AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Zineb X..., demeurant ... Près Troyes,
en cassation d'un arrêt rendu le 24 janvier 1996 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), au profit de la société SGCNE, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 juin 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Andrich, conseiller référendaire rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Ransac, conseillers, M. Terrail, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller référendaire, les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme X... a été embauchée à compter du 7 avril 1993 par la société SGCNE par contrat à durée de 18 mois pour remplacer une personne en congé de maternité à son poste de vendeuse dans le magasin Loisirs ; que la société SGCNE contrainte pour des raisons économiques à la fermeture de ce magasin, après avoir envisagé le licenciement économique de la salariée lui a proposé une affectation à un poste de manutentionnaire chez un autre employeur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué (Reims, 24 janvier 1996), d'avoir annulé le jugement du conseil de prud'hommes de Troyes pour défaut de respect du principe contradictoire, alors, selon le moyen, qu'en l'absence d'éléments nouveaux dont les parties n'auraient pas eu connaissance, le conseil de prud'hommes n'avait pas à ordonner la réouverture des débats ;
Mais attendu qu'usant de son pouvoir d'évocation, la cour d'appel a statué sur le fond de l'affaire, que le moyen est inopérant ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 122-3-8 du Code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande d'indemnisation pour rupture anticipée du contrat à durée déterminée, la cour d'appel a relevé que la société SGCNE n'a pas mis fin prématurément au contrat de travail à durée déterminée, dont la rupture anticipée ne résulte que du refus de la salariée d'accepter l'offre de reclassement qui lui était offerte au sein du groupement Localug pour permettre au contrat d'aller jusqu'à son terme ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la fermeture pour motif économique d'un magasin ne constitue pas un cas de force majeure mettant fin prématurément au contrat de travail à durée déterminée, et que la salariée embauchée comme vendeuse manutentionnaire dans ce magasin par la société SGCNE, n'a commis aucune faute en refusant d'exercer pendant la durée du contrat restant à courir un emploi de manutentionnaire dans une blanchisserie, la cour d'appel a méconnu les dispositions du texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société SGCNE aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.