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07/07/1998 | FRANCE | N°96-15083

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 07 juillet 1998, 96-15083


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Nicolas X..., demeurant ...,

2°/ la Mutuelle du Mans assurances IARD, société d'assurance à forme mutuelle, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 16 avril 1996 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), au profit :

1°/ de M. Vincent Y..., demeurant ...,

2°/ de M. Philippe Y..., demeurant ...,

3°/ de Mme Catherine Y..., demeurant ...,

4°/ de Mme Georges Y..., demeura

nt ..., tous quatre pris en leur qualité d'héritiers de Georges Y..., décédé, défendeurs à la cassation ;

L...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Nicolas X..., demeurant ...,

2°/ la Mutuelle du Mans assurances IARD, société d'assurance à forme mutuelle, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 16 avril 1996 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), au profit :

1°/ de M. Vincent Y..., demeurant ...,

2°/ de M. Philippe Y..., demeurant ...,

3°/ de Mme Catherine Y..., demeurant ...,

4°/ de Mme Georges Y..., demeurant ..., tous quatre pris en leur qualité d'héritiers de Georges Y..., décédé, défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 juin 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Aubert, conseiller rapporteur, M. Fouret, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Aubert, conseiller, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. X... et de la Mutuelle du Mans assurance IARD, de Me Choucroy, avocat des consorts Y..., les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux moyens, tels qu'il figurent au mémoire en demande et sont reproduits en annexe au présent arrêt :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Paris, 16 avril 1996), que, suite à une mésentente avec ses deux associés dans la SARL Sodice services (la société), M. Y... leur a proposé la vente de ses parts pour un prix de 28 millions de francs;

que, n'ayant obtenu qu'une contreproposition insatisfaisante, M. Y... a engagé des pourparlers avec un tiers avec lequel il a conclu une promesse de cession au prix de 18 750 000 francs;

que ses associés ayant refusé d'agréer le cessionnaire, M. Y... a obtenu d'eux, le 30 mai 1989, l'accord verbal de leur céder ses parts au prix de 20 millions de francs;

que M. X..., avocat et conseil de M. Y..., lui a adressé, sur ces bases, un projet de lettre à faire signer par ses associés;

que ceux-ci lui ont alors proposé le rachat des parts, non plus par eux-mêmes mais par la société, dans le cadre d'une réduction de capital, le changement d'acquéreur étant justifié, pour eux, par une réduction des droits d'enregistement exigibles;

que la cession des parts à la société a été signée le 3 juin 1989, devant notaire, en présence de M. X... ;

que M. Y... a ensuite découvert que les sommes perçues par lui étaient considérées fiscalement, non comme des plus-values imposables au taux de 17 % mais comme des revenus de capitaux mobiliers soumis à l'impôt sur le revenu et imposables comme tels à un taux de 57,8 %;

que, pour remédier à cette situation, M. Y... a alors réalisé un investissement dans les départements d'outre-mer permettant une déduction fiscale importante ;

que cette opération ayant été finalement défavorable, M. Y...

-ultérieurement décédé, l'instance étant reprise par ses ayants-droit, les consorts Z... a assigné M. X... en réparation de son préjudice pour manquement à son devoir de conseil;

que l'arrêt attaqué a condamné M. X... et son assureur à payer aux consorts Y... la somme de 10 914 186 francs à titre de dommages-intérêts ;

Attendu, d'abord, que la cour d'appel a relevé que M. X... avait accompli des diligences de conseil, en premier lieu, dans l'élaboration de la promesse de vente consentie au tiers, le 29 mai 1989, et, en second lieu, dans l'établissement, le lendemain, de la lettre proposée à la signature des associés de M. Y...;

que l'intervention, non contestée, du notaire, conseil de la société, ne permettait pas de considérer que M. X... se trouvait du même coup déchargé de son mandat vis-à-vis de son client, d'autant moins qu'à la demande de celui-ci il était présent lors de la signature de l'acte, le 3 juin 1989, manifestant ainsi son acceptation de poursuivre le mandat; que cela s'est trouvé confirmé par la lettre qu'il a adressée le 5 juin suivant à M. Y... et par laquelle il faisait valoir, pour demander le paiement de ses honoraires, que l'affaire se trouvait achevée par les accords conclus le samedi 3 juin, et qu'au surplus, cette lettre, qui soulignait les avantages de l'accord définitif, mettait en évidence l'approbation de M. X... quant au dénouement de l'opération, manifestant encore que l'avocat ne considérait pas qu'il aurait pu avoir été déchargé de sa mission de conseil à partir du moment où les parties avaient décidé de faire cession à la société des parts de M.

Y...

;

que, pour conclure, l'arrêt énonce que le fait d'avoir consulté dans la perspective d'une cession à un tiers ou aux associés n'établissait aucunement, dans ces conditions, qu'il n'incombait pas à cet avocat d'appeler l'attention de son client sur les conséquences juridiques et fiscales d'une cession des titres à la société elle-même ou de lui conseiller de différer l'accord pour les vérifier, ce qu'il n'a pas fait;

que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations et appréciations que l'avocat avait manqué à l'obligation de conseil à laquelle il était tenu envers son client;

qu'ensuite, l'arrêt relève que l'allégation selon laquelle il n'était pas démontré que M. Y... aurait agi autrement s'il avait su que la cession à la société faisait naître une imposition au taux le plus élevé ne saurait entraîner la conviction dans la mesure où la différence entre les deux taxations possibles était dans le rapport très significatif de 17 à 57,8 %;

que, par ces motifs, la cour d'appel, qui a fait la constatation visée par le moyen, a légalement justifié sa décision au regard des mêmes textes;

qu'il s'ensuit que les deux moyens sont dépourvus de tout fondement ;

Et attendu que le pourvoi présente un caractère abusif ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... et la Mutuelle du Mans assurances IARD aux dépens ;

Les condamne également chacun à une amende civile de 5 000 francs envers le Trésor public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 96-15083
Date de la décision : 07/07/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

AVOCAT - Responsabilité - Devoir de conseil - Manquement - Vente de parts sociales - Adoption de modalités de nature à provoquer d'important frais fiscaux.


Références :

Code civil 1147

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), 16 avril 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 07 jui. 1998, pourvoi n°96-15083


Composition du Tribunal
Président : Président : M. LEMONTEY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.15083
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