AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Paul X...,
en cassation d'un arrêt rendu le 4 juin 1996 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e Chambre civile), au profit de Mme Anne, Thérèse Y..., épouse X...,
défenderesse à la cassation ;
Mme X..., défenderesse au pourvoi principal, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience du 8 juillet 1998, où étaient présents : M. Chevreau, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Lesueur de Givry, conseiller rapporteur, M. Guerder, conseiller, M. Monnet, avocat général, Mme Guénée-Sourie, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lesueur de Givry, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. X..., de Me Le Prado, avocat de Mme X..., née Y..., les conclusions de M. Monnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé le divorce des époux X...-Y... à leurs torts partagés, alors, selon le moyen, que les fautes d'un époux peuvent enlever aux faits qu'il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce ; que la cour d'appel, pour infirmer la décision des premiers juges ayant prononcé le divorce aux torts exclusifs du mari, en relevant que son comportement violent et adultère ôtait tout caractère de gravité aux insultes imputées à la femme, ne pouvait se borner à se référer aux attestations produites, sans examiner si les coups graves portés à la femme, dont elle a retenu l'existence depuis les années 1980, et l'adultère du mari, n'excusaient pas les injures retenues à l'encontre de Mme X... ; qu'elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 245 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, en prononçant le divorce aux torts partagés, a nécessairement estimé que les faits retenus à la charge de la femme n'étaient pas privés de leur caractère fautif par le comportement du mari ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 271 et 272 du Code civil ;
Attendu que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;
Attendu que, pour condamner l'ex-mari au versement d'une prestation compensatoire, l'arrêt retient que les époux possèdent en commun un patrimoine immobilier important, que la femme perçoit 7 000 francs par mois, qu'il existe pour l'instant une disparité certaine, mais qu'il est constant que Mme X... percevra à la liquidation de la communauté, la moitié de son produit ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, sans relever, ni les ressources ni les charges du mari, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la prestation compensatoire, l'arrêt rendu le 4 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, prononcé et signé par M. Guerder, conseiller le plus ancien, conformément aux dispositons des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du trente septembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.