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13/05/1998 | FRANCE | N°97-82556

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 mai 1998, 97-82556


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Henri, contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, du 9 avril 1997, qui, pour construction sans permis, l'a condamné à 200 000 francs d'amende, a ordonné,

sous astreinte, la mise en conformité des lieux avec le permis délivré et a pron...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Henri, contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, du 9 avril 1997, qui, pour construction sans permis, l'a condamné à 200 000 francs d'amende, a ordonné, sous astreinte, la mise en conformité des lieux avec le permis délivré et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1er du protocole additionnel n° 1 à ladite Convention, de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 modifiée pour la protection de l'environnement, R. 421-1, 1° et 10°, R. 422-2-m, L. 421-1, L. 480-4-5-7 et 9 du Code de l'urbanisme, 591 à 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné le requérant à une amende de 200 000 francs du chef de construction sans permis pour ce qui concerne les pompes à essence et les petits aménagements extérieurs accessoires aux cuves et canalisations enterrées et a ordonné sous astreinte la remise des lieux en l'état au regard du permis de construire du 27 octobre 1995 dans un délai de 6 mois ;

"aux motifs qu'il importe peu qu'Henri Y... ait sollicité, voire obtenu, de la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) l'autorisation d'exploiter la station service, compte tenu de l'autonomie des législations relatives, d'une part, aux règles d'urbanisme, d'autre part, aux installations classées;

que, si la construction des cuves de carburant et des canalisations enterrées ne peut être incriminée au vu des dispositions de l'article R. 421-1-1° du Code de l'urbanisme qui exempte de tels ouvrages souterrains de la nécessité de l'obtention d'un permis de construire, demeurent en revanche soumis aux poursuites les ouvrages extérieurs, cabine de paiement, pompes de distribution et abris annexes;

qu'à cet effet, Henri Y... invoque les dispositions des articles R. 422-m et R. 421-1-10° du Code de l'urbanisme, applicables, le premier aux ouvrages n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante, le second aux constructions légères;

or, attendu sur le premier point que si l'activité d'une station service a pour objet la commercialisation de produits, tout comme celle de la construction principale, les travaux litigieux ne peuvent relever d'une telle exemption, dans la mesure où ils procèdent d'un régime juridique différent de catégorie de constructions, soumises aux règles restrictives relatives aux installations classées;

que leur nature est encore différente puisque destinée à commercialiser des carburants alors que l'activité principale du magasin Ecomarché consiste, aux termes du permis de construire délivré, à écouler des denrées alimentaires;

que le moyen invoqué s'avère, en conséquence, vain ;

que, de surcroît, les dispositions de l'article R. 422-2-m ne s'appliquent qu'aux constructions ou travaux effectués sur un bâtiment existant, ce qui implique nécessairement une notion de contiguïté ou de mitoyenneté entre la construction principale et le nouvel ouvrage, condition non réalisée en l'espèce;

que, sur le second moyen, l'exception prévue par l'article R. 421-1-10° concerne les ouvrages d'une superficie n'excédant pas 2 m et d'une hauteur maximale de 1,50 m au-dessus du sol;

qu'il sera constaté, au vu des photographies versées aux débats que la hauteur des distributeurs de carburant, de l'abri protégeant les bonbonnes de gaz et la cabine de paiement, excède celle, maximale, stipulée par cet article, qui ne saurait ainsi recevoir application;

qu'il est ainsi suffisamment établi que la réalisation de cette station service était subordonnée à l'obtention préalable d'un permis de construire;

qu'il résulte des pièces et des plans fournis en mairie en vue de l'obtention du permis de construire n'indiquant nullement l'implantation de la station service litigieuse, mais, au même emplacement, des places de stationnement pour les véhicules de la clientèle, contrairement aux affirmations du prévenu qui ne se réfère, à cet effet, qu'à un schéma d'évacuation des eaux pluviales usées, en date du 27 juillet 1995;

qu'ainsi, en ne respectant pas les plans annexés au permis de construire, et qui en font nécessairement partie, notamment par une affectation du sol différente de celle pour laquelle cette autorisation a été obtenue, l'intéressé a, de ce fait, commis l'infraction qui lui était reprochée;

que, sous la réserve susvisée concernant les cuves et canalisations souterraines, le prévenu est coupable du délit de construction sans permis;

que la peine d'amende sera confirmée;

qu'elle apparaît juste et proportionnée à la gravité des faits et à la personnalité de l'intéressé, déjà condamné en 1990 pour construction sans permis;

qu'enfin, sur les observations écrites du préfet représenté par le directeur départemental de l'équipement et sur celles du maire de la commune, que la Cour estime devoir appliquer, les dispositions de l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme et, contrairement aux injonctions alternatives du tribunal, ordonner la remise des lieux en un état conforme aux prescriptions au permis de construire du 27 octobre 1995;

que le délai de 6 mois prescrit à cet effet courra, cependant, à compter du jour où le présent arrêt sera devenu définitif et ce, sous astreinte de 500 francs par jour de retard, passé l'expiration dudit délai ;

"alors que, d'une part, le maire de la commune n'ayant aucune compétence en matière d'installations classées, la cour d'appel ne pouvait condamner le demandeur du chef de construction sans permis d'une installation classée, par ailleurs, autorisée par les autorités de l'Etat seules compétentes en la matière ;

"alors que, d'autre part, les éléments litigieux, indissociables des cuves et canalisations autorisées pour ce qui concerne les pompes à essence et correspondant, pour le surplus, à l'aménagement de la station pour ce qui concerne l'auvent et la cabine de paiement, n'avaient pas lieu d'être soumis à permis de construire dans le cadre du droit commun et se trouvaient seulement régis, en vertu de la théorie de l'accessoire, à la législation propre aux établissements classés, en l'espèce, respectée par le prévenu ;

"alors que, de troisième part, en se refusant à rechercher si les éléments litigieux avaient pour effet de changer la destination de la grande surface existante au sens de l'article R. 422-2-m du Code de l'urbanisme et en se dispensant de motiver son arrêt au regard des conditions prévues par l'article R. 421-1-10° du même Code, la cour d'appel a privé son arrêt de motifs sur les exemptions dont se prévalait le requérant ;

"alors que, de quatrième part, la Cour ne pouvait ordonner la remise en état sans provoquer les observations de l'autorité compétente pour les établissements classés ;

"alors, en tout état de cause, que les pouvoirs reconnus aux juges répressifs en matière de remise en état ont un objet limité et ne leur permettent pas d'imposer le retour à la "destination initiale" des lieux;

qu'en se reconnaissant pareil pouvoir sans égard pour l'existence d'une installation classée, la cour a derechef excédé ses pouvoirs" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Henri Y..., autorisé à construire un bâtiment à usage de commerce alimentaire "Ecomarché", a implanté sur le site une station de distribution de carburants ;

Que, malgré l'obtention de l'autorisation spécifique relative aux installations classées, il a été poursuivi pour construction sans permis et condamné, notamment, à remettre les lieux en état, conformément aux prescriptions du permis délivré ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation du prévenu selon laquelle les ouvrages incriminés relèvent du même objet commercial et sont exemptés du permis de construire, les juges du fond retiennent que la cabine de paiement, les pompes et les abris annexes excèdent les dimensions prévues par l'article R. 422-2-m du Code de l'urbanisme, ont un objet différent de celui du magasin principal et ne figurent pas aux plans déposés à l'appui de la demande de permis ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui caractérisent l'infraction poursuivie, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués, dès lors que, par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées, l'autorisation ou la déclaration prévue par ce texte doit être jointe à la demande de permis de construire et ne saurait ainsi y suppléer ;

Attendu que, par ailleurs, les dispositions de l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme, qui exigent l'avis du maire ou du fonctionnaire compétent sur les mesures de remise en état, n'imposent pas, en outre, l'audition du fonctionnaire compétent en matière d'installations classées ;

qu'en ordonnant une remise en état des lieux conformément au permis déjà accordé, la cour d'appel, qui a fait l'exacte application du texte susvisé, n'a fait qu'user de la faculté qui lui est accordée par le même texte et de l'exercice de laquelle elle ne doit aucun compte ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Mistral conseiller rapporteur, MM. Roman, Aldebert, Blondet, Mme Garnier, M. Ruyssen conseillers de la chambre, Mme Ferrari, M. Sassoust conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Géronimi ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-82556
Date de la décision : 13/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

URBANISME - Permis de construire - Champ d'application - Local commercial - Magasin principal - Annexes ayant un objet différent - Portée - Station de distribution de carburant annexe à un bâtiment à usage de commerce alimentaire.


Références :

Code de l'urbanisme L480-1 et suiv., et R422-2-m

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 7ème chambre, 09 avril 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 mai. 1998, pourvoi n°97-82556


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.82556
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