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16/03/1999 | FRANCE | N°97-86048

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 mars 1999, 97-86048


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 1997, qui l'a condamné, pour infractions aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, à deux amendes de 2 500 francs chacune ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 février 1999 où étaient présents dans la formation prévu

e à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire :

M. Gomez président, M...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 1997, qui l'a condamné, pour infractions aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, à deux amendes de 2 500 francs chacune ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 février 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire :

M. Gomez président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, M. Milleville conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Géronimi ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 388 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 4 du protocole n° 7 de ladite convention, L. 231-6 et suivants et L. 263-2 du Code du travail, 156 et suivants du décret du 8 janvier 1965, 1134 et 1350 du Code civil, dénaturation du jugement du 6 mars 1996 passé en force de chose jugée, violation des droits de la défense, violation de l'autorité de la chose jugée et de la règle "non bis in idem", défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception tirée de la règle "non bis in idem" et de l'autorité de la chose jugée invoquée par le prévenu en raison de sa précédente condamnation pour les délits de blessures involontaires commis au préjudice de l'un de ses salariés et pour infraction au Code du travail ;

"aux motifs qu'en droit interne comme en droit international, la règle "non bis in idem", qui est une modalité d'application du principe du respect dû à l'autorité de la chose jugée, suppose que l'infraction pour laquelle une nouvelle poursuite est engagée est strictement identique à celle pour laquelle le prévenu a déjà été condamné ;

"qu'il n'est rien de tel en l'occurrence ;

"qu'en fait, le jour des faits, les frères Y..., tous deux salariés de Bernard X..., ont utilisé un échafaudage laissé sur un chantier par l'entreprise de maçonnerie pour effectuer des travaux de couverture lorsque Michel Y... a fait une chute de 8 mètres qui a provoqué des blessures engendrant une incapacité totale de travail supérieure à 3 mois ;

"que le contrôleur du travail a constaté que l'échafaudage ne respectait pas la réglementation spécifique à ce genre d'ouvrage étant dépourvu de garde-corps conformément aux prescriptions de l'article 157 du décret du 8 janvier 1965, que ses planchers n'étaient pas d'une largeur suffisante comme l'imposait l'alinéa 1er de l'article 114 du même décret et que ses côtés extérieurs ne disposaient pas non plus de garde-corps tels que prévus par l'article 115 dudit décret ;

"qu'ainsi les faits de la cause étaient susceptibles de donner matière à poursuites d'une part pour le délit de blessures involontaires et d'autre part pour le délit d'emploi de travailleurs sur échafaudage, le procès-verbal du contrôleur du travail et les éléments constants de l'enquête démontrant que deux salariés étaient concernés par ces dernières infractions ;

"qu'il s'est avéré que ces délits ont donné lieu à des poursuites séparées et que Bernard X... a été définitivement jugé pour s'être rendu coupable du délit de blessures involontaires avant d'être poursuivi pour les autres délits ;

"que cependant, s'agissant de délits distincts du premier délit mentionné, l'action publique était parfaitement recevable du chef des infractions aux dispositions du décret du 8 janvier 1965 ;

"qu'il en allait d'autant plus ainsi que les textes violés n'étaient pas les mêmes, que ce n'était qu'à titre surabondant qu'avaient été visés, lors de la poursuite du délit de blessures involontaires, les articles L. 263-2 et L. 263-2-1 du Code du travail ;

"que d'ailleurs, la prévention pour le délit de blessures involontaires faisait référence à l'absence de recours à des installations et matériels adaptés à des travaux de couverture, installations et matériels prescrits par des dispositions spécifiques du décret du 8 janvier 1965 différentes de celles de ce même décret qui régissent les échafaudages ;

"que précisément occupé à des travaux de couverture qui justifiaient qu'il bénéficiât d'un dispositif de sécurité collectif ou individuel, de nature à le préserver d'une chute, Michel Y... ne s'était pas vu imposer de porter de ceinture de sécurité, ce qui aurait évité sa chute et ses blessures ;

"que le recours à un échafaudage non conforme à plusieurs égards était constitutif d'autant d'infractions supplémentaires ;

"alors que, d'une part, s'agissant de poursuites exercées contre le prévenu poursuivi sur le fondement des articles L. 231-2, L. 263-2, L. 263-6, alinéa 1, du Code de travail et 156 à 163 du décret du 8 janvier 1965 pour avoir fait travailler deux salariés sur un échafaudage non conforme à ces dernières dispositions, la Cour, qui a constaté que ce même prévenu avait été précédemment condamné définitivement sur la base d'une citation délivrée pour blessures involontaires et infraction aux articles L. 262-1 et L. 263-2-1 du Code du travail, a violé l'autorité de la chose jugée par la première décision de condamnation ainsi que les dispositions de l'article 388 du Code de procédure pénale, en invoquant, pour refuser de faire droit à l'exception "non bis in idem" soulevée par ce prévenu, l'existence de différences entre les deux poursuites pour infraction au Code du travail, le visa des textes dudit Code ayant été effectué selon elle à titre surabondant lors des premières poursuites tout en constatant contradictoirement que ces mêmes poursuites se référaient à l'absence de recours à des installations et matériels adaptés à des travaux de couverture prescrits par les dispositions du décret du 8 janvier 1965 dont la méconnaissance était également invoquée dans le cadre des poursuites dont elle était saisie ;

"alors que, d'autre part, en affirmant que la condamnation définitive du prévenu avait été prononcée pour d'autres infractions aux dispositions du décret du 8 janvier 1965 que celles faisant l'objet des poursuites dont elle était saisie et notamment pour défaut de port d'une ceinture de sécurité, la Cour a dénaturé les éléments de cette précédente procédure qui ne faisait aucune allusion à une telle infraction, mais reprochait seulement au prévenu une absence de recours à des installations et matériels adaptés à des travaux de couverture, installations et matériels constitués par des échafaudages prévus par les mêmes dispositions du décret du 8 janvier 1965 que celles visées par les poursuites dont elle était saisie" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme, que le 9 septembre 1994, un salarié de la société dirigée par Bernard X... est tombé d'un échafaudage alors qu'il était occupé, avec un autre salarié, à poser des tuiles sur un toit ; que Bernard X... a été poursuivi pour blessures involontaires dans le cadre du travail, et par jugement du 6 mars 1996, condamné à trois mois d'emprisonnement ; qu'à la suite de ce jugement devenu définitif, Bernard X... a été à nouveau poursuivi, par citation du ministère public, pour avoir, dans les circonstances de temps et de lieu susvisées, enfreint la réglementation relative à la sécurité de deux salariés, prévue par les articles 160 et suivants du décret du 8 janvier 1965 ;

Attendu que, pour écarter l'exception de chose jugée invoquée par le prévenu à raison du jugement du 6 mars 1996, les juges retiennent que les incriminations de blessures involontaires et de violation de la réglementation relative à l'hygiène et la sécurité des salariés, tendent à la protection d'intérêts collectifs ou individuels distincts, et peuvent dès lors être poursuivies aussi bien simultanément que successivement, le cumul des peines étant prévu dans les limites définies à l'article L. 263-2 du Code du travail ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que les infractions poursuivies successivement étaient en concours réel, la cour d'appel, en dépit des motifs erronés mais surabondants visés à la dernière branche du moyen, n'encourt pas les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 263-2 et suivants du Code du travail, 156 et suivants du décret du 8 janvier 1965, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable d'avoir fait travailler deux salariés sur un échafaudage non conforme aux prescriptions des articles 156 à 163 du décret du 8 janvier 1965 et l'a condamné au paiement de deux amendes ;

"aux motifs que présent sur les lieux et ayant expressément autorisé le recours à l'échafaudage incriminé, le prévenu se devait de veiller au respect des prescriptions applicables à ce genre d'installation dont il ne conteste pas les insuffisances ;

"que deux salariés étant concernés, Bernard X... a été valablement condamné à deux peines d'amende, sanctions en tout état de cause de nature différente de la peine d'emprisonnement prononcée contre lui pour blessures involontaires ;

"alors que, les juges du fond n'ayant pas constaté que deux salariés du prévenu aient utilisé l'échafaudage défectueux et le procès-verbal servant de base aux poursuites précisant comme l'arrêt attaqué que seul l'ouvrier qui s'était blessé en tombant de cet échafaudage, y travaillait pendant que son copréposé se trouvait sur un toit, ce qui excluait qu'il ait pu en même temps être sur l'échafaudage, la Cour a privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions de l'article L. 263-2 du Code du travail en infligeant deux amendes au prévenu" ;

Attendu que le moyen qui conteste pour la première fois devant la Cour de Cassation la présence de deux salariés sur l'échafaudage litigieux, est nouveau, mélangé de fait, et comme tel, irrecevable ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-86048
Date de la décision : 16/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(sur le premier moyen) CHOSE JUGEE - Non bis in idem - Blessures involontaires - Violation de la réglementation relative à l'hygiène et à la sécurité des salariés - Poursuites distinctes.


Références :

Code de procédure pénale 6
Code du travail L231-6 et s., L262-2
Décret du 08 janvier 1965 art. 156 et s.

Décision attaquée : Cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, 16 octobre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 mar. 1999, pourvoi n°97-86048


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.86048
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