AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Y... et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Fabrice, contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 27 novembre 1996, qui, pour excès de vitesse, l'a condamné à une amende de 3 000 francs et a prononcé la suspension de son permis de conduire pour une durée de 4 mois ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 paragraphe 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et R. 155 du Code de procédure pénale ;
Vu lesdits articles ensemble l'article 427 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les articles 114 et 197 du Code de procédure pénale, qui limitent aux avocats des parties la possibilité de se faire délivrer la copie des pièces du dossier d'une information en cours, ne sont pas applicables aux procédures dont la juridiction de jugement est saisie et qui, de ce fait, ne sont pas soumises au secret de l'enquête ou de l'instruction prescrit par l'article 11 du même Code ;
Qu'il s'ensuit que toute personne ayant la qualité de prévenu ou d'accusé est en droit d'obtenir, en vertu de l'article 6 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, non pas communication directe des pièces de la procédure, mais la délivrance, à ses frais, le cas échéant, par l'intermédiaire de son avocat, de la copie des pièces du dossier soumis à la juridiction devant laquelle elle est appelée à comparaître ;
Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que Fabrice X..., poursuivi du chef d'excès de vitesse, a sollicité auprès de l'officier du ministère public et du procureur général la délivrance de la copie du procès-verbal constatant l'infraction reprochée ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la procédure tirée du refus de communiquer la pièce précitée, la cour d'appel énonce que, selon les mentions du document unique constituant le dossier, le prévenu a pris connaissance de sa déclaration relatant les constatations des gendarmes et ne peut ainsi faire état d'aucun grief ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, et alors que les dispositions réglementaires de l'article R. 155,2° du Code de procédure pénale, soumettant à autorisation du ministère public la délivrance aux parties de copie de pièces de la procédure, ne sauraient faire obstacle aux droits de la défense, la cour d'appel a méconnu les textes et principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 27 novembre 1996 et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Metz, sa mention en marge où à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Guilloux, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Mazars conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Lucas ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;