AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Mohamed Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1996 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile), au profit de Mme Denise X..., demeurant ..., défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 31 mars 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, Mme Bignon, conseiller référendaire rapporteur, MM. Renard-Payen, Chartier, Durieux, Mme Bénas, MM. Guérin, Sempère, Bargue, conseillers, M. Savatier, conseiller référendaire, Mme Petit, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Bignon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lesourd, avocat de M. Y..., de la SCP Gatineau, avocat de Mme X..., les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Chambéry, 23 janvier 1996), statuant sur les difficultés nées de la liquidation, après divorce, de la communauté Tenafer-Goyon, d'avoir rejeté la demande d'attribution préférentielle de l'immeuble commun présentée par le mari, alors, selon le moyen, que l'attribution préférentielle est accordée à bon droit, si l'attributaire est amené à quitter temporairement sa résidence pour des raisons indépendantes de sa volonté;
que si M. Y... s'est vu obligé de quitter les lieux, conformément à l'ordonnance de non-conciliation, il les a réintégrés ultérieurement, puisque Mme X... a été accueillie par le Secours catholique;
qu'en faisant état du délai au 31 mars 1990, accordé à M. Y... pour quitter l'appartement et en constatant qu'il avait récupéré cet appartement au mois de septembre 1990, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'imposaient et a privé sa décision de base légale ;
Mais attendu que, pour rejeter la demande d'attribution préférentielle de M. Y..., la cour d'appel a aussi souverainement apprécié les intérêts en présence en tenant compte de l'absence de garantie financière de l'attributaire et du risque que cette attribution ferait ainsi courir à la copartageante;
qu'elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que, M. Y... reproche encore à la cour d'appel d'avoir décidé qu'il était redevable d'une indemnité, pour l'occupation de l'immeuble commun sans rechercher, comme elle y était invitée, si la somme réglée par lui en remboursement d'emprunt immobilier, pour le compte de Mme X... au titre de son occupation privative du logement familial, ne constituait pas une avance excluant toute indemnité d'occupation ;
Mais attendu que les dépenses effectuées par un indivisaire pour la conservation d'un bien indivis, compensées par l'indemnité fixée selon l'article 815-13 du Code civil, sont sans incidence sur l'évaluation de l'indemnité d'occupation mise par l'article 815-9 du même Code, à la charge de cet indivisaire pour la jouissance privative de ce bien;
que la cour d'appel n'avait donc pas à procéder à la recherche invoquée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.