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24/03/1999 | FRANCE | N°97-85565

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 mars 1999, 97-85565


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle VIER et BARTHELEMY et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- A... Claudine, épouse X...,

contre l'arrê

t de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 25 septembre 1997, q...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle VIER et BARTHELEMY et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- A... Claudine, épouse X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 25 septembre 1997, qui, pour abus de confiance, faux et usage de faux, l'a condamnée à 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis, 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 314-1, 441-1 du Code pénal, 2, 3, 427, 434, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Claudine A..., épouse Y..., à la peine de 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis, a déclaré recevable et bien fondée la constitution de partie civile de la BNP et a condamné la prévenue à lui payer la somme de 5 512 545,93 francs ;

"aux motifs que, sur le préjudice, il résulte du mécanisme même des détournements, par lequel Claudine Y... a été amenée de fait à rémunérer, par prélèvements sur des fonds déposés en banque, les détournements qu'elle avait opérés, qu'elle a créé, comme l'a relevé l'expert, une chaîne sans fin faisant augmenter indéfiniment le montant des détournements, mais également du préjudice ; que la BNP n'avait pas d'autre choix, d'abord, que de constater le montant des détournements que Claudine Y... avait elle-même opérés pour honorer la rémunération des fonds détournés, et ensuite, que de dédommager ses clients non seulement de ces détournements matériels mais également des revenus acquis, et dans les termes de l'apparence créée - pour autant qu'elle soit contrôlable - par la fraude de sa salariée qui émettait de faux relevés de faux comptes ; qu'en effet, et même en l'absence de remboursement, Claudine Y... a été conduite, et à seule fin de dissimuler ses détournements, à émettre de faux titres et relevés faisant apparaître des crédits d'intérêts pouvant être très importants, à la mesure des très importantes sommes détournées sur les comptes de clients tels le docteur Z... en particulier ; que ces intérêts sont des pertes puisqu'ils n'ont en réalité pas couru, et constituent un préjudice subi par la banque du fait direct de l'infraction, qui s'ajoute aux détournements ; que le caractère nécessairement occulte des détournements, que la prévenue n'a évidemment pas pris soin de fixer dans une comptabilité occulte qui ne serait en toute hypothèse opposable à personne, a rendu impossible une détermination un tant soit peu certaine du dommage ; que les travaux de l'expert comptable, qui n'est parvenu à

établir que des fourchettes de dommage, démontrent l'impossibilité d'une détermination mathématiquement certaine du préjudice ; qu'il s'ensuit que c'est en vain que Claudine Y... sollicite devant la Cour l'organisation d'une expertise comptable, dont, par sa faute, rien ne permet d'espérer plus de certitude ; que seule la somme que la BNP a dû débourser pour faire disparaître les trous financiers creusés par la prévenue dans les comptes clients, peut être retenue comme représentative de son préjudice ; que c'est par son fait même que ces sommes ne peuvent être déterminées avec toute la rigueur mathématique et comptable que l'on pourrait souhaiter dans l'administration de la justice ; que, dans les cas les plus contestables, la banque a bien été contrainte, faute de pouvoir les contredire, d'admettre sur les titres et relevés que la prévenue avait elle-même émis à ses clients, ce dont elle est mal fondée à lui faire grief alors qu'elle en est l'auteur et qu'elle était alors mieux placée pour procéder à cette évaluation ; pour ce qui concerne le grief fait à la banque, il est bien certain que le banquier s'est trouvé en l'occurrence, face à ses clients, dans une situation pour le moins inconfortable, non seulement moralement mais encore bien plus comptablement, Claudine Y... ayant tout falsifié de leurs comptes ;

que la critique est donc dépourvue de fondement et n'a en réalité d'autre objet pour la prévenue que de tenter d'échapper aux conséquences de ses fautes en étendant à autrui sa propre turpitude ; qu'à l'examen des justifications que produit la partie civile, corroborées par les dépositions faites par les clients lors de l'enquête, il apparaît que la somme qu'elle a dû rembourser excède de quelques milliers de francs le montant de la somme visée à l'ordonnance du juge d'instruction, laquelle est la reprise de l'évaluation basse de l'expert, et constitue la représentation la plus exacte possible du préjudice, somme dont elle demande le paiement ; que cette demande ne souffrant pas de critique pertinente, il y sera en conséquence intégralement fait droit ;

"alors, d'une part, qu'il appartient aux juges du fond, s'ils constatent qu'ils sont insuffisamment informés, d'ordonner toute mesure d'instruction opportune qui sera ensuite contradictoirement débattue ; qu'en refusant d'ordonner les mesures d'instruction utiles à la manifestation de la vérité cependant qu'elle constatait l'impossibilité de déterminer de manière certaine le préjudice, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"alors, d'autre part, que Claudine Y... avait insisté sur le fait que le montant des remboursements opérés ne correspondait pas aux détournements effectués sur les comptes des clients et que l'expert n'avait jamais chiffré le préjudice réel des clients ; que, dès lors, en se bornant à faire état d'une détermination incertaine du préjudice sans répondre au moyen de la prévenue, ce qui démontrait la nécessité d'une nouvelle expertise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, de troisième part, qu'il appartient à la partie qui prétend avoir subi un préjudice de l'établir dans son existence et dans son quantum ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a constaté l'impossibilité de déterminer de façon certaine le préjudice, ne pouvait, sans s'en expliquer davantage, condamner Claudine Y... à payer à la BNP la somme de 5 512 545,93 francs ;

"alors, enfin, que la justification d'un préjudice ne suffit pas à autoriser l'exercice de l'action civile devant les tribunaux répressifs, que celle-ci ne peut être exercée que pour la réparation d'un préjudice certain qui trouve directement sa source dans l'infraction poursuivie ; qu'en condamnant Claudine Y... à payer à la BNP la somme de 5 512 545,93 francs tout en constatant que le préjudice était incertain, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-85565
Date de la décision : 24/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, 25 septembre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 mar. 1999, pourvoi n°97-85565


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.85565
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