, au sens de l'article 222-22 du nouveau Code pénal, il appartient aux juges du fond de constater que l'atteinte sexuelle a été commise avec violence, contrainte, menace ou surprise, sans pouvoir déduire le caractère punissable de l'atteinte sexuelle du seul âge de la victime ;

"qu'ainsi, en se bornant à énoncer que Bernard X... aurait - par dessus les vêtements des enfants - caressé le sexe et les fesses des jeunes B..., C..., D... Duval, D... et A..., sans énoncer en quoi les faits litigieux auraient été commis par violence, contrainte, menace ou surprise, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges du fond, par des motifs exempts d'insuffisance, ont caractérisé, en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'agressions sexuelles aggravées dont ils ont déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen qui se borne à remettre en discussion l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente et un mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82868
Date de la décision : 31/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, 12 février 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 mar. 1999, pourvoi n°98-82868


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.82868
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