AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres (CRCAM), aux droits de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Charente-Maritime, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1996 par la cour d'appel de Poitiers (Chambre civile, 2e Section), au profit de M. Jean-Michel X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 1er décembre 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Sempère, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Sempère, conseiller, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres, de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de M. X..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. X... a contracté auprès de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Charente-Maritime plusieurs prêts ; qu'après délivrance par la CRCAM de la Charente-Maritime d'un commandement de payer, M. X... a assigné celle-ci en paiement de différentes sommes, prélevées à tort sur son compte bancaire, et en mainlevée des inscriptions d'hypothèques prises en garantie des prêts ;
que la cour d'appel, après avoir donné acte à la Caisse de Crédit agricole mutuel de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres de son intervention, en lieu et place de la CRCAM de la Charente-Maritime, a confirmé la décision des premiers juges en ce qu'ils avaient fixé à la somme de 16 370,04 francs la créance de la CRCAM de la Charente-Maritime, constaté que M. X... avait consigné la somme de 30 000 francs pour désintéresser la CRCAM et ordonné la mainlevée des inscriptions hypothécaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la CRCAM de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors que, selon le moyen, en affirmant qu'elle ne justifiait pas de sa créance, alors qu'elle produisait aux débats, outre un décompte du 29 octobre 1990, la situation de M. X... au 17 mars 1993, la cour d'appel n'a pas pris en considération ces documents, privant sa décision de base légale ;
Mais attendu que la cour d'appel a souverainement relevé que la CRCAM ne produisait pas de documents susceptibles de remettre en cause l'évaluation faite par les premiers juges ; que le moyen manque en fait ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1291 du Code civil, ensemble l'article 621 du Code rural ;
Attendu que la compensation n'a lieu qu'entre deux dettes qui sont exigibles ;
Attendu qu'après avoir constaté que la créance de la CRCAM de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres était de 64 131,98 francs ,la cour d'appel a dit que cette créance devait être de plein droit compensée avec le montant des parts sociales dont M. X... était fondé à réclamer le remboursement ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que la créance de M. X... n'était pas exigible en vertu des dispositions de l'article 621 du Code rural dont il résulte que les sociétaire des Caisses de Crédit agricole mutuel ne peuvent être libérés de leur engagement envers celle-ci qu'après liquidation de leurs obligations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 562 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la cour d'appel a énoncé que l'appel de la Caisse ne s'étendait pas aux dispositions du jugement relatives à la main levée des hypothèques ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'appel de la CRCAM de la Charente-Maritime et des Deux-Sèvres n'était pas limité et que les conclusions de l'appelant tendaient à l'infirmation du jugement sans restriction, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qui concerne la fixation à 16 370,04 francs du montant de la créance de la CRCAM, l'arrêt rendu le 23 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.