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12/05/1998 | FRANCE | N°96-40635

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 1998, 96-40635


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société SAAE, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 5 décembre 1995 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), au profit de M. Philippe X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Le Roux-Cocheril, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, Mlle Barber

ot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mlle Lambert, greffie...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société SAAE, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 5 décembre 1995 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), au profit de M. Philippe X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Le Roux-Cocheril, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, Mlle Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Le Roux-Cocheril, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société SAAE, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les trois moyens réunis :

Attendu que M. X..., engagé le 25 janvier 1971, par la société SAAE, en qualité de directeur d'études et recherches, a été licencié pour motif économique le 15 octobre 1993 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Rouen, 5 décembre 1995) de l'avoir condamnée à payer au salarié une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon les moyens, d'une première part, que l'acceptation d'une convention de conversion impliquant l'existence d'un motif économique, il appartient au salarié ayant accepté une telle convention, mais qui entend contester les motifs ayant conduit l'employeur à engager une procédure de licenciement, d'établir que le motif économique dont il avait apparemment admis l'existence en acceptant la convention de conversion, n'était en réalité ni réel ni sérieux;

qu'en reprochant à la société SAAE de n'avoir pas établi l'existence de difficultés économiques ainsi que le lien entre les nécessaires restructurations et la suppression du poste de M. X... pour conclure à l'absence de motif économique, la cour d'appel, qui a par ailleurs relevé que le salarié avait adhéré à une convention de conversion, a violé les articles L. 321-6, L. 511-1 du Code du travail et 1315 du Code civil;

alors, d'une deuxième part, et en tout état de cause, que le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles;

qu'en imputant à l'employeur la charge de prouver le caractère réel et sérieux du motif de licenciement invoqué, la cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil et L. 122-14-3 du Code du travail;

alors, d'une troisième part, que la cour d'appel qui, déplorant l'insuffisance des éléments fournis par les parties concernant les raisons pour lesquelles la restructuration du service de M. X... avait été décidée, a refusé d'ordonner toute mesure d'instruction afin de former sa conviction, s'est abstenue d'exercer les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail et a ainsi violé les dispositions de ce texte;

alors, d'une quatrième part, que le juge ne peut se fonder sur d'autres faits que ceux invoqués par l'employeur dans sa lettre de licenciement, que dès l'instant où la lettre du 15 octobre 1993 n'invoquait, pour seul motif, que la suppression du poste de directeur études et recherches suite à la restructuration du service études et recherches, la cour d'appel ne pouvait, pour conclure au caractère illégitime du licenciement, se fonder sur la prétendue absence de preuve de l'existence de difficultés économiques qui n'avaient pas été invoquées par l'employeur dans la lettre de licenciement, sans violer l'article L. 122-14-2 du Code du travail;

alors, d'une cinquième part, que constitue un licenciement pour motif économique, aux termes de l'article L. 321-1 du Code du travail, le licenciement d'un salarié résultant de la suppression de son poste consécutive notamment à des difficultés économiques;

qu'en se bornant à énoncer que cette circonstance, pourtant non limitativement énumérée par ce texte, n'était pas caractérisée sans même examiner le motif invoqué par l'employeur qui faisait état de la nécessaire restructuration du service de M. X... pour justifier la décision de congédiement, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

alors, d'une sixième part, que dans ses écritures d'appel, l'employeur faisait valoir que si elle s'inscrivait dans un contexte global de difficultés économiques, la suppression du poste de M. X... avait surtout été décidée dans le cadre de la restructuration de son service dont il résultait que l'essentiel des attributions du salarié n'avait plus d'objet ou avait été confié à des responsables de la société "dans le cadre des mesures de réorganisation économique permettant de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise";

qu'en se bornant à énoncer que cette restructuration n'aurait pas été imposée par des difficultés économiques sans rechercher si, comme le faisait valoir la société SAAE, cette décision ne reposait pas sur la nécessité de procéder à un aménagement structurel du service de M. X... dans l'intérêt de l'entreprise ce qui conférait au licenciement du salarié un caractère économique indubitablement réel et sérieux, la cour d'appel a privé la décision attaquée de toute base légale au regard de l'article L. 321-1 du Code du travail;

alors, d'une septième part, que les difficultés susceptibles de justifier un licenciement pour motif économique doivent être appréciées au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise;

que dans ses écritures d'appel, la société SAAE expliquait que le 1er janvier 1993, elle avait racheté toutes les parts que la société FAVLCAB détenait dans la société Sarelec, de sorte que cette dernière était devenue une simple filiale chargée de commercialiser ses produits;

qu'en ne tenant pas compte de cette opération survenue près d'un an avant le licenciement, et en refusant de prendre en compte le déficit cumulé de deux sociétés pour apprécier la légitimité de cette mesure, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 321-1 du Code du travail;

alors, d'une huitième part, et en tout état de cause, que dans ses écritures d'appel, la société SAAE avait expliqué que le bilan prévisionnel de l'exercice 1993 qu'elle versait aux débats faisait apparaître, pour la seule société SAAE, un déficit de 3 254 196 francs qui rendait plus indispensable encore la restructuration du service du salarié;

qu'en déduisant l'illégitimité du motif économique invoqué par la société SAAE du fait que son bilan prévisionnel pour l'exercice 1993 aurait révélé un chiffre positif de 3 254 196 francs, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil;

et alors, d'une dernière part, qu'à la faveur de cette dénaturation, la cour d'appel qui ne s'est pas expliquée sur ce déficit duquel il résultait pourtant que la restructuration du service de M. X..., qui avait eu pour conséquence la suppression de son poste, s'inscrivait dans le cadre de difficultés économiques incontestables, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 321-1-1 du Code du travail ;

Mais attendu, qu'abstraction faite d'un motif surabondant, la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son examen, a fait ressortir que la restructuration invoquée à l'appui du licenciement du salarié, n'avait pas été décidée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et a pu en déduire que le licenciement n'avait pas de cause économique;

que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société SAAE aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société SAAE à payer à M. X... la somme de 12 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-40635
Date de la décision : 12/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen (chambre sociale), 05 décembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 1998, pourvoi n°96-40635


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.40635
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