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12/05/1998 | FRANCE | N°96-40331

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 1998, 96-40331


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Casino de France, société en nom collectif, dont le siège social est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 8 novembre 1995 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), au profit de M. Alain X..., demeurant Les Bruyères, 71300 Mary, défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril,

Lanquetin, conseillers, Mlle Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, a...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Casino de France, société en nom collectif, dont le siège social est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 8 novembre 1995 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), au profit de M. Alain X..., demeurant Les Bruyères, 71300 Mary, défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Le Roux-Cocheril, Lanquetin, conseillers, Mlle Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de la société Casino France, de Me Luc-Thaler, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu que, M. X... engagé le 29 juin 1987 par la société Casino France a été licencié pour faute grave le 16 avril 1993 ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Dijon, 8 novembre 1995) d'avoir décidé que le licenciement n'était pas justifié par une faute grave, alors, selon le moyen, que d'une part, l'employeur faisait valoir de façon très circonstanciée en produisant des éléments objectifs quant à ce, que la preuve des détournements reprochés au salarié était parfaitement rapportée;

qu'ainsi, au début du mois d'avril 1993, l'attention du chef de sécurité responsable de la gestion de la station-service fut spécialement attirée par la chute du nombre de clients passant à la station de lavages, fait objectif;

que l'examen de l'état journalier des ventes hors carburant rempli quotidiennement par M. X... lui-même lui permit de constater un décalage entre le nombre de lavages déclarés par le salarié et le nombre de lavages résultant du relevé du compteur de la station, autant d'éléments objectifs;

qu'ainsi, pour la seule période des 3, 5 et 6 avril 1993, une différence de 20 passages a été noté;

que soucieux de connaître l'origine de cette différence, le chef de sécurité décida alors, deux jours durant, de compter lui-même le nombre de passages de véhicules à la station de lavage en n'utilisant ce faisant aucun moyen frauduleux ou déloyal susceptible de porter atteinte à la vie privée de M. X... qui travaillait à l'intérieur d'une cabine aux vitres teintées rendant impossible toute surveillance de celui-ci;

or, le décompte effectué par M. Z... confortait les données objectives précitées et permit de constater que le nombre de clients ayant fait laver leurs véhicules s'élevait à 18 pour le 8 avril 1993 et à 16 pour le 9 avril, que si ces chiffres correspondaient bien à ceux portés au compteur de la station, ils étaient très différents de ceux effectivement déclarés par M. X... qui n'étaient que de 7 lavages déclarés pour le 8 avril, soit un manque de 6 passages, et 12 lavages déclarés pour le 9 avril, soit un manque de 4 passages;

qu'en l'état de ces allégations circonstanciées assorties de preuves objectives, la Cour d'appel ne pouvait débouter l'employeur en statuant à partir d'hypothèses émises par le salarié et en faisant état d'une impossibilité pour l'employeur d'apporter une objection pertinente à ladite hypothèse;

qu'ainsi, l'arrêt méconnaît les exigences d'une motivation adéquate, d'où une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

alors que, d'autre part, en l'état d'allégations assorties de preuves pertinentes, la cour d'appel se devait de se prononcer sur lesdites preuves, sans pouvoir les écarter à partir d'une simple hypothèse émise par le salarié, d'où une violation des articles 1315 et 1353 du Code civil;

alors que, de troisième part, à partir du moment où le salarié émettait l'hypothèse que certains automobilistes étaient en possession de plusieurs jetons, acquis auparavant ou qui leur aurait été donné, de telle sorte que leur passage à la station n'était pas comptabilisé pour lui, pour échapper à la démonstration rigoureuse de l'employeur, il incombait audit salarié d'établir l'hypothèse qu'il émettait ;

qu'en déboutant cependant l'employeur au prétexte qu'il n'apportait aucune réponse satisfaisante à la simple objection du salarié assortie d'aucune offre de preuve pertinente, la cour d'appel inverse le fardeau de la preuve et partant viole de plus fort l'article 1315 du Code civil, ensemble les règles et principes qui gouvernent l'office du juge en la matière au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail et L. 122-9 du même Code;

et alors, enfin, que dans ses écritures d'appel, l'employeur faisait encore valoir que quand bien même la cour d'appel "déciderait de ne pas tenir compte des aveux écrits de M. X..., il n'en resterait pas moins que celui-ci a volontairement et librement avoué s'être livré à des détournements lors de l'entretien préalable à son licenciement du 14 avril, comme en atteste la personne y ayant assisté, Mme Y... (Pièce 15) (...) (que) cette dernière étant membre du comité d'entreprise, déléguée du personnel et déléguée syndicale CGT, elle ne saurait être soupçonnée d'avoir attesté sous la pression de l'employeur (...) (que) M. X... ne peut, quant à lui, sérieusement prétendre que les aveux faits par lui au cours de cet entretien lui ont été soutirés par l'effet de contrainte" en sorte que "les dénégations de M. X..., pour le moins tardives et opportunes, ne sauraient en conséquence être prises au sérieux;

qu'en ne répondant pas de façon précise à un moyen circonstancié de nature à avoir à lui seul une incidence sur la solution du litige, à savoir un aveu réitéré lors de l'entretien préalable en présence notamment d'un membre du comité d'entreprise, délégué du personnel et délégué syndical CGT qui assistait le salarié lui-même, la cour d'appel qui se contente de généralités, méconnaît de plus fort les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile violé ;

Mais attendu que, sous le couvert de griefs infondés de violation de la loi et des règles de la preuve et de défaut de réponses à conclusions, le moyen tend à remettre en discussion devant la Cour de Cassation des éléments de fait et de preuve souverainement appréciés par les juges du fond;

qu'il ne saurait donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Casino France aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-40331
Date de la décision : 12/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon (chambre sociale), 08 novembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 1998, pourvoi n°96-40331


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.40331
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