AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de Me COPPER-ROYER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- CHAUSSEE Victor, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 12 novembre 1997, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée des chefs de faux en écriture publique et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-4, 441-10 du Code pénal, 145 à 149 de l'ancien Code pénal, 575, alinéa 2, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance en date du 23 avril 1997 disant qu'il ne résultait pas de l'information charges suffisantes contre quiconque de s'être rendu coupable du délit de faux et usage de faux en écriture publique et déclarant n'y avoir lieu à suivre en l'état ;
"aux motifs qu' "il résulte de l'enquête et de l'information présomption des faits suivants :
"Depuis une vingtaine d'années, Victor X..., retraité de l'Armée, entretient un litige avec son voisin Jean-Pierre Y... auquel il reproche d'avoir effectué des travaux de surélévation du sol ayant causé un dommage à sa propriété ;
"Ce conflit a occupé tous les niveaux des juridictions pour aboutir à un arrêt rendu le 10 mai 1995 par la troisième chambre de la Cour de Cassation qui a constaté que le préjudice allégué par Victor X... n'était pas justifié.
"Cependant, dès le 16 février 1994, l'intéressé avait déposé plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction de Pontoise au motif que, selon lui, Jean-Pierre Y... avait, dans le cours des procédures, fourni un faux document intitulé "plan cadastral ou officiel de l'établissement d'aménagement de Cergy-Pontoise qui lui avait permis d'obtenir gain de cause ;
"... que, malgré les volumineuses et coûteuses documentations que Victor X... a cru devoir verser au dossier d'instruction pour tenter de démontrer le bien-fondé de ses accusations, ni l'enquête, ni les expertises, ni l'information n'ont permis de démontrer l'existence d'une quelconque falsification du plan cadastral en cause" (arrêt p. 3) ;
"alors que, dans son mémoire déposé devant la chambre d'accusation, Victor X... demandait la mise en évidence des courbes de niveaux résultant des documents publics ministériels et authentiques et celles obtenues par application du plan fourni par Jean-Pierre Y... ; que leur comparaison faisait apparaître des divergences considérables sur la pente des terrains contigus ; que la chambre d'accusation se devait de fournir des explications sur ces données opposées avant d'écarter toute hypothèse de falsification ; qu'elle n'a pas répondu à l'articulation essentielle de Victor X... et qu'elle a violé les textes susvisés" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-4, 441-10 du Code pénal, 145 à 149 de l'ancien Code pénal, 575, alinéa 2, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance en date du 23 avril 1997, disant qu'il ne résultait pas de l'information charges suffisantes contre quiconque de s'être rendu coupable du délit de faux et usage de faux en écriture publique et déclarant n'y avoir lieu à suivre en l'état ;
"aux mêmes motifs que ceux précédemment cités ;
"alors que l'arrêt attaqué devait contenir un exposé des faits de la cause ; que le rappel des plus succincts du "conflit", contenu dans la décision, passe sous silence la procédure d'élaboration des plans concernant les parcelles des parties ; que le respect de cette procédure ne pouvait normalement conduire à des vices de construction ; que ce fait clairement articulé dans le mémoire de Victor X... se trouvait au centre du litige dont la chambre d'accusation, pas son exposé incomplet, a méconnu l'objet, empêchant tout contrôle de la Cour de Cassation ; que la chambre d'accusation a violé, sur ce point encore, les dispositions visées au moyen" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-4, 441-10 du Code pénal, 145 à 149 de l'ancien Code pénal, 575, alinéa 2, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance en date du 23 avril 1997, disant qu'il ne résultait pas de l'information charges suffisantes contre quiconque de s'être rendu coupable du délit de faux et usage de faux en écriture publique et déclarant n'y avoir lieu à suivre en l'état ;
"alors que Victor X... invoquait, dans sa plainte, l'altération de plusieurs plans comme le plan du POS et son fond de plan, sans s'arrêter uniquement au plan cadastral ou officiel de l'établissement d'aménagement de Cergy-Pontoise ; qu'il dénonçait également les manoeuvres diverses de géomètres et intervenants en dehors de celles de Jean-Pierre Y... ; que la chambre d'accusation s'est limitée à un seul motif relatif à l'absence de falsification du seul plan cadastral ou officiel de l'établissement d'aménagement de Cergy-Pontoise ; que la chambre d'accusation n'a consacré aucune motivation à la falsification d'autres plans ou documents, pas plus qu'à l'usage de ces pièces ou aux agissements relatés dans la plainte ; que, par cette absence de motifs sur les chefs d'inculpation contenus dans cette plainte, l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale ;
"et que Victor X... avait également saisi le magistrat instructeur de cinq autres plaintes relatant des faits de faux, usages de faux et diverses manoeuvres frauduleuses et agissements délictueux imputables tant à Jean-Pierre Y... qu'à des personnes manifestement complices ; que la chambre d'accusation ne les a mentionnées dans aucun motifs ; que l'arrêt attaqué ne satisfait donc pas aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits dénoncés dans la plainte, a énoncé les motifs de fait et de droit dont elle a déduit qu'il ne résultait pas de l'information, qu'elle a estimée complète, charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les infractions reprochées ;
Que les moyens, qui se bornent à contester ces motifs, ne comportent aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son seul pourvoi contre l'arrêt de la chambre d'accusation, en l'absence de recours du ministère public ;
D'où il suit que ces moyens sont irrecevables et qu'il en est de même du pourvoi ;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Sassoust conseiller rapporteur, MM. Roman, Aldebert, Grapinet, Mistral, Blondet, Ruysen, Mme Mazars conseillers de la chambre ;
Avocat général : M. Cotte ;
Greffier de chambre : Mme Ely ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;