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06/05/1998 | FRANCE | N°97-83065

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 mai 1998, 97-83065


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller F..., les observations de Me Z..., et de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de D... ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- E... Thierry,

- L'ASSOCIATION CAP EVEIL, civilement responsable,

- GARCIA A...
C... Francisco,

civilement responsable,

- La COMPAGNIE D'ASSURANCES MERCURIO, partie intervenante, contre l'...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller F..., les observations de Me Z..., et de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de D... ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- E... Thierry,

- L'ASSOCIATION CAP EVEIL, civilement responsable,

- GARCIA A...
C... Francisco, civilement responsable,

- La COMPAGNIE D'ASSURANCES MERCURIO, partie intervenante, contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 7 mai 1997, qui, pour homicides et blessures involontaires, a condamné le premier à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Sur le pourvoi formé par la compagnie d'assurances Mercurio et Francisco Garcia A...

C...
:

Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui du pourvoi ;

Sur le pourvoi formé par Thierry E... et l'association Cap Eveil :

Vu les mémoires produits en demande et en défense :

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 319 et 320 de l'ancien Code pénal, R. 625-2 du Code pénal, 497 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Thierry E... coupable d'homicides involontaires et d'atteintes involontaires à l'intégrité de la personne, l'a condamné à une peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et à 10 000 francs d'amende et, statuant sur l'action civile, l'a déclaré responsable, avec Mme Y... et M. B..., des conséquences dommageables de l'accident survenu le 7 février 1991 au Pla d'Adet et condamné solidairement avec eux à verser diverses provisions aux parties civiles ;

"aux motifs qu'en sa qualité de directeur de l'association Cap Eveil, organisateur du séjour des enfants du lycée français de Madrid, Thierry E... avait une parfaite connaissance de la configuration des lieux;

qu'il est constant qu'il a omis d'attirer l'attention de son cocontractant sur la dangerosité de la route menant de Saint-Lary au Pla d'Adet, sur les restrictions de circulation applicables aux autocars de plus de 20 places;

que c'est en l'état de ces informations tronquées que M. X... a signé au nom du lycée français de Madrid un contrat prévoyant que tous les transports seraient effectués en autocar;

qu'il avait été évoqué lors de la discussion préalable la possibilité pour les enfants d'utiliser le téléphérique;

que cette solution avait été écartée du fait que le groupe disposait d'un autocar pendant tout le séjour;

que, cependant, M. X... ignorait l'existence d'une réglementation de l'accès au Pla d'Adret pour les autocars de plus de 20 places et n'avait pas été informé de ce que le prix du trajet par téléphérique était inclus dans le forfait ski;

qu'il est évident que si M. X... avait disposé de l'ensemble des informations qui devaient lui être fournies par Thierry E..., il aurait adopté un autre solution pour les trajets Saint-Lary - Pla d'Adet en utilisant, en particulier, le téléphérique;

que, ne connaissant pas les lieux, il ignorait tout des risques inhérents à la circulation d'un autocar sur la route reliant la vallée à la station d'altitude et surtout que cette circulation était réglementée;

qu'il n'en a pas été davantage avisé au cours du séjour par sa correspondante, Mme Y...;

qu'en effet, l'institutrice, responsable de la classe, n'avait pas jugé utile d'attirer l'attention de son directeur sur l'existence de l'arrêté interdisant la montée et la descente des cars à certaines heures, étant intimement persuadée que le lycée français de Madrid avait obtenu une dérogation lui permettant de s'affranchir de toute réglementation;

que si elle a commis l'erreur de ne pas se faire communiquer un document écrit formalisant cette dérogation, elle a été entretenue dans cette illusion par divers facteurs;

qu'en effet, Thierry E..., dès l'arrivée du groupe, avait rassuré Mme Y... et Mme H... sur le fait que leur autocar ne serait pas contrôlée par les gendarmes s'il circulait hors des plages autorisées;

qu'il était perceptible par tous ceux qui abordaient le problème de la réglementation de la route pour les autocars de plus de 20 places, qu'il existait un certain laxisme des autorités chargées de son respect;

que Thierry E... croyait lui-même en la possibilité d'obtenir une dérogation;

qu'il apparaît cependant que non seulement aucune dérogation n'a été accordée, mais qu'elle n'a jamais été sollicitée par l'organisateur du séjour, ni par personne d'autre;

que Thierry E..., alors qu'il savait que le lycée français de Madrid assurerait tous les déplacements de la classe lors du séjour à Pla d'Adet par autocar affrété à cet usage, a commis une grave négligence en s'abstenant d'attirer l'attention de son cocontractant sur les conditions particulières entre Saint-Lary et le lieu de séjour en altitude sur une route dangereuse en hiver et soumise à une réglementation quant à son utilisation à certaines heures;

que cette réticence coupable d'information a eu un rôle causal dans l'accident;

qu'en effet, si, dès la signature du contrat, M. X... avait eu une connaissance exacte et précise de ces éléments, il aurait arrêté d'autres dispositions lors du départ matinal des enfants vers Madrid, ce qui aurait évité à ces derniers de se trouver à l'intérieur d'un car descendant une route de montagne, verglacée, de nuit, à 7 heures du matin;

qu'il convient de prononcer à l'encontre de l'organisateur du séjour une peine d'emprisonnement d'un an avec sursis ainsi qu'une amende de 10 000 francs;

que M. B..., Mme G..., épouse Y... et Thierry E... ont, par leurs fautes respectives, concouru à la production du dommage qu'ils seront tenus solidairement de réparer le préjudice subi par les parties civiles ;

"alors, d'une part que, les articles 319 et 320 du Code pénal exigent, pour recevoir application, l'existence d'un lien de causalité certain entre la faute du prévenu et le décès ou les blessures de la victime;

que la démonstration du caractère certain de ce rapport de causalité ne peut procéder d'un raisonnement fondé sur une vraisemblance, une hypothèse ou une probabilité;

que, dès lors, en énonçant, pour retenir Thierry E... dans les liens de la prévention, que si celui-ci n'avait pas négligé d'informer le directeur de l'école primaire du lycée français de Madrid, des conditions particulières de circulation sur le site de l'accident, ce dernier aurait évité l'accident en arrêtant "d'autres dispositions" relativement au transport du groupe séjournant au Pla d'Adet, alors que ce raisonnement, à le supposer vraisemblable, ne repose cependant que sur une hypothèse et laisse par là même substituer un doute, la cour d'appel a omis de caractériser l'existence d'un lien de causalité certain entre la négligence imputée par Thierry E... et les dommages subis par les victimes, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ;

"alors, d'autre part, qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'inobservation de l'arrêté en date du 27 novembre 1990 réglementant les horaires de circulation des cars sur la route où s'est produit l'accident n'a eu aucun caractère causal dans la survenance de l'accident, la réglementation mise en place répondant davantage à des préoccupations économiques que "sécuritaires", et que le verglas pouvait apparaître à tout moment et donc pendant les heures durant lesquelles ledit arrêté autorisait la circulation des autocars;

que, dès lors, en décidant que Thierry E... avait engagé sa responsabilité pénale en n'attirant pas l'attention de ses cocontractants sur l'existence dudit arrêté, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient nécessairement de ses propres constatations, violant ainsi les textes visés au moyen" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, par des motifs propres et adoptés, exempts d'insuffisance et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, caractérisé en leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation au profit des parties civiles des indemnités propres à réparer les préjudices découlant de ces infractions ;

Qu'il s'ensuit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Roman conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Mistral conseiller rapporteur, MM. Aldebert, Blondet, Mme Garnier, M. Ruyssen conseillers de la chambre, Mme Ferrari, M. Sassoust conseillers référendaires ;

Avocat général : M. de Gouttes ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-83065
Date de la décision : 06/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, 07 mai 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 mai. 1998, pourvoi n°97-83065


Composition du Tribunal
Président : Président : M. ROMAN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.83065
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