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12/11/1998 | FRANCE | N°97-85325

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 novembre 1998, 97-85325


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- BASTIEN Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, du 11 septembre 1997 qui, pour abus de biens sociaux, l'a condamné à 12 mois d

'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Su...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- BASTIEN Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, du 11 septembre 1997 qui, pour abus de biens sociaux, l'a condamné à 12 mois d'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, 437 de la loi n° 66.537 du 24 juillet 1966, 111-4, 121-5 du Code pénal, 388, 512, 522, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a pénalement condamné le requérant du chef d'abus de biens sociaux pour avoir, en sa qualité de président-directeur général de la S.A Uni Air International, facturé au profit de la société Hélipart des frais de holding injustifiés et excessifs pour un montant de 5,3 MF d'avril 1990 au 31 mars 1991 ;

"aux motifs que, sur la facturation au profit de la société Hélipart de frais de holding injustifiés et excessifs pour un montant de 5,3 MF d'avril 1990 au 31 mars 1991, c'est la société Hélipart qui a facturé ces frais, lesquels n'ont pas tous été effectivement payés ;

qu'Hélipart n'a reçu, directement ou par compensation que 4,6 MF ;

que Joël X... fait valoir avant toute défense au fond que la condamnation, telle qu'elle est libellée, ne peut caractériser l'infraction d'abus de biens sociaux, Uni Air International n'ayant jamais "facturé" ces frais, mais payé ceux-ci ; que le moyen est sans portée dès lors qu'il est clair que c'est le paiement par Uni Air International, dont Joël X... est le président-directeur général, de la facturation adressée par Hélipart, dont il est aussi le président-directeur général, qui serait susceptible de caractériser l'abus de biens sociaux reproché, la rédaction retenue de l'incrimination constituant une sorte de télescopage des faits qui est induit par l'unicité des directions, Joël X... maîtrisant tant la facturation chez l'un que le paiement chez l'autre, en deux qualités juridiques certes différentes, de sorte qu'au niveau intentionnel, facturation et paiement présenteraient le même caractère d'abus ;

que cette rédaction incertaine n'introduit cependant aucune ambiguïté sur le contenu exact des faits soumis à l'appréciation des juges du fond ; (...) qu'au moment de la facturation litigieuse, effectuée dès le mois de janvier 1990, l'existence d'un groupe fortement structuré n'est pas encore un fait d'actualité ; (...) que l'existence de contreparties équilibrées n'est nullement démontrée au moment où les frais sont facturés, alors que ceux exposés dépendent d'événements lointains, dont la mise en place n'est pas entamée, et qui sont donc totalement hypothétiques ; (...) que les efforts financiers ainsi demandés à Uni Air International qui rencontrait alors des difficultés d'exploitation et subissait des pertes, n'étaient pas compatibles avec ses possibilités financières (...) ; qu'il est ainsi établi que par le paiement de ces frais de holding, Joël X... a bien abusé, au bénéfice de la SA Hélipart et au préjudice de la SA Uni Air International, des biens sociaux de celle-ci (arrêt : analyse p. 8 à 13) ;

"alors que, d'une part, la prévention d'abus de biens sociaux portant exclusivement en l'espèce sur des faits de facturation reprochés à Joël X... en sa qualité de président-directeur général de la SA Uni Air International, la Cour ne pouvait condamner le requérant pour des paiements effectués par la société Hélipart sans adjoindre à la prévention des faits nouveaux sur lesquels le prévenu n'a pas été préalablement invité à s'expliquer ; qu'ainsi, la Cour a méconnu sa propre saisine ensemble les droits de la défense ;

"alors que, d'autre part, un simple fait de facturation ne saurait être incriminé au titre d'un abus de biens sociaux, infraction matérielle dont la tentative n'est pas punissable ;

"alors, en tout état de cause qu'en affirmant que la facturation de frais de Holding à hauteur de 5,3 MF était excessive en l'état d'une contrepartie de 4,6 MF, lors même qu'elle a relevé que les factures correspondant à 5,3 MF n'avaient pas toutes été réglées, la Cour n'a pas établi que les paiements réalisés eussent été eux-mêmes excessifs au regard de la contrepartie précitée, privant ainsi sa décision de motifs sur la prévention modifiée retenue à l'encontre du requérant" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, 437 de la loi n° 66.537 du 24 juillet 1966, 111-4, 121-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que, la cour d'appel a pénalement condamné le requérant du chef d'abus de biens sociaux à raison de deux retraits dénués de justificatifs ;

"aux motifs, sur les deux retraits de 27 300 francs et 55 000 francs, qu'il s'agit de retraits effectués en pesetas sur des comptes étrangers (27 000 francs sur un compte étranger d'UAI, et virement d'un compte UAI au profit d'Hélibéria) par Joël X..., qui n'ont donné lieu à aucun justificatif, mais qui ont ensuite fait l'objet d'écritures comptables, le premier au débit du compte Hélipart dans Uni Air (alors créditeur du fait de frais de siège impayés), ce qui a permis d'annuler le solde débiteur du compte courant de Joël X... ; que, selon Joël X..., le premier retrait concernait des frais de voyage, et il dit avoir demandé, à défaut de justificatif, de facturer à Hélipart ; que Joël X... ne discute pas précisément sa culpabilité de ce chef, faisant valoir que l'écriture comptable des frais qui sert de fondement à l'incrimination est illogique, s'agissant de frais de déplacement qui auraient dû se trouver facturés à la holding, et n'a été passée, à son insu, que peu avant le dépôt de bilan ; que la culpabilité doit être retenue dès lors que les retraits en question ont été effectués par lui dans un intérêt personnel et sans aucune justification, alors que la situation de trésorerie de la société était extrêmement précaire ;

"alors qu'un défaut de "régularisation comptable" n'est pas en soi une circonstance caractéristique d'un abus de biens sociaux ; qu'il appartient aux juges du fond de préciser si et en quoi les dépenses mises à la charge d'une société sont contraires à l'intérêt social de celle-ci ou du groupe dont elle fait partie ; qu'en statuant par voie d'affirmation, la Cour a privé sa décision de motifs et a méconnu les règles gouvernant la charge de la preuve" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, 437 de la loi n° 66.537 du 24 juillet 1966, 111-4, 121-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que, la cour d'appel a pénalement condamné le requérant du chef d'abus de biens sociaux à raison de deux vols mis à la charge d'Uni Air International ;

"aux motifs, sur deux vols non réglés, les 5 février 1991 et 5 juillet 1991 pour un montant total de 78 401,23 francs, que le premier concerne le convoyage d'une corvette Hélipart pour le compte de celle-ci, mis à la charge d'Uni Air International sans facture de régularisation ; que le second concerne un voyage sur un appareil Uni Air au profit d'Héli Equipement dont la facture a été annulée ensuite pour devenir une facture au nom d'Hélipart ; que, selon M. Marty, Joël X... aurait invoqué une compensation avec les frais de siège impayés, de sorte que la facture de 40 KF en est demeurée impayée ; que, selon les responsables d'UAI, c'est Joël X... lui-même qui a donné les instructions pour la facturation de ces vols ; que Joël X... fait plaider sur ce point, qu'il a, tout au long de sa carrière, toujours payé ses déplacements ;

le premier vol était de prospection auprès d'un partenaire d'UAI, le second concerne son propre appareil ; que la Cour devrait, selon la défense, estimer n'être pas en présence d'une infraction grave ; que la culpabilité doit être retenue dès lors que ces frais, qui n'étaient pas à la charge d'UAI, lui ont néanmoins été facturés sans aucune contrepartie pour elle, alors même que ses propres frais de fonctionnement étaient déjà excessivement lourds, et ce, soit au bénéfice personnel de Joël X..., soit au bénéfice d'une autre société du groupe ;

"alors qu'un défaut de "régularisation comptable" n'est pas en soi une circonstance caractéristique d'un abus de biens sociaux ; qu'après avoir relevé que chacun des vols avait un intérêt pour les sociétés Hélipart et Héli-Equipement appartenant au groupe dont faisait partie Uni Air International, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction prêtant un intérêt personnel au requérant pour l'un de ces vols et, en tout état de cause, n'a nullement caractérisé l'existence de dépenses contraires à l'intérêt du groupe" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et sans excéder sa saisine, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'abus de biens sociaux dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Challe conseiller rapporteur, MM. Schumacher, Martin, Pibouleau, Roger conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac, Mme de la Lance, M. Soulard conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Lucas ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-85325
Date de la décision : 12/11/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, 11 septembre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 nov. 1998, pourvoi n°97-85325


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.85325
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