AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ la société Création Cent Mille, société anonyme, dont le siège social est ...,
2°/ la société Fil à Fil, société anonyme, dont le siège social est ...,
3°/ M. Z..., domicilié ..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Leading, en cassation d'un jugement rendu le 9 mai 1994 par le tribunal de commerce de Marseille, au profit :
1°/ de la société Fil à Fil International, société anonyme, dont le siège social est ...,
2°/ de M. René X..., domicilié ..., pris en qualité de représentant des créanciers de la société Fil à Fil International,
3°/ de M. Frédéric Y..., domicilié ..., pris en qualité d'administrateur au réglement judiciaire de la société Fil à Fil International, défendeurs à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 31 mars 1998, où étaient présents : Mme Pasturel, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Tricot, conseiller rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et de La Varde, avocat de la société Création Cent Mille, de la société Fil à Fil et de M. A..., ès qualités, de Me Blondel, avocat de la société Fil à Fil International, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur l'irrecevabilité du pourvoi relevée d'office, après avertissement donné au demandeur :
Vu les articles 173 de la loi du 25 janvier 1985 et 605 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, selon le jugement déféré (tribunal de commerce de Marseille, 9 mai 1994) et les productions, que par contrat du 2 janvier 1992, la société Leading a donné en location-gérance à la société Fil à Fil international son fonds de commerce, situé à Marseille, de création, fabrication et vente de produits textiles, connus sous la marque "Fil à Fil", laquelle est exploitée à travers un réseau de franchises;
que par jugement irrévocable du 5 mars 1992, le tribunal de commerce de Châteauroux a étendu à la société Leading, en raison de la confusion de leurs patrimoines, le redressement judiciaire de la société Forest 1 prononcé le 26 février précédent;
que le 3 septembre 1992, l'administrateur de la procédure collective commune des sociétés Forest 1 et Leading a notifié à la société Fil à Fil international son intention de ne pas poursuivre le contrat de location-gérance;
que par jugement du 9 octobre 1992, le tribunal de commerce de Châteauroux a arrêté le plan de cession des actifs des sociétés Forest 1 et Leading au profit de la société Création cent mille ;
qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Fil à Fil international par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 29 juillet 1993, le commissaire à l'exécution du plan de la société Leading, la société Création cent mille et une société anonyme Fil à Fil ont demandé au juge-commissaire de la société Fil à Fil international d'écarter la prétention de l'administrateur judiciaire de cette société de continuer le contrat de location-gérance et de ne pas continuer des contrats de licence de fabrication;
que le juge-commissaire, se prononçant par une ordonnance du 27 septembre 1993, s'est déclaré incompétent pour statuer sur l'objet de la requête et "subsidiairement" a constaté que la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait consacré par un arrêt du 13 mai 1993 l'existence et la poursuite du contrat de location-gérance consenti par la société Leading à la société Fil à Fil international le 28 janvier 1992, et ce conformément à la décision prise par l'administrateur du redressement judiciaire de la société Fil à Fil international de poursuivre le contrat en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que la société Création cent mille, le commissaire à l'exécution de son plan et la société Fil à Fil demandent la cassation du jugement déféré, qui a confirmé cette ordonnance, au motif, selon le pourvoi, que le jugement qui n'annule pas l'ordonnance par laquelle le juge-commissaire, tout en se déclarant incompétent, a statué sur le fond, ne tire pas les conséquences que comportent ses constatations et viole l'article 1351 du Code civil ;
Mais attendu qu'il résulte du premier des textes susvisés que les jugements par lesquels le Tribunal statue sur le recours formé contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire hors les limites de ses attributions sont susceptibles d'appel ;
Et attendu qu'en vertu du second, la voie de la cassation n'est ouverte que lorsque toutes les autres voies de recours sont fermées ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
Déclare le pourvoi IRRECEVABLE ;
Condamne les sociétés Création Cent Mille, Fil à Fil et M. Z..., ès qualités aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Grimaldi, conseiller le plus ancien qui en a délibéré, en remplacement de Mme le président empêchée, en l'audience publique du vingt-six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.