AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Patrice,
- LA COMPAGNIE GENERALI FRANCE ASSURANCES,
partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 7 mai 1997, qui, dans la procédure suivie contre le premier pour les délits d'homicide involontaire et de blessures involontaires, et pour les contraventions de blessures involontaires et de défaut de maîtrise de la vitesse du véhicule, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 janvier 1999 où étaient présents : M. Gomez président, M. Blondet conseiller rapporteur, MM. Roman, Grapinet, Mistral, Ruyssen, Mme Mazars, M. Palisse conseillers de la chambre, Mmes Ferrari, Agostini conseillers référendaires ;
Avocat général : M. le Foyer de Costil ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de la société civile professionnelle Le BRET et LAUGIER, la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, L.211-9, L.211-13 du Code des assurances (articles 12 et 16 de la loi du 5 juillet 1985), 2, 3, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris ayant dit que toutes les indemnités allouées à Mme Veuve Z..., tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses deux filles mineures Elise et Caroline, en réparation de leurs préjudices corporels, économiques et moraux, produiront intérêt de plein droit et au double du taux légal à compter du 28 décembre 1995 jusqu'au jour où le jugement deviendra définitif en application de l'article L.211-13 du Code des assurances ;
"aux motifs adoptés du jugement que, sur l'application de l'article L. 211-13 du Code des assurances, il n'est pas contesté que la Cie LA CONCORDE n' a présenté aucune offre dans les délais de l'article L. 211-9 du Code des assurances ; qu'il convient en conséquence de dire que toutes les indemnités allouées à Mme Veuve Z..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses deux filles mineures Elise et Caroline, en réparation des préjudices corporels, moraux et économiques, produiront intérêts de plein droit au double du taux légal à compter du 28 décembre 1995 et jusqu'au jour où le jugement deviendra définitif en application de l'article L. 211-13 du Code des assurances ;
"alors, d'une part, que la pénalité prévue par l'article L. 211-13 du Code des assurances à l'encontre de l'assureur, lorsqu'une offre d'indemnité n'a pas été présentée à la victime dans les délais impartis, peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur ; que la cour d'appel, qui s'est bornée à confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la majoration des intérêts des indemnités allouées à Mme veuve Z... en son nom personnel et ès-qualités, sans répondre aux conclusions d'appel de la Cie La Concorde faisant valoir qu'elle avait été mise dans l'impossibilité de faire des offres d'indemnisation en raison de la non-transmission dans le délai de huit mois par le greffe du tribunal correctionnel de la copie du procès-verbal de police, et que cette non-transmission était constitutive de circonstances non imputables à la compagnie, justifiant la demande de réduction desdites pénalités, a entaché sa décision d'un défaut de motivation ;
"alors, d'autre part, que, en cas de pluralité de véhicules, et s'il y a plusieurs assureurs, l'offre est faite par l'assureur mandaté par les autres ; que la Cie La Concorde avait invoqué aussi dans ses conclusions d'appel l'inapplication totale de toute pénalité de retard pour absence d'offre, en l'état du mandat dûment accepté par le Gan afin de présenter une offre aux passagers de son assuré, pour Dominique Z... ; que la cour d'appel, qui n'a pas répondu aussi à ces conclusions soutenant qu'il ne saurait être reproché à La Concorde de n'avoir présenté acune offre d'indemnisation en réparation du préjudice corporel de Mme Z... et de ses filles, n'a pas motivé sa décision, en violation des textes précités ;
"alors, enfin, que les pénalités prévues par l'article L. 211-13 du Code des assurances ne courent que jusqu'au jour de l'offre, ou, à défaut, jusqu'au jour du jugement devenu définitif ; que, dès lors, la cour d'appel, faute de rechercher si les offres formulées par la Cie La Concorde par voie de conclusions étaient satisfaisantes, n'a pas justifié sa décision faisant courir lesdites pénalités jusqu'au jour où le jugement serait définitif ou devait sinon surseoir à statuer sur le chef des pénalités, en l'état du renvoi ordonné quant à la fixation du préjudice corporel" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que Marie-Claude Y... épouse Z..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineures, et les époux Z..., se sont constitués parties civiles dans les poursuites exercées contre Patrice X... à la suite de l'accident de la circulation du 21 avril 1995 ayant causé la mort de leur époux et fils, Dominique Z..., ainsi que des blessures à Marie-Claude Z... et à ses enfants, passagers du véhicule de celui-ci ;
Sur le moyen pris en sa deuxième branche ;
Attendu que, pour dire que les indemnités allouées produiront intérêts au double du taux légal, du 28 décembre 1995 jusqu'au jour où leur décision deviendra définitive, les juges du fond relèvent qu'il n'est pas contesté que la compagnie La Concorde n'a présenté aucune offre d'indemnité dans les délais de l'article L. 211-9 du Code des assurances ;
Qu'il se déduit de ces énonciations que la cour d'appel a estimé non rapportée la preuve d'un mandat donné à la Compagnie GAN ;
Sur le moyen pris en sa troisième branche ;
Attendu que la Compagnie La Concorde n'ayant pas soutenu devant les juges d'appel que ses conclusions constituaient une offre d'indemnité, répondant aux prévisions de l'article L. 211-9 du Code des assurances, de nature à faire cesser la majoration des intérêts au taux légal, le moyen pris en cette branche, nouveau et mélangé de fait, est irrecevable ;
Sur le moyen pris en sa première branche ;
Attendu que les juges, qui n'avaient pas à entrer dans le détail de l'argumentation des appelants, n'ont, après avoir constaté qu'aucune offre d'indemnité n'avait été faite à la victime dans les délais prescrits, relevé aucune circonstance non imputable à l'assureur de nature à justifier une réduction de la pénalité encourue ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;