AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de X... de MASSIAC, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN et de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Abdeslam,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13ème chambre, en date du 26 septembre 1997, qui, pour recel de trafic de stupéfiants, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement et à l'interdiction du territoire français ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 321 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Abdeslam Y... coupable d'avoir sciemment recelé des numéraires qu'il savait provenir du trafic de stupéfiants commis par Ali Y... et divers objets provenant de vols ;
"aux motifs qu' "en l'état de ces éléments : connaissance du trafic, hébergement d'Ali Y... en situation irrégulière, présence de divers documents en rapport avec le trafic, mensonges réitérés sur l'identité d'Ali et la provenance des fonds et numéraires, Abdeslam Y... ne saurait prétendre qu'il ignorait la présence à son domicile de numéraires provenant du trafic de stupéfiants et d'objets d'origine frauduleuse" ;
"alors, d'une part, que les juges du fond, qui constatèrent que l'auteur du trafic de stupéfiants qui constituait l'infraction principale, était reçu et hébergé au domicile d'Abdeslam Y..., son frère, ne pouvaient déclarer ce dernier coupable du délit de recel de numéraires provenant du trafic dont s'agit sans indiquer qu'Abdeslam Y... avait personnellement détenu les fonds provenant du trafic, participant ainsi activement au délit, et non seulement qu'il ne pouvait ignorer leur présence à son domicile où son frère les y avait cachés ;
"alors, d'autre part, qu'il appartenait à la partie poursuivante de justifier des éléments constitutifs des délits de recel ; qu'en déduisant de la seule impossibilité par le prévenu d'expliquer l'origine d'objets découverts chez lui, l'origine frauduleuse de ces objets qui n'était pas autrement établie, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve ;
"alors, enfin, que, faute de constater qu'Abdeslam Y... aurait en quoi que ce soit tiré un quelconque profit ou même bénéficié de la présence des fonds appartenant à son frère et des objets découverts à son domicile, au sens du texte de répression, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, alinéa 2, du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Abdeslam Y... à la peine de 2 ans d'emprisonnement "eu égard à la nature des faits, aux circonstances de la cause et à la personnalité de l'intéressé" ;
"alors qu'en se bornant ainsi à se référer à la qualification de l'infraction poursuivie et à des éléments abstraits relatifs "aux circonstances de la cause et à la personnalité du prévenu", sans autres précisions, la cour d'appel a méconnu l'exigence de la motivation spéciale prescrite par l'article 132-19 du Code pénal pour prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué incomplètement repris au moyen mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer qu'après avoir répondu, comme elle le devait, aux conclusions dont elle était saisie, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit de recel de trafic de stupéfiants dont elle a reconnu le prévenu coupable et justifié, conformément aux dispositions de l'article 132-19 du Code pénal, la peine d'emprisonnement sans sursis qu'elle lui a infligée ;
Que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et la peine propre à sanctionner l'infraction poursuivie, ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, MM. Schumacher, Martin, Pibouleau, Challe, Roger conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Soulard conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;