AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Ferri, société anonyme, dont le siège social est ..., prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
en cassation d'un arrêt rendu le 12 mars 1996 par la cour d'appel de Paris (21ème chambre, section C), au profit de M. Claude X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 juin 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Ransac, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de Me Baraduc-Bénabent, avocat de la société Ferri, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Ferri a engagé M. X... le 9 avril 1987 ; qu'il a été licencié le 20 juillet 1993 pour des griefs divers et notamment le manque de motivation et le refus de travail en équipe ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué, (Paris, 12 mars 1996) d'avoir décidé que ce licenciement était sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, d'une part, que le manque de motivation constitue un grief objectif, matériellement vérifiable et peut, à ce titre, justifier une mesure de licenciement ; qu'en l'espèce, la société Ferri avait versé aux débats deux attestations, l'une de M. Y..., l'autre de M. Z..., faisant ressortir le manque de motivation de M. X... ; qu'en considérant ce motif subjectif et invérifiable pour refuser de l'examiner, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail ; alors, d'autre part, que le refus du salarié de travailler en équipe constitue un motif matériellement vérifiable précis pouvant justifier un licenciement ; qu'en l'espèce, la société Ferri avait communiqué plusieurs attestations permettant d'établir le refus de M. X... de travailler en équipe ; qu'en considérant ce motif imprécis et invérifiable pour refuser de l'examiner, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que pendant les dix ans et demi qui'l avait passés au service de la société le salarié n'avait fait l'objet d'aucune remarque défavorable et même qu'il avait reçu peu avant le licenciement des éloges pour la bonne marche du service dont il avait la responsabilité ; qu'elle a ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, examiné la totalité des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Ferri aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Ferri à payer à M. X... la somme de 10 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.