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23/06/1998 | FRANCE | N°96-43152

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 1998, 96-43152


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mlle Marie-Christine X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 21 mars 1996 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre), au profit de la société Rocamar Intermarché, société anonyme dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La société Rocamar Intermarché a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 mai 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus

ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Bouret, conseill...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mlle Marie-Christine X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 21 mars 1996 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre), au profit de la société Rocamar Intermarché, société anonyme dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La société Rocamar Intermarché a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 mai 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Bouret, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de Mlle X..., de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Rocamar Intermarché, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le pourvoi principal de la salariée et sur le pourvoi incident de l'employeur, réunis :

Attendu que Mlle X..., engagée le 21 mars 1991 en qualité de caissière par la société Rocamar Intermarché, a été licenciée pour faute grave le 1er avril 1992, son employeur lui faisant grief notamment de propos déplacés envers un supérieur hiérarchique ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 mars 1996) d'avoir décidé que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, que l'imputation d'avoir tenu des propos "déplacés" à l'égard d'un supérieur hiérarchique, sans relation du contenu de ces propos, ne constitue pas un motif précis de licenciement;

qu'en décidant que le licenciement de Mlle X... avait une cause réelle et sérieuse après avoir constaté que, dans la lettre de licenciement, l'employeur se bornait à reprocher à la salariée d'avoir tenu des propos déplacés à l'égard d'un supérieur hiérarchique, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;

alors, d'autre part, qu'aucune disposition n'impose au salarié un "devoir de correction" qui lui interdirait de tenir des propos grossiers devant un supérieur hiérarchique, dès lors que ces propos sont dépourvus de tout caractère injurieux à l'égard de quiconque et ne sont pas de nature à compromettre le bon fonctionnement de l'entreprise;

qu'en se fondant sur l'existence d'une telle obligation de correction du salarié envers un supérieur hiérarchique pour en déduire que le caractère grossier des propos tenus par Mlle X... devant son supérieur constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail;

alors, en outre, qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi pourtant qu'elle y était invitée par Mlle X... dans ses conclusions, si le manquement imputé à celle-ci n'avait pas pour cause le propre manquement de son supérieur hiérarchique, dont Mlle X... soutenait qu'il entendait la soumettre de façon illégale à un horaire abusif, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail;

alors, enfin, que les termes de la lettre de licenciement fixent les limites du litige et que le juge ne peut se fonder sur des motifs qui n'y ont pas été exprimés;

qu'après avoir constaté que la lettre de licenciement n'énonçait que deux griefs, "abandon de poste" et "propos déplacés à l'égard d'un supérieur hiérarchique", et écarté le premier de ces deux griefs, la cour d'appel ne pouvait, pour décider que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse, imputer à la salariée un prétendu refus d'exécuter un ordre constitutif d'un acte d'insubordination, sans violer l'article L. 122-14-2 du Code du travail;

que, de son côté, l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la salariée n'avait pas commis de faute grave, alors, selon le moyen, d'une part, que commet une faute grave le salarié qui tient des propos grossiers et injurieux à l'égard de son supérieur hiérarchique pour manifester son refus d'obéir aux instructions de ce dernier, de sorte que la cour d'appel, qui retient que la grossièreté des propos de Mlle X... envers sa responsable constitue un manquement à son obligation de correction (et qu'ils exprimaient en outre un acte d'insubordination compromettant la bonne marche de l'entreprise), tout en écartant la faute grave, ne tire pas les conséquences de ses propres constatations et viole l'article L. 122-6 du Code du travail;

alors, d'autre part, que l'existence de précédents avertissements doit être pris en compte pour apprécier la gravité de la faute, de sorte qu'en ne tenant pas compte de l'avertissement notifié à Mlle X... le 21 février 1992 pour avoir égaré un chèque de 308,72 francs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-6 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a tenu compte, dans l'appréciation des faits, d'un avertissement antérieur infligé à la salariée, a retenu que le manquement imputé à la salariée s'expliquait par un conflit ancien entre les deux intéressés ;

Qu'en l'état de ces constatations et sans encourir les griefs des moyens, elle a pu décider, d'une part, que ce comportement n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et, d'autre part, exerçant le pouvoir d'appréciation qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse;

que les moyens ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-43152
Date de la décision : 23/06/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e Chambre), 21 mars 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jui. 1998, pourvoi n°96-43152


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.43152
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