AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Jacqueline X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 30 janvier 1996 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), au profit de la société Evreux Distribution, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 juillet 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Bouret, conseillers, M. Frouin, Mme Andrich, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme X... agent d'entretien au service de la société Evreux Distribution depuis le 13 juillet 1987 a été licenciée le 27 octobre 1993 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes diverses et qu'elle a présenté des demandes nouvelles en cause d'appel ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que son licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que la cour d'appel a retenu à tort que la salariée avait outragé une cliente ainsi qu'il résultait de l'attestation d'une employée du magasin ;
Mais attendu que la cour d'appel a apprécié souverainement la valeur des preuves discutées contradictoirement devant elle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 16, 946 du nouveau Code de procédure civile et R. 516-0 du Code du travail ;
Attendu que le juge doit en toute circonstance faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que lorsque la procédure est orale, le juge ne peut déclarer irrecevable les prétentions des parties formulées au cours de l'audience et que, s'il y a lieu, il renvoie l'affaire à une prochaine audience ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes nouvelles présentées par la salariée en cause d'appel la cour d'appel a énoncé que faute pour l'employeur d'avoir été mis à même de connaître ces prétentions dans un délai raisonnable et de pouvoir y répondre, celles-ci doivent être écartées sans qu'il y ait lieu d'ordonner le renvoi de l'affaire ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans celles de ses dispositions déboutant la salariée de ses demandes de rappel de salaires pendant les mises à pied prononcées et d'indemnité faute pour l'employeur de lui avoir accordé un temps suffisant pour recherche d'emploi pendant le préavis, l'arrêt rendu le 30 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Laisse à chaque partie la charge respective de ses dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.