AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de Me BROUCHOT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général COTTE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- ACHELOUS Alix,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de ST-DENIS-DE-LA-REUNION, en date du 9 juin 1998, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de LA REUNION sous l'accusation de tentative de meurtre avec préméditation ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-4, 121-5, 221-1, 221-3, 221-8, 221-9 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale et défaut de réponse à conclusions ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation d'Alix Achelous du chef de tentative d'assassinat ;
"aux motifs que le conseil d'Alix Achelous a régulièrement déposé un mémoire et demande que les faits soient disqualifiés en coups et blessures volontaires avec arme, en faisant valoir, essentiellement, que lorsque le mis en examen a fait feu, il était ébloui par le soleil et se trouvait derrière un feuillage, et que les circonstances de la cause n'établissent pas d'intention d'homicide ; que, cependant, les premières déclarations d'Alix Achelous explicitent une intention homicide préméditée ("j'ai cherché un moyen de me débarrasser de Jean-Jacques et Jean- Raymond X..., je voulais les tuer tous les deux (...) ; depuis l'histoire qui nous a opposés, le 25 janvier 1997, j'avais pris la décision irrévocable de tuer les frères Tavernier, je me suis mis à les surveiller moi-même afin de mieux connaître leur emploi du temps, de façon à les coincer quand je le souhaitais (...) si j'avais eu plus d'argent, j'aurais même acheté un fusil plus puissant et plus performant à deux coups afin de les tuer les deux en même temps ; il y a deux semaines de cela, j'ai commencé mes préparatifs, je suis allé rechercher ma carabine 22 LR (...) et je l'ai nettoyée et graissée (...) ; j'ai cherché une occasion de les tuer chaque jour (...) ; je n'ai pas agi sur un coup de tête, j'avais envie de tuer les frères Tavernier (...) ; j'ai épaulé mon arme, j'ai visé en premier Jean-Jaques car c'est celui que je voulais tuer le premier, c'est le pire des deux (...) ; au début je voulais lui tirer dans la tête, mais le soleil m'éblouissait, j'ai donc décidé de viser le coeur, partie plus visible à cette heure là ; j'ai pris le temps nécessaire à viser pour ne pas le rater (...) ; j'ai rechargé mon arme pour m'en prendre à Jean-Raymond ; malheureusement, pendant le rechargement de mon arme, Jean-Raymond en a profité pour filer chez lui (...) ; si un jour je vais en prison, je finirai bien par en sortir et je finirai le travail commencé aujourd'hui (...) ; que, dans ces conditions, il existe des charges graves, multiples et précises d'une intention homicide préméditée, malgré les dénégations
ultérieures ;
"alors que, dans un mémoire régulièrement déposé, auquel la chambre d'accusation fait référence, Alix Achelous avait fait valoir que l'intention était remise en cause ; qu'en se référant uniquement aux premières déclarations d'Alix Achelous pour retenir que celles-ci explicitaient une intention homicide préméditée et en refusant d'accorder la moindre attention à ses déclarations ultérieures par lesquelles Alix Achelous ne reconnaissait plus d'intention criminelle, la cour d'appel n'a pas répondu à un chef péremptoire des conclusions dont elle était saisie, violant ainsi les textes susvisés" ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits et répondu aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges suffisantes contre Alix Achelous pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises, sous l'accusation de tentative d'assassinat ;
Qu'en effet, les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction et que la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier, à supposer ces faits établis, si leur qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que tel étant le cas en l'espèce, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Alix Achelous est renvoyé ; que la procédure est régulière, et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, MM. Milleville, Joly, Mmes Simon, Chanet, Anzani conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Desportes conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Cotte ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;