AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Isabelle X..., domiciliée ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 janvier 1996 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale), au profit de la société Edscha-Lor, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 avril 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Frouin, conseiller référendaire rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Ransac, conseillers, M. Martin, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Frouin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de la société Edscha-Lor, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le quatrième moyen :
Vu les articles L. 122-14-2, L. 321-1-1, L. 321-6, L. 322-3 et L. 511-1, alinéa 3, du Code du travail ;
Attendu qu'il résulte de l'application combinée de ces textes que la lettre notifiant au salarié son licenciement pour motif économique tout en lui proposant d'adhérer à une convention de conversion doit être motivée;
qu'à défaut d'énonciation d'un motif suffisamment précis, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que Mme X... a été embauchée le 10 octobre 1991 en vertu d'un contrat à durée indéterminée par la société EDSCHA-LOR;
qu'elle a été licenciée pour motif économique par lettre du 5 octobre 1993;
qu'elle a adhéré à la convention de conversion qui lui était proposée dans la lettre de licenciement ;
Attendu que, pour rejeter sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé que Mme X... n'avait jamais contesté qu'elle avait signé une convention de conversion, qu'en conséquence le contrat de travail avait été rompu d'un commun accord, et qu'elle ne pouvait se prévaloir du fait que la lettre lui notifiant son licenciement n'était pas motivée ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la lettre notifiant à la salariée son licenciement, tout en lui proposant une convention de conversion, contenait l'énoncé d'un motif de licenciement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les cinq autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Edscha-Lor aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Edscha-Lor ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.