AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. François Z...,
2 / Mme Anne-Marie Z... née A...,
demeurant ensemble ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 4 juillet 1996 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre, 2ème section), au profit :
1 / de la société Clinisystem, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,
2 / de Mme Christine De X..., domiciliée ..., prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Clinisystem,
3 / de Mme Colette Y..., demeurant Les Camparoles, ..., 69310 Pierre-Bénite,
4 / de la société Sofinabail, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ;
La société Sofinabail a sollicité sa mise hors de cause ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 juillet 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Sempère, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Sempère, conseiller, les observations de Me Balat, avocat des époux Z..., de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société Sofinabail, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. François Z... et à Mme Anne-Marie Z... de leur désistement au profit de Mme Colette Y... ;
Met hors de cause la société Sofinabail ;
Attendu que, suivant contrat de crédit-bail, souscrit auprès de la société Sofinabail, M. Z..., infirmier, s'est fait livrer par la société Clinisystem deux appareils de drainage lymphatique ; que préalablement à ce contrat, la société Clinisystem s'est engagée à ce que M. Z... réalise un chiffre d'affaires de 160 000 francs sur une période de dix-huit mois et à rembourser la différence si ce chiffre d'affaires n'est pas réalisé, entre ce chiffre d'affaires et le chiffre d'affaires effectivement réalisé ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que les époux Z... font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action en résolution du contrat de vente, alors, selon le moyen, d'une part, qu'après avoir relevé que le contrat prévoyait que le locataire avait le droit d'agir directement contre le fournisseur et que
M. Z... fondait sa demande en résolution sur l'engagement du fournisseur à parvenir à un certain chiffre d'affaire, la cour d'appel qui a ainsi caractérisé que la demande était fondée sur le défaut de rendement promis ne pouvait, sans violer l'article 1134 du Code civil, décider que les moyens invoqués par M. Z... ne justifiaient aucune action directe contre le fournisseur ; que, d'autre part, la clause du contrat qui prévoit que l'action en résolution de la vente ne pourra être exercée par le locataire qu'en qualité de mandataire du bailleur n'a pas pour objet d'exiger du locataire qu'il justifie de sa qualité de mandataire mais de lui conférer le droit d'un recours direct contre le fournisseur, que dès lors la cour d'appel ne pouvait sans violer l'article précité, exiger du crédit preneur qu'il justifie de sa qualité de mandataire ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a relevé que M. Z... fondait sa demande en résolution du contrat de vente sur le non-respect de l'engagement du vendeur de réaliser un certain chiffre d'affaire, en faisant valoir que cet engagement avait été la condition déterminante de son consentement ; qu'elle en a déduit, à bon droit, que M. Z... ne disposait, compte tenu du fondement de son action d'aucune action directe, en qualité de mandataire du crédit bailleur contre le fournisseur ; que, d'autre part, la cour d'appel n'a pas exigé du crédit preneur qu'il justifie de sa qualité de mandataire du crédit bailleur, mais a seulement retenu que l'action fondée sur le non-respect de l'engagement du vendeur ne constituait pas l'action en résolution de vente pour non conformité du matériel vendu ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches :
Attendu que les époux Z... font encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel n'a pas recherché si l'engagement invoqué au soutien de la résolution du contrat avait été exécuté, d'autre part, qu'elle ne pouvait se borner à relever que M. Z... avait demandé à son contractant de reprendre le matériel sans répondre aux conclusions soutenant que cette reprise résultait du fait personnel d'inexécution par le vendeur de ses obligations ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel qui a retenu que M. Z... ne pouvait utilement se prévaloir du manquement par la société Clinisystem à son engagement du 19 juillet 1990, dès lors que celui-ci ne remettait en cause aucun des éléments concernant la violation du contrat de vente non subordonnée à une condition, n'avait pas à procéder à la
recherche qui lui est reprochée d'avoir omise ; que, d'autre part, elle a répondu aux conclusions de M. Z... en relevant qu'il avait demandé au fournisseur de reprendre le matériel sans en informer le crédit bailleur ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour débouter M. Z... de sa demande formée à l'encontre de la société Clinisystem tendant au paiement de la somme de 138 840 francs au titre de l'exécution de l'engagement pris par la société Clinisystem, l'arrêt énonce que M. Z... ne justifie pas de la déclaration de sa créance au passif de la société Clinisystem relative au non-respect par cette société de son engagement ;
Attendu, cependant, qu'en relevant d'office ce moyen sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que la demande de M. Z... au titre du non-respect de l'engagement pris par la société Clinisystem a été déclarée irrecevable, l'arrêt rendu le 4 juillet 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Fait masse des dépens et les laisse pour moitié à la charge des époux Z... et pour moitié à la charge de la société Clinisystem et Mme De X..., ès qualités ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des époux Z... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.