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24/03/1999 | FRANCE | N°97-40422

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mars 1999, 97-40422


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Vortex Skyrock, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 28 novembre 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Emmanuel Y..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 27 janvier 1999, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Ransac, C

hagny, conseillers, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat génér...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Vortex Skyrock, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 28 novembre 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Emmanuel Y..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 27 janvier 1999, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Ransac, Chagny, conseillers, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Vortex Skyrock, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. Y... a été engagé le 15 décembre 1993 par la société Vortex Skyrock, exploitant la radio Skyrock, en qualité de chef d'antenne et a donné sa démission le 7 juin 1994 ;

Attendu que le 10 juin suivant, l'employeur a convoqué M. Y... à un entretien préalable à un licenciement et lui a notifié une mise à pied conservatoire ; que par lettre du 28 juin 1994, il lui notifiait qu'il mettait un terme à son préavis pour faute grave ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer au salarié des sommes au titre de l'indemnité de préavis et de dommages-intérêts pour rupture abusive de préavis, alors, selon le moyen, qu'une contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant qu'après avoir reçu la démission du salarié le 8 juin 1994, l'employeur ne s'était pas opposé à ce qu'il exécute son préavis et avait attendu trois semaines avant de prétendre que la relation contractuelle de travail ne pouvait se poursuivre jusqu'à son terme, tout en constatant que l'employeur avait interdit au salarié d'exécuter son préavis dès le 10 juin 1994, soit deux jours seulement après la réception de la démission, le temps nécessaire pour apprécier le comportement du salarié, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motif et ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors que l'employeur versait aux débats les attestations de deux témoins oculaires de l'incident ayant opposé M. Y... à Mlle X..., les rapports du commissariat de police du 1er arrondissement de Paris ainsi que le certificat médical du médecin ayant examiné Mlle X... le lendemain de l'incident ; que ces éléments étaient susceptibles d'établir que M. Y... avait volontairement porté des coups à Mlle X... ; qu'en se fondant uniquement sur la contradiction des attestations successives de Mlle X..., pour décider qu'un doute subsistait quant à la réalité des faits reprochés au salarié, sans rechercher si les autres éléments produits par l'employeur n'étaient pas de nature à établir la faute du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base

légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors que constitue une faute grave le fait pour un salarié de tenir en public des propos risquant de nuire à la réputation de son entreprise ; qu'en retenant que le fait pour M. Y... de s'être présenté, en présence d'un invité de marque et à l'antenne, comme "ex chef d'antenne" ne constituait pas une faute rendant impossible la poursuite du préavis, quand ce propos, qui laissait supposer qu'il existait une mauvaise ambiance au sein de l'équipe animant la radio, était de nature à jeter un certain discrédit sur l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L. 122-8 du Code du travail ;

Mais attendu qu'abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche du moyen, la cour d'appel a, d'une part, constaté que la lettre de rupture du 28 juin 1994, émanant de l'employeur, constituait non pas une lettre de licenciement, le salarié ayant démissionné le 7 juin, mais une lettre mettant fin au préavis ; qu'elle a, d'autre part, estimé que les griefs invoqués à l'appui de la rupture n'étaient pas établis ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié, en sus du reliquat de l'indemnité de préavis, une indemnité pour rupture abusive dudit préavis, alors, selon le moyen, que le droit du salarié à des dommages-intérêts pour rupture de son préavis suppose la constatation de circonstances particulières imputables à l'employeur et justifiant l'allocation de dommages-intérêts distincts de l'indemnité compensatrice de préavis ; que la décision de rompre le préavis en invoquant une faute grave du salarié ne constitue pas en elle-même une circonstance fautive, quand bien même la faute grave aurait été invoquée à tort par l'employeur ; qu'en condamnant l'employeur à des dommages-intérêts pour brusque rupture en cours de préavis, sans relever aucune circonstance fautive de l'employeur justifiant l'octroi de dommages-intérêts distincts de l'indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu le caractère brutal de la décision de rupture a, par là-même, caractérisé l'abus de droit commis par l'employeur, justifiant ainsi l'allocation de dommages-intérêts distinctes de ceux afférents à la rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le troisième moyen :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité à titre de contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence, les juges du fond ont retenu que le contrat de travail contenait une clause de non-concurrence au profit de l'employeur qui n'y avait pas renoncé ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la convention collective applicable ou le contrat de travail prévoyaient une contrepartie pécuniaire à l'interdiction de concurrence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu que la cassation encourue n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement dans celles de ses dispositions condamnant l'employeur à verser une indemnité au salarié à titre de contrepartie de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 28 novembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute la société Vortex Skyrock de sa demande d'indemnité pécuniaire au titre de la clause de non-concurrence ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 97-40422
Date de la décision : 24/03/1999
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Délai-congé - Rupture par l'employeur - Caractère brutal - Abus de droit - Indemnité.

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Clause de non-concurrence - Indemnité de non-concurrence - Recherche nécessaire.


Références :

Code civil 1134 et 1382

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), 28 novembre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mar. 1999, pourvoi n°97-40422


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.40422
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