AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Gilles de X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 24 mars 1995 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (audience solennelle), au profit du procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son parquet place de Verdun, 13616 Aix-en-Provence, défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 avril 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Cottin, conseiller rapporteur, M. Fouret, Mme Delaroche, M. Sargos, Mme Marc, MM. Aubert, Bouscharain, conseillers, Mmes Verdun, Catry, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Cottin, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. de X..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. de X..., alors conseil juridique et devenu depuis le 1er janvier 1992, avocat, a été chargé de la vente d'un fonds de commerce et constitué séquestre conventionnel du prix de vente de ce fonds;
qu'ayant procédé à des prélèvements sur les deniers dont il était séquestre en 1991 et 1993, notamment pour se régler d'honoraires qu'il estimait lui être dûs, il a fait l'objet d'une instance disciplinaire devant le Conseil de l'ordre des avocats qui l'a déclaré coupable de faits contraires à la probité, à l'honneur et à la délicatesse et l'a condamné à la peine de six mois d'interdiction temporaire d'exercice;
que sur recours de M. de X..., la cour d'appel l'a condamné à la peine d'un an d'interdiction temporaire d'exercer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. de X... fait grief à la cour d'appel, faute d'avoir constaté le caractère abusif ou mal fondé des honoraires qu'il avait prélevés, de l'avoir condamné sans avoir caractérisé l'existence d'un manquement à la probité ou à l'honneur ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que M. de X... avait procédé à des prélèvements sur la somme dont il était séquestre, en infraction aux règles en vigueur tant pour les conseils juridiques que pour les avocats, et qui a décidé que ces agissements, particulièrement graves, constituaient, en ce qui concerne le dernier prélèvement, un manquement à la probité, l'honneur et la délicatesse, n'avait pas à rechercher si les honoraires ainsi prélevés étaient ou non justifiés ;
qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Vu les articles 562 et 550 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le sort de l'appelant ne peut être aggravé sur son seul appel ;
Attendu que, saisie du seul appel de M. de X... contre la décision du Conseil de l'ordre ayant prononcé l'interdiction d'exercice de six mois, la cour d'appel a prononcé celle de l'interdiction temporaire d'une année ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a aggravé la sanction disciplinaire prononcée contre M. de X... par le Conseil de l'ordre des avocats du barreau de Nice, l'arrêt rendu le 24 mars 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.