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12/05/1998 | FRANCE | N°95-44350

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 1998, 95-44350


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Ouest France, dont le siège est zone industrielle Rennes Sud Est, ..., en cassation d'un arrêt rendu le 4 juillet 1995 par la cour d'appel de Rennes (5e chambre), au profit de M. Georges X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Le Roux-Cocheril, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseil

ler, Mme Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mll...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Ouest France, dont le siège est zone industrielle Rennes Sud Est, ..., en cassation d'un arrêt rendu le 4 juillet 1995 par la cour d'appel de Rennes (5e chambre), au profit de M. Georges X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 mars 1998, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Le Roux-Cocheril, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, Mme Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Le Roux-Cocheril, conseiller, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat de la société Ouest France, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux moyens, réunis :

Attendu que M. X... a collaboré à compter d'août 1990 avec la société Ouest France en lui fournissant des articles concernant le domaine hippique;

qu'au début de l'année 1993 la société lui a signifié la fin de cette collaboration ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué statuant sur contredit (Rennes, 4 juillet 1995) d'avoir dit que la juridiction prud'homale était compétente, pour trancher le litige opposant M. X... à la société, alors, de première part, que le prêt de matériel, la remise de fourniture et l'abonnement à des sociétés d'encouragement de la race chevaline pour permettre à un correspondant de fournir des informations n'est pas exclusif de la qualité de travailleur indépendant;

qu'en affirmant péremptoirement le contraire, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'absence de qualité de travailleur indépendant et a violé les articles L. 761-2 et suivants du Code du travail, ensemble les articles 1 du décret du 25 janvier 1990 et 16 de la loi du 27 janvier 1993;

alors, de deuxième part, que la société produisait divers documents émanant de M. X... démontrant sa qualité de travailleur indépendant, qu'en n'analysant pas ces documents, la cour d'appel, qui considère que M. X... était journaliste professionnel et à ce titre salarié sans aucune référence ni analyse des pièces produites, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 761-2 du Code du travail, 1 du décret du 25 janvier 1990 et 16 de la loi du 27 janvier 1993;

alors, de troisième part, que le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources, le correspondant local de la presse régionale ou départementale, contribuant, selon le déroulement de l'actualité, à la collecte de toute information de proximité relative à une zone géographique déterminée ou à une activité sociale particulière pour le compte d'une entreprise éditrice, sa contribution consistant en l'apport d'informations soumises avant une éventuelle publication à la vérification ou à la mise en forme préalable par un journaliste professionnel;

que la société faisait valoir que le secrétaire de rédaction intervenait régulièrement sur les articles fournis par Georges X..., dit Bellino Il, correspondant, dont les articles étaient impubliables directement;

qu'en considérant que s'il est possible que M. Y... ait, à l'occasion, rebâti des articles fournis par Georges X..., celui-ci fait la preuve, par la production de ses brouillons d'articles et par comparaison avec les articles publiés que ceux-ci n'avaient subi aucun traitement, la cour d'appel, qui décide qu'on ne peut déduire d'une correction ponctuelle que Georges X... n'était qu'un correspondant de presse alors que, dans la plupart des cas, ces articles étaient édités sans correction, qu'il subissait un certain nombre de contraintes incompatibles avec l'état de travailleur indépendant, qu'il devait remplacer le rédacteur hippique lors des réunions des sociétés de course, que des indications lui étaient fournies sur la manière de décrire les réunions hippiques lorsque les programmes étaient chargés et qu'il lui était imposé de téléphoner les résultats hippiques, puis relevant que des corrections, même ponctuelles, étaient faites sur les articles de M. X... et qu'en décidant que ces corrections ponctuelles ne permettent pas d'établir que M. X... n'était qu'un correspondant de presse, la plupart de ses articles étant édités sans correction, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 761-1 du Code du Travail, ensemble l'article ler du décret 90-96 du 25 janvier 1990 et 16 et suivants de la loi du 27 janvier 1993;

alors, de quatrième part, que le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou dans une ou plusieurs agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources, le correspondant local de la presse régionale ou départementale contribuant, selon le déroulement de l'activité, à la collecte de toute information de proximité relative à une zone géographique déterminée ou à une activité sociale particulière pour le compte d'une entreprise éditrice, cette contribution consistant en l'apport d'informations soumises avant une éventuelle publication à la vérification ou à la mise en forme préalable par un journaliste professionnel qu'ayant relevé que s'il est possible que M. Y... ait, à l'occasion, rebâti des articles fournis par Georges X..., celui-ci fait la preuve, par la production de ses brouillons d'articles et par comparaison avec les articles publiés, que ceux-ci n'avaient subi aucun traitement, la cour d'appel, qui décide qu'on ne peut déduire d'une correction ponctuelle que Georges X... n'était qu'un correspondant de presse, cependant que dans la plupart des cas ses articles étaient édités sans correction et qu'en conséquence, il apparaît que les activités exercées par Georges X... correspondent à celles d'un journaliste professionnel tel qu'il est défini par l'article L. 761-2, alinéa 1er, du Code du travail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si comme le faisait valoir la société Ouest France, les articles rédigés par M. X... étaient préalablement et systématiquement vérifiés par le secrétaire de la rédaction, ce qui caractérisait le correspondant local de la presse régionale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 761-2 du Code du travail, 1er du décret 90-96 du 25 janvier 1990 et 16 de la loi du 27 janvier 1993;

alors, de cinquième part, que la société avait fait valoir que les seules directives, qui avaient été données à M. X..., comme à l'ensemble des correspondants, consistaient dans l'échange d'éléments d'information (agendas de manifestations locales, indications de la surface disponible...) ou d'informations techniques personnalisées (formulaires types de transmission des articles, limite impérative pour le bouclage du journal, normes techniques en vigueur...), ces informations pouvant être formalisées par un courrier nominatif, précisant qu'elle avait adressé à l'ensemble de ses correspondants hippiques, par courriers des 2 juin 1992, 30 juin 1992 et 30 juillet 1992, diverses consignes, celles-ci étant précisément relatives à l'agenda des manifestations locales ou bien aux limites impératives pour le bouclage du journal ou encore à la surface disponible et qu'on ne saurait, dès lors, voir dans ces recommandations la marque d'un quelconque lien de subordination de M. X... à l'égard du Journal Ouest France;

qu'en se contentant d'affirmer que Georges X... subissait un certain nombre de contraintes incompatibles avec l'état de travailleur indépendant, qu'il devait remplacer le rédacteur hippique lors des réunions des sociétés de courses, que des indications lui étaient fournies sur la manière de décrire les réunions hippiques lorsque le programme était chargé, qu'il lui était imposé de téléphoner les résultats hippiques, que des directives précises lui étaient données lors de réunions ou périodes spéciales, la cour d'appel, qui en déduit que dans ses rapports avec la rédaction de Ouest France, Georges X... était traité comme un subordonné recevant des ordres, ajoutant par un motif inopérant que dès son entrée dans la société le rédacteur des informations hippiques avait envisagé de lui faire attribuer une carte de presse, la cour d'appel, qui n'a pas précisé en quoi consistaient les directives données eu égard au moyen de la société demanderesse, s'est prononcée par des motifs vagues insusceptibles de caractériser l'existence d'un lien de subordination en tenant compte de l'activité de M. X... et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 761-2 du Code du travail, ensemble les articles 16 de la loi 93-121 du 27 janvier 1993 et ler du décret 90-96 du 25 janvier 1990;

alors, de sixième part, que la société faisait valoir que M. X... était rémunéré à I'acte à la pige, par des honoraires variant en fonction de ses activités et suivant la grille prévue à cet effet, qui établissait que les appointements de M. X... ne remplissaient pas la condition de fixité requise par l'article L. 761-2, alinéa ler, du Code du travail;

qu'elle ajoutait que les relevés d'honoraires établissaient que l'activité de M. X... ne présentait pas la condition de régularité requise, ni a fortiori qu'elle constituait le principal de ses revenus, la déclaration fiscale produite par M. X... démontrant que ce dernier faisait figurer les sommes reçues à la rubrique :

activité non commerciale;

qu'ayant constaté qu'il résultait des pièces produites que Georges X... a reçu de Ouest France en 1991 : 16 984 francs, en 1992 : 23 940 francs et en 1993 : 1977 francs et que selon ses déclarations d'impôt, ces sommes constituaient ses seules ressources, son épouse ayant ses propres revenus, la cour d'appel, qui en déduit que les activités exercées par M. X... correspondent à celles d'un journaliste professionnel, tel qu'il est défini par l'article L. 761-2, alinéa 1er, du Code du travail, sans rechercher si l'honoraire perçu par M. X... en fonction de ses activités, suivant la grille prévue, présentait le caractère de fixité et de régularité requis par l'article L. 761-2, a privé sa décision de base légale au regard dudit texte;

alors, de septième part, que la société faisait valoir que M. X... était rémunéré à l'acte à la pige, par des honoraires variant en fonction de ses activités et suivant la grille prévue à cet effet, qui établissait que les appointements de M. X... ne remplissaient pas la condition de fixité requise par l'article L. 761-2, alinéa 1er, du Code du travail;

qu'elle ajoutait que les relevés d'honoraires établissaient que l'activité de M. X... ne présentait pas la condition de régularité requise, ni a fortiori qu'elle constituait le principal de ses revenus, la déclaration fiscale produite par M. X... démontrant que ce dernier faisait figurer les sommes reçues à la rubrique :

activité non commerciale, qu'ayant constaté qu'il résultait des pièces produites que Georges X... a reçu de Ouest France en 1991 :

16 984 francs, en 1992 : 23 940 francs et en 1993 : 1 977 francs et que selon ses déclarations d'impôt, ces sommes constituaient ses seules ressources, son épouse ayant ses propres revenus, la cour d'appel qui en déduit que les activités exercées par M. X... correspondent à celles d'un journaliste professionnel, tel qu'il est défini par l'article L. 761-2, alinéa 1er, du Code du travail, sans rechercher si l'honoraire perçu par M. X... en fonction de ses activités, sans nullement constater que M. X... percevait des appointements fixes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 761-2 du Code du Travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, appréciant les éléments de fait soumis à son examen, a retenu que M. X..., qui était chargé de la rédaction d'articles selon les indications que lui donnait la société, devait, en outre, remplacer le rédacteur hippique lors des réunions des sociétés de courses et, qu'en contrepartie, il percevait une rémunération qui constituait la totalité de ses revenus;

qu'elle a pu déduire de ces constatations, sans encourir les griefs des moyens, que la société n'avait pas renversé la présomption établie par l'article L. 761-2 du Code du travail;

que les moyens ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ouest France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Ouest France à payer à M. X... la somme de 12 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 95-44350
Date de la décision : 12/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Journaliste professionnel - Définition - Présomption légale.


Références :

Code du travail L761-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (5e chambre), 04 juillet 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 1998, pourvoi n°95-44350


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CARMET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.44350
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