La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/1999 | FRANCE | N°98-82018

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 mars 1999, 98-82018


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, du 16 mars 1998, qui, pour homicide involontaire et infraction aux règles concernant la sécurité du travail, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, à 30 000 francs d'amende, et a reçu la partie civile en son intervention au soutien de l'action publique ;

La COUR, statuant a

près débats en l'audience publique du 26 janvier 1999 où étaient présents dans la formati...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, du 16 mars 1998, qui, pour homicide involontaire et infraction aux règles concernant la sécurité du travail, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, à 30 000 francs d'amende, et a reçu la partie civile en son intervention au soutien de l'action publique ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 janvier 1999 où étaient présents dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire :

M. Gomez président, M. Grapinet conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. le Foyer de Costil ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 263-2 du Code du travail, 156 à 163 du décret n 65-48 du 8 janvier 1965, 121-1, 121-3 et 221-6 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable d'homicide involontaire sur la personne d'Abdelkader Y..., dans le cadre du travail, et de l'infraction aux règles de sécurité relatives aux travaux sur les toitures, et l'a condamné de ces chefs ;

"aux motifs propres que Bernard X..., qui n'avait pas délégué ses pouvoirs en matière de sécurité, a manifestement failli à ses obligations, en s'abstenant d'imposer à Abdelkader Y... l'utilisation en toute circonstance d'un dispositif individuel ou collectif de protection ; que cette faute, sans laquelle Abdelkader Y..., retenu par un dispositif de protection, n'aurait pu chuter, a eu pour conséquence le décès de ce dernier ;

"et aux motifs adoptés qu'il n'a pu être vérifié que le matériel de sécurité se trouvait effectivement à la disposition d'Abdelkader Y..., le véhicule de service ayant été ramené immédiatement après l'accident ; que Bernard X..., en sa qualité de chef d'entreprise, était tenu de veiller personnellement et à tous moments à ce que soient strictement respectées les conditions de sécurité réglementairement prévues ;

"alors, d'une part, que le délit d'homicide involontaire suppose nécessairement une faute imputable personnellement au prévenu ; qu'en déduisant la responsabilité pénale de Bernard X... du seul fait de la survenance d'un accident du travail dans l'entreprise dont il est le président-directeur général, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, qu'il appartient à la partie poursuivante d'établir la culpabilité du prévenu, et non à ce dernier d'établir son innocence ; qu'en reprochant à Bernard X... de ne pas avoir établi que le matériel de sécurité avait été mis à la disposition de la victime et se trouvait, le jour de l'accident, dans le véhicule de service, la cour d'appel a violé les textes susvisés, et méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

"alors, de troisième part, qu'il résulte du témoignage devant la cour d'appel de Messaoud Zabar, coéquipier d'Abdelkader Y... le jour de l'accident, que l'équipe disposait toujours dans le véhicule de service du matériel de sécurité nécessaire (ligne de vie, harnais, chaussures antidérapantes), et que ce matériel se trouvait dans le véhicule le jour de l'accident ; qu'en retenant, néanmoins, une faute du chef d'entreprise, résultant d'un défaut de mise à disposition du matériel de sécurité, au motif que la présence du matériel de sécurité dans le véhicule de service n'a pu être établie, sans s'expliquer sur ce témoignage essentiel de Messaoud Z... démontrant le contraire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

"alors, de quatrième part, qu'en s'abstenant de rechercher si Bernard X..., en mettant ainsi à la disposition des ramoneurs le matériel de sécurité nécessaire se trouvant en permanence dans le véhicule de service utilisé par eux, et en leur rappelant la nécessité de s'en servir, n'avait pas accompli les diligences normales lui incombant, au sens de l'article 121-3 du Code pénal, pour assurer la sécurité des travailleurs, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;

"alors, de cinquième part, qu'il résulte de la déposition de la veuve d'Abdelkader Y... que ce dernier lui avait dit qu'il s'attachait toujours, ce qui démontre qu'il était parfaitement conscient de la nécessité de cette mesure, même s'il y dérogeait parfois ; qu'en imputant à faute au chef d'entreprise de ne pas s'interroger sur l'habitude d'Abdelkader Y... de ne s'attacher que lorsqu'il le jugeait utile, et de ne pas lui avoir imposé l'utilisation du matériel de sécurité, sans préciser en quoi Bernard X... était à même de connaître l'habitude fâcheuse d'Abdelkader Y... que l'intéressé a pu lui cacher comme il la cachait à son épouse, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;

"alors, de sixième part, que s'il appartient au chef d'entreprise de veiller personnellement à la stricte et constante exécution des règlements concernant la sécurité des travailleurs, celui-ci ne peut matériellement exercer cette surveillance à tous moments ; que sur ce point, Bernard X... faisait valoir que l'entreprise effectuait de quatre à dix opérations de ramonage par jour, de sorte qu'il ne pouvait, matériellement, vérifier à chaque fois et sur chaque chantier, si un travailleur ne décidait pas au dernier moment de monter sans le matériel de sécurité mis à sa disposition ;

qu'en retenant, néanmoins, une faute du chef d'entreprise, sans répondre à cette articulation essentielle, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;

"alors, enfin, que le délit d'homicide involontaire suppose un lien certain de causalité entre le fait du prévenu et le dommage ; qu'il résulte du témoignage de Messaoud Z..., qu'Abdelkader Y..., qui disposait, dans son véhicule de service, du matériel de sécurité nécessaire, a décidé, au dernier moment, de son propre chef, et en dehors de toute possibilité de contrôle par le chef d'entreprise, de ne pas s'en servir ; qu'il s'ensuit que la faute d'imprudence de la victime était la cause exclusive de l'accident mortel ; qu'en estimant le contraire, sans s'expliquer sur le témoignage de Messaoud Z..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction et répondant aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé, en tous ses éléments constitutifs, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et déclaré la partie civile recevable en sa constitution de partie civile aux seules fins de corroborer l'action publique ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82018
Date de la décision : 09/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11ème chambre, 16 mars 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 mar. 1999, pourvoi n°98-82018


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.82018
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award