AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Patrice Y...,
2°/ Mme Marie Claire Y... née X..., demeurant tous deux ..., en cassation d'un arrêt rendu le 14 mars 1996 par la cour d'appel de Rennes (1e chambre B, 1ère section), au profit :
1°/ de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) du Finistère, dont le siège social est 7, rue du Loc'h, ...,
2°/ de M. A..., pris en sa qualité de liquidateur judiciaire des époux Z..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 mars 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Bouscharain, conseiller rapporteur, M. Fouret, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bouscharain, conseiller, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat des époux Y..., de Me Blondel, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Finistère, de Me Garaud, avocat de M. A..., ès qualités, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Finistère a consenti divers concours financiers à la société "Le Parc de Quinquis";
que les époux Y... se sont constitués cautions solidaires au profit de la banque;
que l'emprunteuse a cessé d'exécuter ses obligations, puis a fait l'objet d'une mesure de liquidation judiciaire qui a été étendue à ses dirigeants, les époux Z...;
que la banque a attrait les cautions en justice en exécution de leur engagement ;
Attendu que les époux Y... reprochent à l'arrêt attaqué (Rennes, 14 mars 1996) d'avoir accueilli cette prétention, alors qu'en énonçant que le fait du créancier n'avait pas empêché, sur le fondement de l'article 2037 du Code civil, la subrogation de ses droits et actions au profit de la caution, sans rechercher si ce créancier n'était pas tenu à la constitution d'une sûreté sur les biens des débiteurs principaux, dès lors qu'il connaissait l'importance du patrimoine de ceux-ci, et s'il n'avait pas commis de faute en laissant la liquidation être clôturée pour insuffisance d'actif, sans mentionner l'existence du patrimoine réel, la cour d'appel n'aurait pas donné de base légale à sa décision au regard du texte précité ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que, selon l'article 2037 du Code civil, la caution n'est libérée, lorsque la subrogation aux droits, privilèges et hypothèques du créancier ne peut plus s'opérer en sa faveur, que si ces garanties existaient antérieurement au contrat de cautionnement ou que si le créancier s'était engagé à les prendre;
que, justifiant ainsi sa décision, elle a relevé, d'une part, que si l'emprunteur avait accepté que des sûretés soient prises sur ses biens à venir, le prêteur ne s'était pas obligé à les prendre, d'autre part, et surtout, que Mme Z..., dont le patrimoine avait été augmenté de biens successoraux cinq ans après la signature du contrat de cautionnement, n'était pas l'emprunteur;
que le grief est dépourvu de fondement ;
Et attendu que le pourvoi revêt un caractère abusif ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Finistère la somme de 5 000 francs et à M. A... ès qualités la même somme ;
Condamne M. Patrice Y... et Mme Marie-Claire X... son épouse, à une amende civile de 5 000 francs, chacun, au profit du Trésor public ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.