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21/10/1998 | FRANCE | N°97-84414

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 octobre 1998, 97-84414


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me ODENT et de Me CHOUCROY, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- Z... Solange, épouse Y...,

- l'UNION des ASSURANCES de PARIS, - IARD et VIE, partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appe

l d'AMIENS, chambre correctionnelle, du 20 juin 1997, qui, dans la procédure suivie contre...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLONDET, les observations de Me ODENT et de Me CHOUCROY, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- Z... Solange, épouse Y...,

- l'UNION des ASSURANCES de PARIS, - IARD et VIE, partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, du 20 juin 1997, qui, dans la procédure suivie contre la première pour délit de blessures involontaires, sur renvoi après cassation, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 1382, 1235 et 1376 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur les conséquences d'un accident de la circulation, a ordonné le remboursement par les ayants droit (les consorts X...) de la victime Josette X..., du trop-perçu des sommes qui leur avaient été versées par l'assureur l'UAP du responsable de l'accident Solange Y..., sans tenir compte de l'ensemble des sommes allouées par l'assureur ;

"aux motifs qu'il convenait de récapituler l'ensemble des sommes dues aux consorts X..., le total s'élevant en conséquence à une certaine somme, dont il fallait déduire ce qu'ils avaient, selon leurs écritures, déjà perçu de l'UAP ; qu'ils devaient donc restituer le trop-perçu, qui était constitué par la différence entre ces deux sommes ;

"alors que, d'une part, le principe de la réparation intégrale exige que le préjudice soit indemnisé dans son entier, sans qu'il puisse en résulter pour la victime une perte ou un profit ; qu'en l'espèce, la Cour, qui a ordonné le remboursement au bénéfice de l'UAP du trop perçu des indemnités qu'elle avait versées aux consorts X..., en ayant uniquement pris en considération ce qui leur avait été réglé au titre du préjudice soumis à recours de la victime, sans tenir compte des sommes aussi versées en réparation des autres préjudices, a accordé une double indemnisation aux ayants droit de la victime au titre de ces derniers préjudices ;

"alors que, d'autre part, tout paiement suppose une dette ; qu'en conséquence, ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition ;

qu'en l'espèce, la Cour, qui a fixé les sommes devant être remboursées à l'UAP au titre d'un trop-perçu par les consorts X..., en tenant compte uniquement des indemnités déjà versées en réparation du préjudice soumis à recours de la victime et sans rechercher si d'autres sommes n'avaient pas été également allouées au titre des préjudices personnels et moraux, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1235 et 1376 du Code civil" ;

Attendu que la Cour de Cassation, dans son arrêt du 22 novembre 1995, a limité les effets de la cassation prononcée à celles des dispositions de l'arrêt de la cour d'appel de Paris qui concernaient l'évaluation, d'une part, du préjudice corporel de Josette X... soumis au recours de la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine, d'autre part, du préjudice des consorts X... consécutif au décès de Josette X..., "toutes autres dispositions étant expressément maintenues" ;

Que le caractère irrévocable des dispositions ainsi maintenues, qui ont l'autorité de la chose jugée, fait obstacle à ce qu'il soit statué à nouveau sur l'évaluation du préjudice personnel de la victime et du préjudice résultant pour ses proches des suites de ses blessures ;

Que, dès lors, le moyen est irrecevable ;

Mais sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur les conséquences d'un accident de la circulation, a fixé le montant dû à la victime Josette X... au titre de son préjudice soumis à recours ;

"aux motifs que la période d'incapacité temporaire totale a duré du jour de l'accident, 19 décembre 1989 jusqu'au 2 juillet 1992, jour où la Caisse primaire d'assurance a versé une rente "accident du travail" ; que les demandeurs justifiaient des pertes de salaires de la victime ; que le préjudice résultant de l'incapacité permanente partielle de la victime devait être apprécié en fonction du temps écoulé entre la date de l'accident et celle du décès, suivant ce qu'avait décidé la Cour de Cassation dans son arrêt du 20 novembre 1995 ; qu'à la date de son accident, Josette X... avait 56 ans et pouvait prétendre vivre jusqu'à 82 ans ; qu'il existait donc une différence de 26 ans entre ces deux âges ; qu'il convenait donc de calculer la somme due au titre de l'incapacité permanente partielle, pour ce laps de temps qui représentait l'indemnisation théorique, à l'âge de la victime au moment de son accident ; mais que, comme elle n'avait vécu que 4 ans, il ne fallait retenir que les 4/26ème de cette somme ;

"alors que, si le principe de la réparation intégrale prescrit l'équivalence entre la réparation et le dommage, il interdit à l'inverse que la réparation soit supérieure au dommage ; qu'en l'espèce, la Cour, qui a décidé d'indemniser Josette X... de son incapacité temporaire de travail, alors que, par ailleurs, elle lui avait déjà accordé une autre indemnisation au titre de son incapacité permanente partielle, en la faisant débuter du jour de son accident et non de celui de la consolidation de ses blessures, ainsi que le lui avait enjoint l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 novembre 1995, lui a du même coup accordé une double indemnisation, pour la période allant du jour de son accident à celui de la consolidation de ses blessures ; qu'en se décidant ainsi, la Cour a violé les dispositions de l'article 1382 du Code civil" ;

Vu les articles 1382 du Code civil et 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu que le calcul du préjudice doit être fait de manière qu'il n'en résulte pour la victime ou ses ayants droit ni perte, ni profit ;

Attendu que, statuant sur la réparation du préjudice découlant de l'atteinte à l'intégrité physique de Josette X..., blessée le 19 décembre 1989, à l'âge de 56 ans, lors d'un accident dont Solange Y... a été reconnue responsable, la juridiction du second degré fixe au 2 juillet 1992, date à partir de laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie a versé à la victime une rente d'accident du travail, la consolidation des blessures, et à 95 % le taux de l'incapacité permanente ;

Qu'après avoir constaté que la victime est décédée des suites de ses blessures le 5 novembre 1993, les juges évaluent l'indemnité réparatrice du préjudice soumis au recours de la Caisse à la somme de 2 641 611, 52 francs, comprenant notamment, au titre des pertes de salaires pendant la durée de la période d'incapacité totale de travail, la somme de 300 000 francs, et, au titre de l'incapacité permanente partielle, celle de 219 330, 76 francs, déterminée par application de la "valeur du point", fixée à 15 000 francs, à la période de 4 ans pendant laquelle la victime a survécu à compter de la date de l'accident ; qu'après avoir fixé à 1 554 900, 91 francs le montant des sommes dues aux parties civiles en réparation de la totalité des préjudices de la victime et de leurs préjudices personnels, les juges condamnent les premières à restituer à l'UAP, qui leur a versé la somme totale de 2 152 792, 39 francs, la somme indue de 597 891, 48 francs ;

Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte, sans rapporter à la date de la consolidation des blessures, qu'elle a elle-même souverainement déterminée, le point de départ de la période d'incapacité permanente partielle qui fait suite à la période d'incapacité totale de travail, la cour d'appel, qui, de surcroît, ne pouvait prononcer une condamnation aux restitutions contre l'UAP, a méconnu le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

CASSE et ANNULE, l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, en date du 20 juin 1997, mais seulement en ses dispositions relatives à la réparation du préjudice résultant de l'incapacité permanente partielle, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Blondet conseiller rapporteur, MM. Roman, Aldebert, Grapinet, Mistral, Ruyssen, Mme Mazars conseillers de la chambre, Mme Ferrari, M. Sassoust conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Géronimi ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-84414
Date de la décision : 21/10/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, 20 juin 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 oct. 1998, pourvoi n°97-84414


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.84414
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