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14/10/1998 | FRANCE | N°97-84648

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 octobre 1998, 97-84648


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller RUYSSEN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Christian,

contre l'arrêt de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, chambre détachée de CAYENNE, du 23 juin 1997,

qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller RUYSSEN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Christian,

contre l'arrêt de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, chambre détachée de CAYENNE, du 23 juin 1997, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 319 ancien et 221-6 nouveau du Code pénal, 112-1 et 121-3 du même Code, ce dernier dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christian Y... coupable d'homicide involontaire sur la personne de Ginette Z... et, en répression, l'a condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement assorti du sursis ;

"aux motifs adoptés que les experts ont noté un manque de rigueur et des imprudences dans la surveillance qui ont conduit au retard de diagnostic de la rupture utérine intervenue le 25 mai 1988 dans l'après-midi ; qu'un examen clinique approfondi - et rendu nécessaire par les troubles apparus chez la patiente dans le courant de l'après-midi - aurait permis de détecter cette rupture et de décider d'intervenir dans les meilleurs délais ;

"et aux motifs propres que la rupture utérine, qui pouvait être soupçonnée dès 16 heures par un examen clinique, était en tout état de cause confirmée par l'examen radiologique de 17 heures 30 mais n'a pas été diagnostiquée avant l'opération vers 20 heures 30 par Christian Y..., faute par celui-ci de s'être rendu auprès de la patiente malgré les nombreux appels ; que si l'opération avait été faite dès 17 heures 30, on n'aurait peut-être pas évité la mort du foetus mais certainement la mort de la mère, établissant ainsi clairement le lien de causalité entre le décès de la patiente et la négligence de Christian Y... ;

"alors, d'une part, que, dans ses écritures en appel, Christian Y... faisait valoir qu'il ne s'était pas déplacé immédiatement au chevet de la patiente le 25 mai 1988 en fin d'après-midi malgré les appels de la sage-femme parce que celle-ci ne lui avait pas décrit de symptômes (écoulement de sang, trouble du rythme cardiaque foetal, etc...) permettant d'évoquer une rupture utérine ; que, dès lors, en omettant de se prononcer sur cette argumentation péremptoire d'où il résultait l'absence de faute pénale, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif ;

"alors, d'autre part, que, selon l'alinéa 2, de l'article 121-3 du Code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 13 mai 1996, il n'y a pas de délit de négligence si l'auteur des faits a accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a pas relevé que Christian Y... n'aurait pas accompli les diligences normales eu égard aux circonstances de la cause, notamment en l'absence de symptômes pouvant être le signe d'une rupture utérine et à la rareté de ce genre d'accident ;

que, dès lors, l'arrêt attaqué n'a pas caractérisé la négligence au sens de la loi nouvelle ;

"alors, enfin, que l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui a valeur constitutionnelle, pose le principe de la proportionnalité des peines ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui retient à l'encontre de Christian Y... une faute "ordinaire", c'est-à-dire le fait d'avoir tardé à venir au chevet de la patiente malgré plusieurs appels de la sage-femme, ne pouvait, sans entacher sa décision d'une disproportion manifeste entre l'infraction et la peine, condamner le prévenu à une peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis ; qu'en statuant de la sorte, l'arrêt attaqué a violé les textes et principe susvisés" ;

Sur le moyen pris en ses deux premières branches :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Ginette Z..., âgée de 38 ans et arrivant au terme d'une neuvième grossesse, a été hospitalisée dans une clinique à la demande de son gynécologue, Christian Y..., pour hypertension et retard de croissance du foetus ;

que, deux jours plus tard, alors qu'elle avait perdu les eaux et avait été placée sous perfusion par la sage-femme de garde, celle-ci, inquiète de l'absence de contractions et envisageant une présentation de l'enfant par le siège, a alerté téléphoniquement le médecin vers 16 heures ;

Qu'après avoir prescrit une radiographie, qu'il s'est ensuite fait décrire, Christian Y... ne s'est déplacé à la clinique que vers 20 heures 30, sur un nouvel appel téléphonique d'une autre sage-femme, à la suite d'une abondante hémorragie ;

Attendu que la césarienne pratiquée par Christian Y... a révélé notamment la mort du foetus et, chez Ginette Z..., une rupture utérine dont elle devait décéder ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'homicide involontaire, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, retient que Christian Y... a été suffisamment avisé par les sages-femmes de la gravité des troubles que présentait Ginette Z... ; qu'elle ajoute que les antécédents de la parturiente devaient inciter le médecin à se déplacer aussitôt et à assurer une surveillance personnelle, sans laisser en particulier à des auxiliaires médicales le soin d'interpréter une radiographie qui lui aurait confirmé la rupture utérine ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance et procédant d'une appréciation souveraine, d'où il résulte que Christian Y... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de la nature de sa mission, de ses compétences et des moyens dont il disposait, la cour d'appel a justifié sa décision, notamment au regard de l'article 121-3 du Code pénal ;

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu qu'en prononçant contre le prévenu une peine de 6 mois d'emprisonnement assortie du sursis, les juges n'ont fait qu'user d'une faculté dont ils ne devaient aucun compte ;

D'où il suit que le moyen, en ses diverses branches, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Ruyssen conseiller rapporteur, MM. Roman, Aldebert, Grapinet, Mistral, Blondet, Mme Mazars conseillers de la chambre, Mme Ferrari, M. Sassoust conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Cotte ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-84648
Date de la décision : 14/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Faute - Imprudence ou négligence - Médecin gynécologue - Accouchement - Défaut d'accomplissement des diligences normales - Article 121-3 du Code pénal.


Références :

Code pénal 221-6 et 121-3
Code pénal ancien 319

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, chambre détachée de CAYENNE, 23 juin 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 oct. 1998, pourvoi n°97-84648


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.84648
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